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02/07/2019 | FRANCE | N°18NC03474

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2019, 18NC03474


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 1801382 du 22 août 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 déce

mbre 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 1801382 du 22 août 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 22 août 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 janvier 2018 pris à son encontre par le préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le jugement n'a lui-même pas suffisamment motivé sa réponse à ce moyen ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 de ce code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée pour édicter la mesure d'éloignement, sans examiner les conséquences d'une telle mesure sur sa situation personnelle en méconnaissance du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008 ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision quant à sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures de première instance

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Niger relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Niamey le 24 juin 1994 ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., né le 1er août 1989 et de nationalité nigérienne, est entré en France le 1er juin 2017 muni d'un passeport en cours de validité revêtu d'un visa de court séjour, valable du 31 mai 2017 au 15 juillet 2017. Il a sollicité le 26 juillet 2017 son admission exceptionnelle au séjour au titre du travail. Par un arrêté du 8 janvier 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé. M. A...fait appel du jugement du 22 août 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision contestée, après avoir notamment visé la convention franco-nigérienne relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique de manière précise et circonstanciée les motifs de droit et de fait pour lesquels un refus de titre de séjour a été opposé à M.A.... Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision, auquel les premiers juges ont eux-mêmes répondu de manière suffisamment motivée, doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 de la convention franco-nigérienne du 24 juin 1994 : " Pour un séjour de plus de trois mois, les ressortissants français à l'entrée sur le territoire nigérien et les ressortissants nigériens à l'entrée sur le territoire français doivent être munis d'un visa de long séjour et des justificatifs prévus aux articles 5 à 9 ci-après, en fonction de la nature de leur installation ". Selon les stipulations de l'article 5 de cette convention : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre Etat une activité professionnelle salariée doivent en outre, pour être admis sur le territoire de cet Etat, justifier de la possession : / 1. D'un certificat de contrôle médical établi dans les deux mois précédant le départ (...) 2. D'un contrat de travail visé par le ministère du travail (...) ". L'article 10 de la convention stipule que " pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants nigériens doivent posséder un titre de séjour ". Par ailleurs, le 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'une carte de séjour temporaire est délivrée à l'étranger, pour une durée maximale d'un an, en vue de l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou dans les cas prévus aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du code du travail, et que cette délivrance s'opère dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du même code. Selon les dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail qui remplace l'ancien article L. 341-2 du même code : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".

4. Contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a commis aucune erreur de droit en se fondant, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié, tant sur les stipulations précitées des articles 4 et 5 de la convention franco-nigérienne que sur les dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en relevant qu'il n'était détenteur ni d'un visa de long séjour ni d'un certificat de contrôle médical et que le contrat de travail produit n'était pas visé par les autorités compétentes.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, de même que tout élément de sa situation personnelle dont il ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France récemment à l'âge de vingt-sept ans et ne se prévaut pas d'attache notamment familiale en France. Par ailleurs, alors même que l'association sportive de Pagny-sur-Moselle dont le club de football évolue en championnat de France de Nationale 3, souhaite le recruter par un contrat à durée déterminée d'une durée de onze mois en se prévalant de ce qu'il a été sélectionné en équipe nationale de football du Niger et a notamment participé à la Coupe d'Afrique des nations en 2012 et 2013 ainsi qu'à la Coupe du monde de football en 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle ne peut être regardé, en estimant que cette circonstance n'est pas de nature à constituer un motif d'admission exceptionnelle au séjour, comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 ci-dessus et en l'absence d'autre élément invoqué par le requérant, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision relative au séjour, ne peut qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de la décision de refus de séjour. En l'espèce, la décision de refus de titre de séjour, ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus est suffisamment motivée. En outre, l'arrêté en litige vise le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

11. En troisième lieu, le requérant ne peut utilement se prévaloir directement, à l'appui de son recours, des objectifs fixés par l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 dès lors qu'à la date de la décision en litige, ce texte avait été transposé en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011.

12. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle se serait estimé à tort en situation de compétence liée pour assortir la décision de refus de titre de séjour d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ou qu'il n'aurait pas examiné, préalablement à son édiction, les conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle de M. A....

13. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 ci-dessus, le moyen tiré de ce que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige quant à la situation personnelle de M. A... doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A..., qui n'a soulevé aucun moyen à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision ne lui accordant qu'un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 18NC03474


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC03474
Date de la décision : 02/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-07-02;18nc03474 ?
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