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18/06/2019 | FRANCE | N°18NC02952

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 juin 2019, 18NC02952


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 18 avril 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1801091 du 5 juin 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 novembre

2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 18 avril 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1801091 du 5 juin 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 novembre 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juin 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 18 avril 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois suivant notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que les entiers dépens de l'instance dont 13 euros de droit de plaidoirie.

Il soutient que :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu, du principe général du droit de l'Union européenne du droit de la défense et de la bonne administration ;

- elle porte atteinte au droit à une vie privée et familiale normale ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que sa décision comporte pour sa situation personnelle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle fixe la Russie comme pays de renvoi ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Wallerich, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., né le 16 septembre 1999, de nationalité inconnue, est entré irrégulièrement en France le 27 janvier 2015, alors mineur, accompagné de sa mère et de son frère. A la suite d'un contrôle par les services de la police aux frontières de Mont-Saint-Martin le 18 avril 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle, par une décision du même jour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. M. B...relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité administrative s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement du procès-verbal d'audition de M. B...par les services de police le 18 avril 2018, que l'intéressé a été entendu sur les conditions et la durée de son séjour en France, qu'il a été informé de la possibilité de présenter ses observations dans le cas où le préfet de Meurthe-et-Moselle envisagerait de prendre une mesure d'éloignement à son encontre. A cette occasion, il a indiqué qu'il ne voulait pas quitter la France, qu'il voulait terminer ses études et qu'il ne voulait pas laisser son frère, malade, seul avec sa mère. M. B...a donc été mis en mesure de faire valoir ses observations sur un éventuel retour dans son pays d'origine. Par suite, le droit d'être entendu n'a pas été méconnu préalablement à l'édiction de la mesure portant obligation de quitter le territoire français.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. B...fait valoir qu'il vit avec sa mère et son frère aîné, atteint de sclérose en plaques, qu'il est scolarisé en classe de 1ère et qu'il a un comportement exemplaire alors qu'il accomplit les démarches pour l'ensemble de la famille. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré en France à l'âge de quinze ans avec sa mère qui est également en situation irrégulière et a fait l'objet d'une décision de refus de séjour et d'éloignement le 20 décembre 2017. Il est célibataire et sans enfant et n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale ou privée dans son pays d'origine et si son frère aîné réside en France sous couvert d'un titre de séjour pour raisons de santé, il n'apporte aucun élément sur la nécessité pour ce dernier de bénéficier à ce titre d'une assistance particulière. Il n'allègue pas davantage se trouver dans l'impossibilité de poursuivre sa scolarité dans son pays d'origine alors au demeurant, que selon ses relevés de notes trimestriels, ses résultats scolaires sont insuffisants par manque de travail et d'attention et en raison de très nombreuses absences. Dans ces conditions, la décision lui refusant un titre de séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la décision attaquée, par laquelle le préfet a fait obligation à M. B...de quitter le territoire français, serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

6. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ;/ 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible (...) ".

7. En premier lieu, la décision contestée mentionne que M. B... s'est dit de nationalité russe, a présenté la copie d'un acte de naissance russe et a précisé, dans le dispositif, que l'intéressé pourra être renvoyé à destination de tout pays dans lequel il est légalement admissible, à savoir la Russie, l'Arménie ou l'Azerbaïdjan. Par suite, le préfet a fixé de manière suffisamment précise le pays à destination duquel M. B... pourra être renvoyé. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir qu'il n'a pas la nationalité russe alors que sa mère est née en Azerbaïdjan, il n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'erreur qu'aurait commise le préfet en fixant, notamment, la Russie comme pays de destination, alors qu'il ne conteste pas avoir présenté aux services préfectoraux la copie d'un acte de naissance russe.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnées au point 4 la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. En dernier lieu, le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir que sa vie ou sa liberté sont menacées en Russie ou qu'il y serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Kolbert, président de chambre,

- M. Wallerich, président assesseur,

- M. Michel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2019.

Le rapporteur,

Signé : M. WallerichLe président,

Signé : E. Kolbert

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 18NC02952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC02952
Date de la décision : 18/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-06-18;18nc02952 ?
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