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18/10/2018 | FRANCE | N°18NC00339-18NC00340

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2018, 18NC00339-18NC00340


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...et Mme A...C...née D...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 22 septembre 2017 par lesquels le préfet du Haut-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705070,1705071 du 11 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Pa

r une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 10 février 2018 et le 31 août 2018,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...et Mme A...C...née D...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 22 septembre 2017 par lesquels le préfet du Haut-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705070,1705071 du 11 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 10 février 2018 et le 31 août 2018, sous le n° 18NC00339, Mme A...C..., représentée par Me E...D...-F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 janvier 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 22 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée et sa motivation est partiellement erronée, dès lors que c'est à tort que le préfet a considéré que la durée de séjour autorisée de 90 jours avait été dépassée ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle ;

- la décision est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet s'est privé de la possibilité de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

- elle méconnaît l'article L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration et l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle n'a pas déposé de demande de titre de séjour et n'a pu présenter des observations ;

- elle méconnaît les exigences de forme prévues par l'article 12 § 1 de la directive européenne 2008/115/CE ; le préfet n'a en outre pas mentionné le fondement de la mesure d'éloignement ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa situation n'ayant pas été examinée sur ce fondement ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de ses liens en France ;

- elle méconnaît les articles 8 et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, dès lors que l'exécution de l'arrêté aurait pour effet de la séparer de ses enfants.

II.) Par une requête, enregistrée le 10 février 2018 sous le n° 18NC00340, M. C..., représenté par Me E...D...-F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 janvier 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 22 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

- Il soutient que :

- la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les exigences de forme prévues par l'article 12 § 1 de la directive européenne 2008/115/CE

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 3-1 de l'accord franco-tunisien et l'article 2.3.2 de l'accord cadre franco-tunisien du 28 avril 2008 ; l'absence de visa long séjour ne privait pas le préfet de la possibilité de le régulariser.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 mai 2018, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet des requêtes.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. et Mme C...n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;

- le protocole du 28 avril 2008 relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la république tunisienne pris en application de l'accord-cadre du même jour ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martinez.

1. Considérant que les requêtes de M. et Mme C...visées ci-dessus sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. et MmeC..., ressortissants tunisiens nés respectivement le 31 janvier 1982 et le 31 mai 1971, sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 26 mai 2017 sous couvert de visa Schengen de court séjour de type C " circulation à entrées multiples " valables du 24 février 2017 au 23 février 2018 pour le requérant et du 22 novembre 2016 au 21 novembre 2020 pour la requérante ; que M. C...a sollicité le 16 juin 2017 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de commerçant ; que par arrêtés du 22 septembre 2017, le préfet du Haut-Rhin a refusé aux époux C...la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que les requérants relèvent appel du jugement du 11 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les moyens propres à la requête de M.C... :

3. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord " ; que l'article 3 du l'accord précité dispose que : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié ". Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants tunisiens visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existenc. " ; que ces dispositions fixent les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens exerçant une activité de salarié un titre de séjour de dix ans de plein droit ; que, dès lors, M. C..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour non en qualité de salarié mais pour l'exercice d'une activité commerciale, en l'espèce la création d'une société d'import-export de poissons frais, n'est pas fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 3 précité ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1(...) " ; que sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention "passeport talent" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ;

5. Considérant qu'il est constant que M. C... n'était pas titulaire d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que, dès lors, le préfet a pu légalement lui refuser la délivrance de la carte de séjour temporaire prévue par les dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent " prévue par l'article L. 313-20 du même code, en se fondant sur ce seul motif tenant à l'absence de visa de long séjour, sans être tenu d'examiner la viabilité économique de son projet commercial ; qu'il en est de même, à supposer qu'une demande ait été formulée sur ce fondement, du titre de séjour " compétences et talents " prévu par l'article 2.3.2 du protocole du 28 avril 2008 relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la république tunisienne pris en application de l'accord-cadre du même jour ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. C... au motif qu'il n'était pas titulaire d'un visa de long séjour ;

En ce qui concerne les moyens propres à la requête de MmeC... :

6. Considérant, en premier lieu, que la requérante reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le tribunal administratif de Strasbourg dans son jugement du 11 janvier 2018 ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable " ;

8. Considérant que si Mme C...soutient qu'elle devait être mise à même de présenter des observations avant l'édiction de l'arrêté attaqué dès lors qu'elle n'a pas présenté de demande de titre de séjour, il ressort des pièces du dossier qu'elle a été expressément convoquée par courrier du 27 juin 2017 par le préfet en même temps que son époux le 12 juillet suivant, afin précisément de faire valoir ses observations sur son droit au séjour ; qu'elle n'établit ni même n'allègue avoir été empêchée de se rendre à cet entretien, ou n'avoir pu présenter de manière utile tous éléments quant à l'appréciation de sa situation personnelle ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance du respect d'une procédure contradictoire doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que si, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union ; qu'ainsi, le moyen tel qu'il est articulé au soutien des conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour et tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article " ;

11. Considérant, d'une part, qu'il ressort des termes mêmes de la décision portant refus de séjour que, contrairement à ce soutient la requérante, le préfet a effectivement examiné la possibilité de régulariser la situation de l'intéressée, notamment au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dès lors le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise sur ce point le préfet doit être écarté ;

12. Considérant, d'autre part, qu'en se bornant à soutenir qu'elle possède un bien immobilier en France, que ses enfants y sont scolarisés et que des membres de sa famille résident régulièrement sur le territoire, la requérante ne fait valoir aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel au sens des dispositions précitées de nature à lui ouvrir un droit au séjour ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté ;

13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué ait, dans les circonstances de l'espèce, méconnu les stipulations précitées, dès lors qu'il n'implique en lui-même aucune séparation des filles de la requérante d'avec leur mère, ces dernières ayant vocation à suivre leurs parents et que, compte tenu de leur jeune âge, la mesure d'éloignement litigieuse ne devrait pas avoir pour effet de compromettre leur équilibre, ni leur scolarité ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

En ce qui concerne les moyens communs aux deux requêtes :

14. Considérant, en premier lieu, que les requérants reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de l'insuffisance et du caractère erroné de la motivation et du défaut d'examen particulier de leur situation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, par le tribunal administratif de Strasbourg dans son jugement du 11 janvier 2018 ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 prévoient que : " Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles (...) " ; que l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 qui transpose cette directive en droit français, dispose que : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ;

16. Considérant, d'une part, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus du titre de séjour ; que les dispositions précitées du 7ème alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que la mesure portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne sont pas incompatibles avec les dispositions de la directive du 16 décembre 2008, et notamment avec les objectifs découlant du paragraphe introductif 6) et de son article 12 ;

17. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que les décisions de refus de séjour comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que les décisions portant obligation de quitter le territoire français précisent expressément qu'elles sont motivées par référence aux refus de séjour; que, dès lors, le moyen tiré d'un défaut de motivation ne peut être qu'écarté ;

18. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit à : " A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

19. Considérant que l'entrée sur le territoire national des intéressés est récente ; que la seule circonstance que leurs deux filles y soient scolarisées, respectivement en classe de 6ème et CE2, n'est pas de nature à conférer en soi un droit au séjour aux intéressés, dès lors que la cellule familiale peut se reconstituer dans leur pays d'origine et qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que la scolarité des enfants ne pourrait s'y poursuivre ; que si les requérants se prévalent de la présence en France de frères et soeurs, neveux, nièces et cousines, ils ne démontrent pas être dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine où ils ont résidé la majeure partie de leur vie ; que la seule circonstance que les intéressés disposent de comptes bancaires approvisionnés et d'un logement dont ils sont propriétaires ne suffit pas à caractériser une atteinte disproportionnée portée par les décisions attaquées à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés, de même que, pour les mêmes motifs, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes en annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Considérant que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser aux requérants une somme en application de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées par M. et Mme C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Mme A...C...née et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

3

N° 18NC00339,18NC00340


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC00339-18NC00340
Date de la décision : 18/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : KHADRAOUI-ZGAREN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-10-18;18nc00339.18nc00340 ?
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