La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2019 | FRANCE | N°17NC02027-17NC02035-17NC02044

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 11 avril 2019, 17NC02027-17NC02035-17NC02044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes.

La SCI Sinly a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 20

10 et 2011.

La SARL Financière Sinly a demandé au tribunal administratif de Strasbourg ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes.

La SCI Sinly a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2010 et 2011.

La SARL Financière Sinly a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 2010.

Par des jugements n° 1502478,1602810, n°1502480,1602910 et n° 1502479 du 27 juin 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 8 août 2017, sous le n°17NC02027 et des mémoires complémentaires, enregistrés respectivement le 19 novembre 2018 et le 1er février 2019 (non communiqué), M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que les rectifications découlent de la vérification de comptabilité de la SCI Sinly et que la procédure d'imposition de cette dernière est elle-même irrégulière ; c'est à tort que cette dernière a été imposée à l'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office ;

- les rectifications relatives à la valorisation de l'apport de titres de la SARL Le Mandarin à la SARL Financière Sinly ne sont pas motivées conformément à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- les rappels d'impositions sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts au titre de l'avantage occulte lié à la cession de l'immeuble et l'apport des titres ne sont pas fondés ; l'administration n'a pas, dans la valorisation effectuée, retenu comme termes de comparaison des biens similaires ;

- les rappels d'impositions sur le fondement de l'article 109-1 2° du code général des impôts relatifs à l'inscription au compte courant d'associé M. A...dans la SARL Financière Sinly de la somme de 1 445 000 euros ne sont pas fondés, dès lors que cette erreur procède d'une erreur comptable ;

- le détail du calcul des différentes pénalités n'est pas indiqué, en méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées dès lors qu'ils n'ont jamais entendu éluder l'impôt.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2018 et un mémoire complémentaire du 24 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. ou Mme A...ne sont pas fondés.

II.) Par une requête, enregistrée le 9 août 2017, sous le n°17NC02035, et des mémoires complémentaires enregistrés respectivement le 7 novembre 2018 et le 1er février 2010 (non communiqué), la société civile immobilière (SCI) Sinly, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2017 ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière ; c'est à tort qu'elle a été imposée à l'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office ;

- l'acte anormal de gestion lié à la survalorisation du prix d'achat de l'immeuble n'est pas établi ; l'administration n'a pas, dans la valorisation effectuée, retenu comme termes de comparaison des biens similaires ;

- l'abandon de créances accordé par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly concernant la créance de prix n'est pas établi ; la SCI Le Mandarin a en réalité accordé à la SCI Sinly un crédit vendeur, crédité par erreur au compte courant d'associé de M.A....

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2018, et un mémoire complémentaire du 24 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Sinly ne sont pas fondés.

III.) Par une requête, enregistrée le 10 août 2017, sous le n°17NC02044, et des mémoires complémentaires, enregistrés respectivement le 9 novembre 2018 et le 1er février 2010 (non communiqué), la société à responsabilité limitée (SARL) Financière Sinly, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2017 ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que les rectifications découlent de la vérification de comptabilité de la SCI Sinly et que la procédure d'imposition de cette dernière est elle-même irrégulière ; c'est à tort que cette dernière a été imposée à l'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office ;

- l'acte anormal de gestion lié à la survalorisation du prix d'achat des parts de la SARL Le Mandarin n'est pas établi ; l'administration n'a pas, dans la valorisation effectuée, retenu comme termes de comparaison des biens similaires ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2018, et un mémoire complémentaire du 24 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Financière Sinly ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bauer,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M. et MmeA..., la SCI Sinly et la SARL Financière Sinly.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n°17NC02027, 1702035 et 1702044 présentées respectivement par M. et MmeA..., la SCI Sinly et la SARL Financière Sinly, sociétés dont les époux A...sont les principaux associés, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. et Mme A...sont les principaux associés de plusieurs sociétés, dont la société à responsabilité limitée (SARL) Le Mandarin, la SARL Sinly, la société civile immobilière (SCI) Le Mandarin et la SCI Sinly, qui ont chacune pour objet d'assurer la gestion et l'exploitation d'un fonds de commerce de restauration chinois " Le Mandarin " sis 7, rue du Vieux Marché aux Poissons à Strasbourg. La SCI Sinly et la SARL Financière Sinly ont chacune fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er décembre 2009 au 31 décembre 2010. Au terme de ces opérations de contrôle, l'administration a estimé que la valeur d'apport des titres de la SARL Le Mandarin à la SARL Financière Sinly ainsi que la valeur vénale de l'immeuble cédé par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly avaient été surestimées et a constaté que la partie non payée du prix de cession de l'immeuble (1 445 000 euros), avait été portée au crédit du compte courant d'associé de M. A...dans la SARL Financière Sinly au 31 décembre 2010. En premier lieu, par proposition de rectification du 12 juin 2013, établie selon la procédure de taxation d'office, l'administration a notifié à la SCI Sinly des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010 relatives à un acte anormal de gestion du chef de la surévaluation du prix de cession de l'immeuble et à un abandon de créances pour un montant de 1 445 000 euros. En deuxième lieu, par proposition de rectification du même jour, établie selon la procédure de taxation d'office, l'administration a notifié à la SARL Financière Sinly des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés relatives à la survalorisation de la valeur d'acquisition des titres de la SARL le Mandarin et à la réintégration dans le résultat imposable de cette société au titre de l'année 2010 d'une partie de la moins-value consécutive à la cession ultérieure de ces titres à un tiers pour un prix nettement inférieur. En troisième lieu, par une proposition de rectification du même jour, établie selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration a notifié aux époux A...des rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2010, les majorations de prix précitées et la somme inscrite au crédit du compte courant d'associé ayant été considérées comme générant des revenus distribués, sur le fondement respectivement de l'article 111 c) et de l'article 109-1 2° du code général des impôts. Par les présentes requêtes, la SCI Sinly, la SARL Financière Sinly et les époux A...relèvent appel des jugements du 27 juin 2017 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de ces rappels.

Sur les conclusions à fin de décharge des rappels d'imposition de la SCI Sinly :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même code : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". Il appartient dés lors à la société requérante d'apporter la preuve du caractère exagéré de ces impositions.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. D'une part, l'article 8 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...)Il en est de même, sous les mêmes conditions : 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". L'article 34 du même code prévoit que : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale (...) ". Enfin, son article 206 dispose que : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA, 239 bis AB et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ".

5. D'autre part, il ressort de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable que : " Sont taxés d'office : (...) 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ; (...) ". L'article L. 68 du même livre dispose que : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) ". Enfin, aux termes de l'article 45 de l'annexe III au code général des impôts : " Les déclarations dûment signées sont remises ou adressées par les contribuables au service des impôts du lieu de leur résidence ou de leur principal établissement dans le délai prévu à l'article 175 du code général des impôts ".

6. Il résulte de l'instruction que la SCI Sinly, créée le 1er décembre 2009 et qui a commencé son activité commerciale au cours de l'exercice 2010, donnait en location en meublé divers appartements. Cette activité de nature commerciale la plaçait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées des articles 34 et 206 du code général des impôts et entraînait en conséquence son assujettissement à l'impôt sur les sociétés.

7. La SCI Sinly se prévaut cependant de l'application de la réponse ministérielle Berger n°33593 du 11 mai 1981, relative à l'imposition de certaines sociétés à l'impôt sur les sociétés, selon laquelle, d'une part, les sociétés civiles qui se livrent à des opérations présentant un caractère commercial ne sont pas soumises à l'impôt sur les sociétés tant que le montant hors taxe de leurs recettes de nature commerciale n'excèdent pas 10% du montant de leurs recettes totales hors taxe. D'autre part, cette doctrine admet, afin de limiter les conséquences du franchissement occasionnel de ce seuil de 10%, que la société civile ne soit pas effectivement soumise à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année de dépassement si la moyenne des recettes hors taxes, de nature commerciale, réalisées au cours de l'année en cause et des trois années antérieures n'excède pas 10% du montant moyen des recettes totales hors taxes réalisées au cours de la même période.

8. La SCI Sinly soutient qu'elle entre dans les prévisions de cette doctrine administrative en incluant les recettes de l'année 2009, qui sont inexistantes. Toutefois, la réponse ministérielle Berger précise que " bien entendu, s'agissant des sociétés créées depuis moins de quatre ans, cette moyenne sera appréciée sur la période courue depuis la date de leur création ". Ainsi qu'il vient d'être dit, la SCI n'a été créée que le 1er décembre 2009 et n'a commencé son activité qu'à la faveur de l'acquisition de son premier immeuble par acte du 1er juin 2010. Il résulte de l'instruction que pour l'exercice 2010, le seul pouvant être pris en compte au terme de la doctrine qui est d'interprétation stricte, la part des recettes tirées de l'activité commerciale s'est élevée à 12%. La SCI n'est donc pas fondée en l'espèce à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du bénéfice des énonciations de la doctrine précitées et c'est à bon droit que l'administration l'a assujettie à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010.

9. Il résulte de l'instruction que la SCI Sinly a fait l'objet d'une taxation d'office sur le fondement de ces dispositions pour défaut de déclaration. Si elle a transmis une déclaration de résultats à la suite de la mise en demeure adressée à cette fin par l'administration, ladite déclaration n'était pas signée. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office doit être écarté.

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :

10. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, que : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter,40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ". L'article 209 du même code dispose que : " I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45,53 A à 57,237 ter A et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) ".

11. En vertu de ces dispositions, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. S'agissant de la cession d'un élément d'actif immobilisé, lorsque l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, soutient que la cession a été réalisée à un prix significativement inférieur à la valeur vénale qu'elle a retenue et que le contribuable n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette évaluation, elle doit être regardée comme apportant la preuve du caractère anormal de l'acte de cession si le contribuable ne justifie pas que l'appauvrissement qui en est résulté a été décidé dans l'intérêt de l'entreprise, soit que celle-ci se soit trouvée dans la nécessité de procéder à la cession à un tel prix, soit qu'elle en ait tiré une contrepartie.

12. En premier lieu, dans le cadre de la vérification de la SCI Sinly, le prix de la vente par la SCI Le Mandarin des biens immobiliers, sis 7 rue du Vieux Marché aux Poissons, composés d'un local commercial et d'un local d'habitation, fixé à 1 500 000 euros, a été remis en cause par l'administration qui, selon sa propre méthode d'évaluation, a considéré que la valeur vénale de l'immeuble devait être fixée à 1 087 000 euros. La surévaluation du prix de l'immeuble à hauteur de 27,5%, a été considérée comme constitutive d'un acte anormal de gestion de la part de la SCI Sinly.

13. Lorsque l'administration fiscale procède, en vue d'imposer la plus-value constatée à l'occasion de la réintégration dans le patrimoine personnel du contribuable de la fraction d'un bien immobilier affectée antérieurement à son activité professionnelle, à l'évaluation de la valeur vénale de ce bien en se référant à des transactions qui ont porté sur des immeubles situés à proximité du lieu de situation de celui-ci, il lui appartient de retenir des termes de comparaison relatifs à des ventes qui ont porté sur des biens similaires, intervenues à une date peu éloignée dans le temps de celle du fait générateur de la plus-value. Toutefois, aucune règle du code général des impôts n'impose dans ce cas à l'administration de se fonder exclusivement sur des termes de comparaison portant sur des transactions antérieures à la date de ce fait générateur.

14. S'agissant de la valorisation du local d'habitation, l'administration a évalué la valeur vénale de l'appartement en duplex occupé par la famille A...d'une surface de 143 m² à la valeur de 470 047 euros, soit environ 3 290 euros le m², sur la base d'une comparaison avec trois autres cessions antérieures à la mutation en cause, portant sur des biens sis également dans le centre-ville de Strasbourg et possédant des caractéristiques similaires. Les contribuables ont par ailleurs également proposé des références sises dans la même rue que l'immeuble litigieux, et ont mandaté deux experts immobiliers près la cour d'appel de Colmar, Mme D...et M.B..., qui, dans leurs rapports du 28 novembre 2013 ont évalué le prix au m² pour le local d'habitation à respectivement 3 712 euros et 3 467 euros.

15. Il résulte toutefois de l'instruction que, s'agissant de l'expertise M.B..., celle-ci a écarté à tort un des termes de comparaison retenus par l'administration, en l'espèce l'immeuble sis 29, rue du Vieil Hôpital au motif qu'il s'agirait d'un immeuble sans caractère particulier construit dans les années 1950, alors qu'il n'est pas contesté que la vérification des informations cadastrales fait état d'une construction en 1780, soit à la même période que l'immeuble litigieux. Le rajout de ce terme de comparaison aux autres retenus par l'expert permet d'aboutir à un prix moyen au m² de 3 356 euros, proche de celui de l'administration. S'agissant de l'expertise de MmeF..., préconisant de retenir un prix au m² compris entre 4 000 et 5 000 euros, il est constant que son estimation la plus favorable de la valeur vénale du local d'habitation est fondée sur la comparaison de prix de cessions de biens certes similaires mais seulement proposés à la vente, et non de mutations effectives. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant la validité des termes de comparaison retenus et, par suite, de son estimation de la valeur vénale du local d'habitation à 3 290 euros le m², soit une valeur de 470 047 euros.

16. S'agissant de la valorisation du local commercial, l'administration a proposé une estimation à 616 308 euros sur la base de la surface commerciale de 138 m², obtenue par comparaison avec le prix au mètre carré de cinq transactions réalisées dans le même secteur et a abouti à un prix moyen de 2 669 euros, porté à 4 066 euros consécutivement au recours hiérarchique présenté par la société. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la circonstance que les cinq établissements en cause ne soient pas tous des restaurants mais pour certains des commerces de détail, est sans incidence sur la pertinence de sa comparaison, dès lors qu'il ne s'agissait pas de déterminer la valeur du fonds de commerce mais la valeur vénale des locaux commerciaux, lesquels ont vocation à accueillir tout type d'activité commerciale. Il y avait donc lieu, comme l'a fait le service, de se fonder sur la surface commerciale et de tenir compte dans les termes de comparaison du type de local, de sa superficie et de son implantation et non, comme le suggèrent les expertises produites par la SCI, des équipements et aménagements du restaurant exploité dans le local commercial ou des caractéristiques de sa clientèle. A cet égard, les établissements retenus par l'administration se situent tous au centre-ville de Strasbourg à proximité du restaurant du Mandarin, bénéficiant ainsi de la même accessibilité et situation privilégiée. Par suite, la société requérante n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération de l'évaluation réalisée par l'administration en vue de fixer la valeur vénale de l'immeuble en cause.

17. En second lieu, l'article 1690 du code civil prévoit que : " Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur. Néanmoins, le cessionnaire peut être également saisi par l'acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique ".

18. Il résulte de l'instruction que le prix de cession de la vente par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly de l'immeuble sis 7 rue du vieux marché aux poissons à Strasbourg, d'un montant de 1 500 000 euros, n'a été payé qu'à hauteur de 55 000 euros. Le solde, soit 1 445 000 euros, a été porté par écriture du 31 décembre 2010 au crédit du compte courant d'associé de M.A..., ouvert dans les comptes de la SCI Sinly, puis transféré par une seconde écriture du même jour, au compte courant d'associé de l'intéressé dans la SARL Financière Sinly. Si dans le cadre de leur réclamation auprès de l'administration, les contribuables ont initialement fait valoir que l'inscription des montants en cause au compte courant de M. A...au sein de la SARL Financière Sinly était la conséquence de l'application de la convention de centralisation des comptes courants conclue entre la SARL Financière Sinly et la SCI Sinly, aboutissant à un transfert de créances, le caractère authentique de ladite convention, produite postérieurement aux opérations de vérification, n'a pu être établi. Ainsi, faute notamment d'avoir satisfait au respect des formalités prévues à l'article 1690 du code civil, la SCI Sinly ne justifie pas de la réalité d'un transfert de créances entre la SCI Sinly et M. A...s'agissant de l'acquisition auprès de la SCI Le Mandarin de l'immeuble litigieux. L'erreur comptable involontaire ne peut pas par ailleurs être sérieusement retenue dans les circonstances de l'affaire. C'est donc à bon droit que l'administration a estimé que cette somme avait fait l'objet d'un abandon de créances et l'a ainsi réintégrée dans le résultat imposable de la SCI Sinly en application des dispositions précitées de l'article 38 du code général des impôts.

19. Il résulte de ce qui précède que la SCI Sinly n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge relative aux rappels d'imposition afférents à la survalorisation de l'immeuble et à l'abandon de créances.

Sur les conclusions à fin de décharge des rappels d'imposition de la SARL Financière Sinly :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

20. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même code : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". Il appartient dés lors à la société requérante d'apporter la preuve du caractère exagéré de ces impositions.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

21. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition de la SARL Financière Sinly en raison de l'irrégularité de la procédure d'imposition concernant la SCI Sinly, contribuable distinct, doit, en raison de l'indépendance des procédures d'imposition, être écarté. En tout état de cause, il résulte de ce qui a été développé aux points 3 à 8 que c'est à bon droit que la SCI Sinly a été imposée par l'administration à l'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office.

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :

22. La valeur vénale des actions non admises à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession ou l'apport est intervenu. Cette valeur doit être établie, en priorité, par référence à la valeur qui ressort de transactions portant, à la même époque, sur des titres de la société, dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance. Toutefois, en l'absence de transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires, l'administration peut légalement se fonder sur l'une des méthodes destinées à déterminer la valeur de l'actif ou sur la combinaison de plusieurs de ces méthodes.

23. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la valeur d'apport des parts a été définie par les contribuables à 780 000 euros, sur la base de capitaux propres d'une valeur de 154 409 euros ajoutés à une valorisation du fonds de restauration à 624 670 euros. L'administration a pour sa part procédé à une évaluation des parts en combinant deux méthodes, d'une part, celle de la valeur mathématique, soit la valeur comptable de l'entreprise, actualisée par la valorisation du fonds de commerce estimée, par comparaison au prix du fonds de commerce d'autres restaurants, à 71% du chiffre d'affaires toutes taxes comprises moyen pondéré des trois dernières années d'exploitation, et d'autre part celle de la valeur de productivité, obtenue par capitalisation du résultat, et a abouti ainsi à une valeur moyenne de 590 000 euros. La surévaluation, s'élevant à 190 000 euros, a été considérée par le service comme constitutive d'un acte anormal de gestion, la SARL Financière Sinly ayant acquis les parts à un prix délibérément majoré sans en retirer de contrepartie.

24. La SARL Financière Sinly soutient, en se prévalant d'une expertise réalisée à sa demande par un expert agréé pour la valorisation des fonds de commerce, que, si les établissements de restauration retenus comme termes de comparaison par l'administration sont également situés dans un secteur à forte fréquentation, leurs caractéristiques ne sont cependant pas similaires, notamment en termes d'aménagements, de fréquentation et de gamme. Toutefois, la seule circonstance que les caractéristiques de certains des restaurants retenus comme termes de comparaison différaient de celles du restaurant le Mandarin, n'est pas de nature à ôter toute pertinence à l'évaluation de l'administration, fondée sur le critère du chiffre d'affaires, dès lors que les trois restaurants en cause sont également situés au centre-ville de Strasbourg, que deux d'entre eux sont à proximité immédiate du Mandarin et que leurs chiffres d'affaires sont comparables à ce dernier. Il s'ensuit que la SARL Financière Sinly n'apporte pas la preuve qui lui incombe que l'évaluation du fonds de commerce de la société Le Mandarin à la somme de 590 000 euros réalisée par l'administration serait exagérée, nonobstant l'avis favorable émis par le commissaire aux apports à la valorisation des parts telle qu'initialement fixée par la SARL Le Mandarin. Il résulte d'ailleurs de l'instruction que les titres en cause ont fait l'objet d'une cession ultérieure à une société tierce, la Holding Grison, à un prix proche de l'évaluation de l'administration, sans que la SARL Financière Sinly puisse à cet égard sérieusement soutenir qu'elle a été contrainte dans l'urgence d'accepter une offre sous-évaluée en raison de l'impossibilité de trouver des salariés en cuisine, circonstance qui aurait contraint M. A...à travailler seul et aurait eu des répercussions sur son état de santé. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que l'acquisition des parts de la SARL Le Mandarin, réalisée à un prix majoré, était constitutive d'un acte anormal de gestion. Elle en a légalement tiré les conséquences en réintégrant dans le résultat imposable de la SARL Financière Sinly au titre de l'année 2010 la moins-value liée à la cession desdites parts à la Holding Grison résultant de la seule différence entre le prix de cession convenu avec cette société et la valeur réelle des titres apportés, fixée à 590 000 euros et non à 780 000 euros.

25. Il résulte de ce qui précède que la SARL Financière Sinly n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des rappels d'impôt sur les sociétés en cause.

Sur les conclusions à fin de décharge des rappels d'imposition de M. ou MmeA... :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

26. En premier lieu, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de M. et Mme A...en raison de l'irrégularité de la procédure d'imposition concernant la SCI Sinly, société de personnes soumise à l'impôt sur les sociétés, doit, en raison de l'indépendance des procédures d'imposition, être écarté. En tout état de cause, il résulte de ce qui a été développé aux points 3 à 8 que c'est à bon droit que la SCI Sinly a été imposée par l'administration à l'impôt sur les sociétés et selon la procédure de taxation d'office.

27. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du même livre : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque, pour rectifier le prix ou l'évaluation d'un fonds de commerce ou d'une clientèle, en application de l'article L. 17, l'administration se fonde sur la comparaison avec la cession d'autres biens, l'obligation de motivation en fait est remplie par l'indication : 1° Des dates des mutations considérées ; 2° De l'adresse des fonds ou lieux d'exercice des professions ; 3° De la nature des activités exercées ; 4° Et des prix de cession, chiffres d'affaires ou bénéfices, si ces informations sont soumises à une obligation de publicité ou, dans le cas contraire, des moyennes de ces données chiffrées concernant les entreprises pour lesquelles sont fournis les éléments mentionnés aux 1°, 2° et 3° (...) ".

28. Si les contribuables soutiennent que les rectifications relatives à la valorisation de l'apport des parts de la SARL Le Mandarin à la SARL Financière Sinly sont insuffisamment motivées s'agissant des indications relatives à l'évaluation du fonds de commerce en cause, il résulte au contraire de l'instruction que la proposition de rectification notifiée aux époux A...comporte la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énonce les motifs sur lesquels l'administration s'est fondée pour justifier les rehaussements envisagés. Elle comporte par ailleurs les dénominations, activités, coordonnées et moyennes des chiffres d'affaires des établissements retenus comme termes de comparaison. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit par suite être écarté.

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :

S'agissant des rappels d'imposition sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts :

29. L'article 111 du code général des impôts dispose que : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession.

30. L'administration a considéré comme des avantages occultes au sens du c de l'article 111 précité du code général des impôts la surévaluation des titres de la SARL Le Mandarin apportés à la SARL Financière Sinly et de l'immeuble cédé par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly, pour des montants respectifs de 190 000 euros et 413 000 euros, ayant profité aux associés desdites sociétés, notamment à M.A....

31. Ainsi qu'il a été développé aux points 12 à 16, l'administration doit être regardée comme ayant établi en l'espèce l'existence d'un écart significatif, supérieur à 25%, entre le prix de cession de l'immeuble cédé et sa valeur vénale, et, par ailleurs, entre la valeur des titres apportés et leur valeur vénale. En outre eu égard à la circonstance que les époux A...détiennent 80 % de la SCI Le Mandarin et que la SARL Financière Sinly, qui est elle-même détenue en totalité par les époux A...et leurs enfants, détient 98,8 % des parts de la SCI Sinly, ces écarts doivent être regardés comme des libéralités volontairement consenties aux intéressés. Il s'ensuit que c'est à bon droit que le service a qualifié les majorations de prix en cause de distributions occultes de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts.

S'agissant des rappels d'imposition sur le fondement de l'article 109-1 2° du code général des impôts :

32. L'article 109 du code général des impôts dispose que : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2º du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.

33. Il résulte de l'instruction, comme il a été précédemment indiqué, que le prix de cession concernant la vente par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly de l'immeuble sis 7 rue du vieux marché aux poissons à Strasbourg, d'un montant de 1 500 000 euros, n'a été payé qu'à hauteur de 55 000 euros. Le solde soit 1 445 000 euros, a été porté par écriture du 31 décembre 2010 au crédit du compte courant d'associé de M.A..., ouvert dans les comptes de la SCI Sinly, puis transféré par une seconde écriture du même jour, au compte courant d'associé de l'intéressé dans la SARL Financière Sinly. En conséquence, M. A...est devenu créancier de cette société, sans avoir réalisé les apports correspondants, et c'est à bon droit que la somme de 1 445 000 euros a été imposée au titre de l'année 2010 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement de l'article 109-1-2° du code général des impôts.

34. Si, ainsi qu'il a été précédemment développé, dans le cadre de leur réclamation auprès de l'administration, les contribuables ont initialement fait valoir que l'inscription des montants en cause au compte courant de M. A...au sein de la SARL Financière Sinly était la conséquence de l'application de la convention de centralisation des comptes courants conclue entre la SARL Financière Sinly et la SCI Sinly, aboutissant à un transfert de créances, le caractère authentique de ladite convention, produite postérieurement aux opérations de vérification, n'a pu être établi. A supposer même établie l'erreur comptable involontaire dont se prévalent désormais les épouxA..., cette circonstance ne saurait faire obstacle à leur qualification de revenus distribués, dès lors que les intéressés n'établissent pas ne pas avoir eu la disposition des sommes en cause. Par suite, l'administration les a imposées à bon droit sur le fondement précité de l'article 109-1 2° du code général des impôts.

En ce qui concerne les pénalités :

35. En premier lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications (...) ".

36. Il résulte de ces dispositions que, d'une part, elles ne sont pas applicables, comme en l'espèce, à un contrôle sur pièces, d'autre part qu'elles ne prévoient en tout état de cause pas l'indication des modalités de déterminations du montant des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications, contrairement à ce que soutiennent les contribuables. Le moyen tiré de leur méconnaissance doit dès lors être écarté.

37. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". L'article L. 195 A du livre des procédures fiscales dispose par ailleurs que : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

38. Il résulte de ce qui précède que les époux A...ne sauraient soutenir que les majorations de prix liées à la surestimation de la valeur de l'immeuble cédé et de la valeur d'apport des parts de la SARL Le Mandarin, à hauteur de plus de 25%, ainsi que l'inscription sans contrepartie au compte courant d'associé de M. A... dans la SARL Financière Sinly de la somme de 1 445 000 euros correspondant à la quasi-totalité du prix de cession de l'immeuble par la SCI Le Mandarin à la SCI Sinly, ne procèdent pas en l'espèce d'une intention délibérée d'éluder l'impôt compte tenu tant du caractère significatif des montants en cause, que des liens existant entre les contribuables et les sociétés en cause, toutes détenues presqu'en totalité par M. et MmeA.... C'est donc à bon droit que les rappels en cause ont été assortis de la pénalité susvisée.

39. Il résulte de ce qui précède que les époux A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande de décharge relative aux rappels d'impôt en cause.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

40. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie principalement perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées par M. et MmeA..., la SCI Sinly et la SARL Financière Sinly sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. et Mme E...A..., à la SCI Sinly, à la SARL Financière Sinly et au ministre de l'action et des comptes publics.

13

N° 17NC02027,17NC02035,17NC02044


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Montant global du revenu brut.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE SCHILTIGHEIM

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 11/04/2019
Date de l'import : 23/04/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17NC02027-17NC02035-17NC02044
Numéro NOR : CETATEXT000038396157 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-04-11;17nc02027.17nc02035.17nc02044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award