Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Espoir a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1407236 du 29 juin 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 août 2017, l'association Espoir, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que les sommes versées aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis au sein du centre d'adaptation à la vie active ne peuvent être incluses dans le champ de la taxe sur les salaires dès lors que ces derniers n'ont pas le statut de salarié, n'ont pas de lien de subordination avec le centre et que les sommes versées sont soumises à cotisations sociales sur le fondement de l'article L. 241-12 du code de la sécurité sociale, et non des articles L. 242-1 et L. 311-2 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'association Espoir ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lambing,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'association Espoir, qui gère notamment un centre d'adaptation à la vie active, a sollicité, par une réclamation du 19 juillet 2013, le dégrèvement des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012, incluant, à tort selon elle, les sommes versées aux bénéficiaires accueillis au sein dudit centre. Par une décision du 28 octobre 2014, l'administration fiscale a rejeté sa réclamation. L'association Espoir relève appel du jugement du 29 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur le bien fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la loi fiscale :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 231 du code général des impôts dans sa version applicable aux années d'imposition en litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...) ". Aux termes de l'article L. 242-1 au chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail (...) ". Aux termes de l'article L. 311-2 du même code : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général (...) toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ". Aux termes de l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles : " Les organismes assurant l'accueil et l'hébergement de personnes en difficultés et qui ne relèvent pas de l'article L. 312-1 peuvent faire participer ces personnes à des activités d'économie solidaire afin de favoriser leur insertion sociale et professionnelle. / Si elles se soumettent aux règles de vie communautaire qui définissent un cadre d'accueil comprenant la participation à un travail destiné à leur insertion sociale, elles ont un statut qui est exclusif de tout lien de subordination. / Les organismes visés au premier alinéa garantissent aux personnes accueillies : -un hébergement décent ; /-un soutien personnel et un accompagnement social adapté à leurs besoins ; /-un soutien financier leur assurant des conditions de vie dignes. (...) ".
3. D'une part, il résulte des travaux parlementaires de l'article 10 de la
loi n° 2000-352 du 30 décembre 2000 de finances pour 2001, dont sont issues les dispositions de l'article 231 du code général des impôts, qu'en alignant l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale, le législateur a entendu y inclure notamment les sommes visées aux articles L. 242-1 et L. 311-2 du code de la sécurité sociale. Par le renvoi aux dispositions du code de la sécurité sociale, le législateur a entendu, par la même occasion, les inclure dans le champ d'application de cette taxe. Les sommes versées en contrepartie d'un travail sont, dès lors, en dépit du fait que l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale n'est pas inclus dans le titre IV du livre II de ce code, auquel l'article 231 du code général des impôts renvoie pour la seule détermination du montant des rémunérations, soumises à la taxe sur les salaires en application dudit article, sans que puisse y faire obstacle la circonstance, alléguée par l'association Espoir, que ses bénéficiaires ne seraient pas placés dans un lien de subordination avec elle et n'auraient pas la qualité de salarié au sens du droit du travail. En outre, l'association Espoir ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 231 du code général des impôts dans leur version issue de la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012,visant les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés, cette rédaction n'étant pas applicable au litige.
4. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles que les personnes accueillies au sein d'un centre d'adaptation à la vie active participent à un travail destiné à leur insertion professionnelle. Leur statut, qui ne les place pas dans un lien de subordination envers ledit centre, inclut un hébergement, un accompagnement personnel et un soutien financier. Il résulte de l'instruction que les sommes versées par l'association Espoir à ses bénéficiaires l'ont été en contrepartie de leur travail, la rémunération étant dépendante du nombre d'heures effectuées et les périodes d'absence n'étant pas rémunérées. Il s'ensuit que lesdites sommes entrent dans le champ de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales. De plus, en application de l'article L. 311-2 du même code, les bénéficiaires travaillant pour le compte de l'association Espoir sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général sans que la nature de leur rémunération et de leur contrat fasse obstacle à cette affiliation obligatoire. Par ailleurs, si les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Assédic), par courrier du 10 juin 2012, ont indiqué à l'association requérante que, ses bénéficiaires n'étant pas titulaires d'un contrat de travail, ils ne pouvaient être affiliés au régime d'assurance chômage, ce courrier, qui ne se prononce pas sur l'affiliation obligatoire aux assurances sociales du régime général, ne peut être utilement invoqué par la requérante.
5. En second lieu, aux termes de l'article L. 241-12 du code de la sécurité sociale : " Les cotisations d'assurances sociales et d'allocations familiales dues au titre des activités exercées dans un but de réinsertion socioprofessionnelle par les personnes en difficulté sont calculées sur une assiette forfaitaire fixée par arrêté lorsque les rémunérations qui leur sont versées sont inférieures ou égales au montant de cette assiette. (...) Les dispositions du présent article sont applicables aux personnes accueillies dans les structures suivantes : (...) organismes visés à l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles qui en font la demande. ".
6. L'association Espoir soutient que les cotisations d'assurances sociales et d'allocations familiales relatives à ses bénéficiaires accueillis au sein de son centre d'adaptation à la vie active, ont été versées selon les conditions prévues à l'article L. 241-12 du code de la sécurité sociale. Elle ne relèverait donc pas, selon elle, des dispositions des articles L. 242-1 et L. 311-2 du même code. Toutefois, les dispositions de l'article L. 241-12 ne prévoient que des modalités particulières de calcul des cotisations sociales et n'organisent pas un régime dérogatoire d'affiliation qui serait distinct du régime prévu aux articles L. 242-1 et L. 311-2 du code de la sécurité sociale précités. Par suite, le moyen doit être écarté et par suite la taxe sur les salaires.
7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6 que l'association Espoir n'est pas fondée à soutenir que les sommes versées aux personnes accueillies au sein du centre d'adaptation à la vie active qu'elle gère ne sont pas soumises à cotisations sociales sur le fondement des dispositions des articles L. 242-1 et L. 311-2 du code de la sécurité sociale.
En ce qui concerne le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :
8. En premier lieu, l'association Espoir ne peut utilement se prévaloir de l'instruction BOI-TPS-TS-10-10 du 22 janvier 2014 qui est postérieure aux années en litige.
9. En deuxième lieu, il ne résulte pas des instructions DB 5 L-141 n° 2 du 1er juin 1995 et 5 L-5-02 n°3 du 12 septembre 2002, dont se prévaut l'association Espoir, une interprétation de la loi fiscale différente de celle exposée aux points 2 à 6 et dont l'association pourrait se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales.
10. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Espoir n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de l'association Espoir est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Espoir et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 17NC02137