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23/07/2019 | FRANCE | N°19NC00238

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23 juillet 2019, 19NC00238


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1803140 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, M. A..., représenté par MeB..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement tribunal administratif de Strasbourg du 4 octobre 2018 ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1803140 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement tribunal administratif de Strasbourg du 4 octobre 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 23 février 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, à titre principal, un titre de séjour " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation en lui délivrant dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur de fait en lui attribuant la nationalité marocaine ;

- les stipulations de l'accord franco-marocain ne lui sont pas opposables ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision se fonde sur une décision elle-même illégale ;

- elle est insuffisamment motivée, notamment en droit ;

- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision fixant du pays de renvoi :

- la décision se fonde sur une décision elle-même illégale ;

- la décision est insuffisamment motivée en fait ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2018, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Wallerich, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant marocain né le 16 mars 1983, est entré irrégulièrement en France le 14 mars 2016. Le statut de réfugié lui a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés (OFPRA) le 12 avril 2016 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 12 octobre 2017. L'intéressé a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de articles L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 23 février 2018, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision en litige comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, en particulier au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation tant en droit qu'en fait doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation du requérant, notamment eu égard aux éléments fournis par M. A...et relatifs à son expérience professionnelle. Le moyen tiré du défaut d'examen doit ainsi être écarté.

4. En troisième lieu, si M. A...revendique la nationalité sahraouie, l'intéressé est titulaire d'une carte nationale d'identité marocaine délivrée par les autorités de ce pays. Par voie de conséquence, alors que le requérant n'établit pas être dépourvu de la nationalité marocaine, c'est sans erreur de droit que le préfet de la Moselle lui a appliqué les stipulations de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi. La circonstance que le requérant ne se considère pas comme citoyen marocain est sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de droit doivent être écartés.

5. En quatrième lieu, l'article 3 de l'accord franco-marocain stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " /(...). ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...). ". Selon l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a sollicité l'obtention d'un titre de séjour en vue de l'exercice d'une activité professionnelle en qualité de " salarié ". Dans la mesure, d'une part, où l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale soit au titre d'une activité salariée en se voyant attribuer l'une des cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions du code précité, et, d'autre part, où l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", M. A...ne pouvait utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui de sa demande de titre de séjour portant la mention " salarié ", s'agissant d'un point traité par l'accord franco-marocain. Dans ces conditions, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en exigeant la réalisation d'un contrôle médical et la présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes conformément aux stipulations précitées de l'accord franco-marocain.

7. Certes, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. Si M. A...soutient qu'il justifie d'une expérience professionnelle et d'une promesse d'embauche en qualité d'ouvrier frigoriste, il ne présente aucune pièce justificative en ce qui concerne ses qualifications et son expérience professionnelle. Dans ces conditions, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation du requérant en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".

9. M. A...fait valoir qu'il manifeste des efforts d'insertion en France, pays dans lequel il souhaite travailler. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé y est entré pour la première fois en mars 2016 alors qu'il était âgé de 33 ans et qu'il avait toujours résidé dans son pays d'origine. Le requérant est célibataire et sans enfant et n'établit aucunement l'absence d'attaches familiales au Maroc. Eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, le préfet de la Moselle n'a pas méconnu les dispositions et les stipulations précitées en refusant de délivrer à M. A...un titre de séjour.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.

11. En deuxième lieu, la décision est régulièrement motivée, notamment en droit. La circonstance que l'arrêté contesté ne précise pas l'alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auquel se rattache le cas de M. A...ne saurait caractériser une insuffisance de motivation au sens de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Le moyen doit être écarté.

12. En troisième lieu, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort d'aucune des mentions de la décision contestée que le préfet de la Moselle se serait estimé en situation de compétence liée pour prononcer à l'encontre du requérant une mesure d'éloignement.

13. En quatrième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle doit être écarté pour les mêmes motifs qu'exposés au point 9.

Sur la fixation du pays de renvoi :

14. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée, notamment en ce qui concerne les risques courus au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

16. En troisième et dernier lieu, M.A..., dont la demande d'asile a été, par ailleurs, rejetée par l'OFPRA puis par la CNDA, n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations selon lesquelles le préfet ne pouvait pas retenir le Maroc comme pays de destination alors qu'ainsi qu'il a été relevé précédemment, l'intéressé est titulaire d'une carte nationale d'identité marocaine et qu'il ne démontre pas l'existence de risques personnels en cas de retour dans ce pays.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 19NC00238


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 23/07/2019
Date de l'import : 30/07/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19NC00238
Numéro NOR : CETATEXT000038815735 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-07-23;19nc00238 ?
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