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07/02/2019 | FRANCE | N°18NC01462

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 07 février 2019, 18NC01462


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D...et son épouse, Mme G...D..., néeA..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le maire de la commune de Griesheim-sur-Souffel a délivré un permis de construire à la SARL Menuiserie Monschin, ainsi que la décision par laquelle il a rejeté leur recours gracieux formé contre ce permis de construire.

Par un jugement no 1504561 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2018, M. et MmeD..., représentés par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D...et son épouse, Mme G...D..., néeA..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le maire de la commune de Griesheim-sur-Souffel a délivré un permis de construire à la SARL Menuiserie Monschin, ainsi que la décision par laquelle il a rejeté leur recours gracieux formé contre ce permis de construire.

Par un jugement no 1504561 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2018, M. et MmeD..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1504561 du 15 mars 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler le permis de construire délivré le 10 avril 2015 par le maire de la commune de Griesheim-sur-Souffel à la société Menuiserie Monschin ;

3°) de condamner la commune de Griesheim-sur-Souffel à leur verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme D...soutiennent que :

- le permis de construire est entaché de fraude dès lors que la demande comportait des informations délibérément erronées dans le but de tromper l'autorité administrative, en particulier s'agissant des nuisances du projet pour le voisinage ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article UA 1.2 du règlement du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, compte tenu des nuisances sonores occasionnées par l'extension de la menuiserie et l'installation de nouvelles machines ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article 6 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors que la construction existante ne respecte pas les dispositions de l'article UA 1.1 et que les travaux envisagés n'auront pas pour effet de remédier à la méconnaissance de ces dispositions et d'améliorer l'ouvrage existant mais au contraire d'en aggraver les nuisances ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article UA 2.3 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors que le projet n'est ni compatible avec la proximité des habitations voisines ni utile aux besoins quotidiens des habitants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2018, la SARL Menuiserie Monschin, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. et Mme D...à lui verser une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Menuiserie Monschin soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2018, la commune de Griesheim-sur-Souffel, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. et Mme D...à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Griesheim-sur-Souffel soutient que la requête est irrecevable faute pour les requérants de justifier de sa notification régulière, conformément à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, et qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 30 septembre 2018, M. et Mme D... concluent aux mêmes fins et par les mêmes moyens que précédemment.

Ils soutiennent, en outre, que la commune n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, dès lors qu'ils ont fait une offre de médiation qui, en application de l'article L. 213-6 du code de justice administrative, a interrompu le délai de recours contentieux pendant six mois.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., pour la commune de Griesheim-sur-Souffel et la SARL Menuiserie Monschin.

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 février 2015, la SARL Menuiserie Monschin a sollicité la délivrance d'un permis de construire en vue de réaliser une extension de son bâtiment à usage de menuiserie situé rue du Maréchal-Leclerc à Griesheim-sur-Souffel. Par un arrêté du 10 avril 2015, le maire de la commune de Griesheim-sur-Souffel a délivré ce permis de construire.

2. M. et MmeD..., voisins directs du projet, relèvent appel du jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la recevabilité de l'appel :

3. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de (...) recours contentieux à l'encontre d'un (...) permis de construire, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation (...) d'une décision juridictionnelle concernant un (...) permis de construire (...) ". Aux termes de l'article R. 424-15 de ce code : " Mention du permis explicite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable ". Il résulte de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée qu'à la condition que le permis de construire ait été affiché sur le terrain conformément à l'article R. 424-15 du même code.

4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du constat d'huissier du 23 juillet 2015 produit par les requérants, que la partie inférieure du panneau d'affichage du permis de construire litigieux apposé sur le terrain était masquée par un portail qui, tant en position ouverte qu'en position fermée, empêchait de lire, depuis la voie publique, les mentions y figurant. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas soutenu, que les mentions relatives à l'obligation de notification des recours, habituellement situées au bas des panneaux d'affichage de ce type, figuraient, au cas d'espèce, dans la partie supérieure non masquée du panneau. Dès lors, la fin de non-recevoir de la commune, tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, ne peut qu'être écartée.

Sur la légalité du permis de construire contesté :

5. En premier lieu, la circonstance que la demande de permis de construire comporte des indications erronées quant au voisinage du projet ne suffit pas, en elle-même, à établir que ces informations ont été fournies dans le but de tromper l'autorité compétente. En l'absence de tout autres élément apporté par les requérants, la fraude alléguée n'est pas établie.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

7. Il ressort de l'étude acoustique annexée au permis de construire et des pièces du dossier de permis de construire que l'extension projetée de la menuiserie n'est pas de nature à accroître les nuisances sonores pour le voisinage et que des mesures ont été envisagées pour limiter les inconvénients de l'installation. Si les requérants mentionnent également, de manière sommaire, des nuisances olfactives, ils n'expliquent pas en quoi elles seraient de nature à porter atteinte à la salubrité ou la sécurité publiques. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de Griesheim-sur-Souffel : " Lorsqu'un immeuble bâti n'est pas conforme aux règles édictées par le règlement applicable à la zone, le projet ne peut être accordé que pour des travaux qui ont pour objet d'améliorer la conformité de ces immeubles avec lesdites règles ou qui sont sans effet à leur égard ". L'article UA 1 du même règlement relatif aux occupations et utilisations du sol interdites dispose : " 1.1 Les occupations et utilisations du sol de nature à entraîner des nuisances ou des risques incompatibles avec le voisinage des zones d'habitation ou une atteinte à la salubrité ou à la sécurité publiques ". Aux termes de l'article UA 2.3 de ce règlement, relatif aux occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières : " Les activités relevant du régime des installations classées pour la protection de l'environnement, à l'exception des installations classées agricoles, sont admises à condition d'être compatibles avec la proximité des habitations et d'être utiles aux besoins quotidiens des habitants ". En vertu toutefois de l'article UA 1.2 du même règlement, l'agrandissement des établissements existants est admis s'il n'en résulte pas une augmentation substantielle de nuisances pour le voisinage des habitations ou une atteinte à la salubrité ou à la sécurité publiques.

9. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que celles de l'article UA 1.2 régissent exclusivement les cas d'agrandissement d'un établissement existant, même si celui-ci n'est plus conforme à une ou plusieurs dispositions du plan local d'urbanisme, dès lors qu'il n'en résulte pas une augmentation substantielle de nuisances pour le voisinage des habitations.

10. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige consiste en un agrandissement de l'établissement existant. Par conséquent, seules les dispositions de l'article UA 1.2 sont applicables et les moyens tirés de la méconnaissance des autres dispositions précitées au point 8 ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.

11. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude acoustique annexée au permis de construire, que les nuisances sonores de la menuiserie proviennent, pour l'essentiel, de son système de ventilation, de sa machine à briquettes et d'une machine numérique permettant la découpe et le fraisage des pièces appelée " défonceuse ". Il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutiennent les requérants, que le projet comporte une augmentation de la puissance totale des machines utilisées par la menuiserie, ni l'installation de machines supplémentaires, mais seulement le remplacement de la défonceuse numérique par une nouvelle machine. L'étude acoustique et la demande de permis prévoit la mise en place sur une partie des façades, notamment la zone de protection de la centrale de ventilation, d'un bardage bois afin de réduire les nuisances sonores ainsi que plusieurs mesures d'isolation prévues par l'étude acoustique. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'agrandissement de l'établissement existant entraînera une augmentation substantielle des nuisances sonores pour le voisinage. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 1.2 sera écarté.

12. En conclusion de tout ce qui précède M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande. Dès lors, leurs conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Griesheim-sur-Souffel qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme D...demandent au titre des frais exposés par eux en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme D...une somme à verser à la commune de Griesheim-sur-Souffel ou à la SARL menuiserie Monschin au titre de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...et de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Griesheim-sur-Souffel et de la SARL Menuiserie Monschin tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...D..., Mme G...D..., néeA..., la commune de Griesheim-sur-Souffel et à la SARL Menuiserie Monschin.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 18NC01462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC01462
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SELARL SIMONNET-DARBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-02-07;18nc01462 ?
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