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23/04/2019 | FRANCE | N°17NC01176

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 17NC01176


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 9 avril 2013 par laquelle le directeur départemental des territoires de la Moselle a ramené le montant de son indemnité de départ volontaire à la somme de 2 395,64 euros et de condamner l'État à lui verser la somme de 6 230,41 euros correspondant au solde de cette indemnité.

Par un jugement n° 1400370 du 22 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

:

Par une requête enregistrée le 22 mai 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 9 avril 2013 par laquelle le directeur départemental des territoires de la Moselle a ramené le montant de son indemnité de départ volontaire à la somme de 2 395,64 euros et de condamner l'État à lui verser la somme de 6 230,41 euros correspondant au solde de cette indemnité.

Par un jugement n° 1400370 du 22 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mai 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 21 mars 2019, M. B... A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 mars 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 9 avril 2013 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 230,41 euros correspondant au solde de son indemnité de départ volontaire ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat, ainsi qu'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le mémoire en défense a été présenté le 28 février 2019 après la clôture de l'instruction et est donc irrecevable ;

- la décision contestée ramène le montant de l'indemnité de départ volontaire de la somme de 8 626,06 euros à celle de 2 395,64 euros sans qu'il ait été mis à même de présenter ses observations préalables ;

- cette décision n'indique pas les voies et délais de recours ;

- l'administration ne pouvait plus modifier le montant de son indemnité de départ volontaire dès lors que sa démission avait été acceptée ;

- la décision contestée est créatrice de droit et son retrait est subordonné à celui de la décision acceptant sa démission ;

- l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en réduisant le montant de l'indemnité de départ volontaire sans remettre en cause l'acceptation de sa démission ;

- son préjudice s'établit à la somme de 6 230,41 euros dès lors qu'il s'est déterminé à présenter sa démission après avoir été informé du montant de son indemnité de départ volontaire initialement fixée à 8 626,06 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 février 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête au motif que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- le décret n° 2008-368 du 17 avril 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ouvrier des parcs et ateliers à la direction départementale des territoires de la Moselle, a été placé en disponibilité le 1er avril 2012 pour une durée d'un an. Par un courrier du 18 février 2013, il a fait part à son administration de son intention de ne pas réintégrer le service et a sollicité le bénéfice de l'indemnité de départ volontaire. Par un courrier du 22 février 2013, le directeur départemental des territoires de la Moselle lui a indiqué que le montant de cette indemnité s'établirait à 8 626,06 euros. M. A...a présenté sa démission de la fonction publique par un courrier du 4 mars 2013. Le préfet de la Moselle a accepté cette démission par une décision du 11 mars 2013, prenant effet le 1er avril suivant. Par un courrier du 9 avril 2013, le directeur départemental des territoires a informé M. A...que l'indemnité de départ volontaire annoncée dans son courrier précédent avait été calculée sur des bases erronées et en a ramené le montant à la somme de 2 395,64 euros. L'intéressé a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'un recours contre cette décision en sollicitant le versement de la somme de 6 230,41 euros, correspondant à la différence entre le montant initialement annoncé et celui finalement perçu. Il relève appel du jugement du 22 mars 2017 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la recevabilité du mémoire en défense :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ". Aux termes de l'article R. 613-3 de ce code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction ". Aux termes de l'article R. 613-4 du même code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. / Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il décide de soumettre au contradictoire une production de l'une des parties après la clôture de l'instruction, le président de la formation de jugement doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction.

4. Si, par une ordonnance du 14 novembre 2017, le président de la formation de jugement a clos l'instruction à la date du 13 décembre suivant, il a communiqué le mémoire en défense présenté le 28 février 2019 à M. A... et doit ainsi être regardé comme ayant rouvert l'instruction. La fin de non recevoir opposée par M. A...à ce mémoire en défense ne peut donc qu'être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, le 22 février 2013, l'administration a indiqué à M. A... un montant d'indemnité de départ volontaire de 8 626,06 euros en retenant pour base de calcul la rémunération perçue par l'intéressé au cours de l'année 2011. Elle a rectifié le montant de cette indemnité, le 9 avril 2013, après avoir été informée par le comptable, lors des opérations de liquidation, que l'indemnité devait être calculée sur la base de la rémunération perçue au cours de l'année 2012. Par son courrier du 9 avril 2013, l'administration s'est donc bornée à corriger une erreur matérielle survenue dans le calcul de l'indemnité de départ volontaire de M. A..., sans remettre en cause le droit de celui-ci à bénéficier de cette indemnité. Par suite, elle n'était pas tenue de l'inviter à présenter des observations préalables avant de lui notifier, après correction, le montant de l'indemnité auquel il pouvait légalement prétendre.

6. En deuxième lieu, les conditions dans lesquelles est notifiée une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité. Le moyen tiré de ce que le courrier du 9 avril 2013 ne comporte pas les voies et délais de recours doit, par suite, être écarté comme inopérant.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 17 avril 2008 instituant une indemnité de départ volontaire : " Une indemnité de départ volontaire peut être attribuée aux fonctionnaires qui quittent définitivement la fonction publique de l'Etat à la suite d'une démission régulièrement acceptée en application du 2° de l'article 24 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée (...) ". Aux termes de l'article 58 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions : " L'acceptation de la démission la rend irrévocable (...) ".

8. Il ne résulte pas des dispositions précitées du décret du 17 avril 2008, ni d'aucune autre disposition, que l'administration ne pourrait accepter la démission du fonctionnaire qu'après s'être prononcée sur sa demande d'indemnité de départ volontaire et en avoir fixé le montant. A cet égard, si M. A...entend se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er du décret du 17 avril 2008 selon lesquelles " l'agent qui souhaite bénéficier de l'indemnité de départ volontaire ne peut demander sa démission qu'à compter de la réception de la réponse de l'administration à la demande préalable de bénéfice de l'indemnité de départ volontaire ", ces dispositions introduites par le décret n° 2014-507 du 19 mai 2014 relatif aux dispositifs indemnitaires d'accompagnement dans la fonction publique ne sont pas applicables au litige.

9. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. A...a informé oralement le service, au début du mois de février 2013, de son intention de démissionner de la fonction publique afin de continuer l'activité professionnelle qu'il a engagée, en position de disponibilité, dans le secteur agricole. Par un courrier du 18 février 2013, il a confirmé son souhait de ne pas reprendre son ancien poste d'ouvrier en sollicitant le bénéfice de l'indemnité de départ volontaire, sans réserver son choix en fonction du montant de cette indemnité. Il a présenté sa demande de démission le 4 mars 2013 sans subordonner l'acceptation de cette demande au versement d'un montant déterminé au titre de l'indemnité de départ volontaire. Il n'est donc pas établi, ni même allégué au demeurant, que la démission de M. A... serait entachée d'un vice de consentement.

10. Il résulte de ce qui précède que l'administration pouvait corriger le montant de l'indemnité de départ volontaire versée à M. A...alors même que sa démission avait été acceptée et sans devoir préalablement retirer la décision acceptant cette démission, laquelle était devenue irrévocable.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article 6 du décret du 17 avril 2008, dans sa version applicable au litige : " Le montant de l'indemnité de départ volontaire ne peut excéder une somme équivalente à vingt-quatre fois un douzième de la rémunération brute annuelle perçue par l'agent au cours de l'année civile précédant celle du dépôt de sa demande de démission. Le montant de l'indemnité peut être modulé à raison de l'ancienneté de l'agent dans l'administration ".

12. Il résulte des dispositions précitées que l'indemnité de départ volontaire est calculée sur la base de la rémunération versée par l'Etat à l'agent au cours de l'année civile précédant celle du dépôt de sa demande de démission. Il est constant que M.A..., placé en disponibilité à compter du 1er avril 2012, n'a perçu une rémunération en sa qualité de fonctionnaire que de janvier à mars 2012, année précédant celle du dépôt de sa demande de démission. Si l'administration a, dans un premier temps le 22 février 2013, pris en compte la rémunération perçue par M. A...au cours de l'année 2011 et, sur cette base, fixé son indemnité de départ volontaire au montant de 8 626,06 euros, elle a corrigé son erreur moins de deux mois plus tard, le 9 avril 2013, en tenant compte de la seule rémunération versée au cours de l'année 2012 et ramené le montant de l'indemnité à 2 395,64 euros. Ce dernier montant correspond à l'indemnité à laquelle M. A...pouvait légalement prétendre. Par suite, l'administration, qui n'a pas illégalement retiré la décision accordant le bénéfice de l'indemnité de départ volontaire à M.A..., pouvait fixer le montant de cette indemnité à la somme de 2 395,64 euros après avoir constaté le caractère erroné du montant initialement notifié à l'intéressé.

Sur les conclusions à fin de condamnation :

13. Il résulte de ce qui précède que l'administration a délivré à M. A...une information incorrecte sur le montant de l'indemnité de départ volontaire à laquelle il pouvait prétendre et l'a ainsi induit en erreur. Elle a donc commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

14. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment du courrier du 18 février 2013 dans lequel M. A...a fait part de son intention de démissionner de la fonction publique afin de continuer son exploitation agricole, qu'il n'a pas entendu subordonner son choix au versement d'un montant déterminé d'indemnité de départ volontaire. Il se borne en outre à solliciter la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 6 230,41 euros, correspondant à la différence entre le montant initialement annoncé et le montant finalement retenu, sans établir ni la réalité ni l'étendue du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'erreur de calcul imputable à l'administration. A cet égard, s'il soutient avoir contracté des engagements financiers en fonction des informations qui lui avaient été délivrées le 22 février 2013, il n'en justifie pas. Dans ces conditions, sa demande tendant à la condamnation de l'Etat ne peut qu'être rejetée.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent donc qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de la transition écologique et solidaire.

2

N° 17NC01176


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01176
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Démission.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : CYTRYNBLUM

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-04-23;17nc01176 ?
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