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19/06/2018 | FRANCE | N°17NC01302-17NC01303

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 19 juin 2018, 17NC01302-17NC01303


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Alsace Nature a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le contrat par lequel l'Etat a concédé à la Société concessionnaire de l'autoroute de contournement ouest de Strasbourg (Arcos) la conception, le financement, la construction, l'entretien, l'exploitation et la maintenance de l'autoroute A355.

La commune de Vendenheim a présenté un mémoire en intervention au soutien des conclusions de l'association Alsace Nature.

Par un jugement n° 1604139 du 29 mars 2017,

le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Alsace Nature a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le contrat par lequel l'Etat a concédé à la Société concessionnaire de l'autoroute de contournement ouest de Strasbourg (Arcos) la conception, le financement, la construction, l'entretien, l'exploitation et la maintenance de l'autoroute A355.

La commune de Vendenheim a présenté un mémoire en intervention au soutien des conclusions de l'association Alsace Nature.

Par un jugement n° 1604139 du 29 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 17NC01302 le 30 mai 2017, l'association Alsace Nature, représentée par Me Zind, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1604139 du 29 mars 2017 du tribunal administratif de Strasbourg et d'évoquer le litige ;

2°) subsidiairement de réformer le jugement n° 1604139 du 29 mars 2017 du tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) avant-dire droit d'enjoindre à l'Etat de produire les annexes 18 et 22 du contrat de concession ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt lésé dès lors que son objet statutaire prend expressément en compte la défense des préoccupations d'environnement qui n'ont pas été intégrées dans les contrats administratifs et la commande publique ;

- elle bénéficie d'un agrément ;

- le contrat de concession menace gravement les intérêts qu'elle entend protéger et le projet aura d'importantes conséquences, directes et indirectes, sur l'environnement, tant en matière de qualité de l'air, d'hydraulique, de protection des zones humides et des espaces agricoles naturels et des espèces qu'en termes paysagers ;

- le candidat sélectionné ne présente pas suffisamment de garanties financières pour l'exécution de ses obligations environnementales ;

- les clauses du contrat de concession prennent insuffisamment en compte l'objectif de développement durable ;

- le contrat prescrit la réalisation de travaux nouveaux, qui ne figurent pas dans la déclaration d'utilité publique du 23 janvier 2008 ;

- les mesures d'évitement, de réduction et de compensation des impacts sont insuffisantes ;

- l'enquête publique était caduque au jour de la signature du contrat de concession ;

- les considérations environnementales et de développement durable n'ont pas été prises en compte pour les modulations de péage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, la société Arcos, représentée par Me Jourdan, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a estimé que la convention de concession dont l'association Alsace Nature sollicitait l'annulation ne pouvait être regardée comme susceptible de léser de façon suffisamment directe et certaine les intérêts défendus par cette association ;

- la convention de concession qui se borne à définir le montage contractuel du projet, n'a pas, par elle-même, de conséquence sur l'environnement ;

- la demande de première instance était tardive ;

- le moyen lié à la passation est irrecevable et non fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de la déclaration d'utilité publique et de caducité sont irrecevables et inopérants ;

- les modulations des tarifs prennent en compte les considérations environnementales et de développement durable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence d'intérêt lésé de manière directe et certaine ;

- la requête est tardive ;

- les intérêts prétendus lésés ne présentent aucun lien avec le moyen tiré de l'insuffisance des garanties financières ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de la déclaration d'utilité publique et de caducité sont inopérants et non fondés ;

- la convention prévoit des modulations tarifaires en fonction de la qualité de polluants.

Par une lettre du 8 janvier 2018, les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à une audience du 1er semestre 2018 et que l'instruction pourrait être close à partir du 30 janvier 2018 sans information préalable.

Par une ordonnance du 17 avril 2018, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Un mémoire, présenté pour l'association Alsace Nature, a été enregistré le 2 mai 2018.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 17NC01303 le 30 mai 2017, la commune de Vendenheim, représentée par Me Zind, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1604139 du 29 mars 2017 du tribunal administratif de Strasbourg et d'évoquer le litige ;

2°) subsidiairement de réformer le jugement n° 1604139 du 29 mars 2017 du tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) avant-dire droit d'enjoindre à l'Etat de produire les annexes 18 et 22 du contrat de concession ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement ne pouvait régulièrement, dans son dispositif, rejeter son intervention avant de rejeter la demande de l'association ;

- elle justifie d'un intérêt lésé particulier dès lors que le contrat doit s'exécuter sur son territoire et que le projet aura d'importantes conséquences, directes et indirectes, sur l'environnement, tant en matière de qualité de l'air, d'hydraulique, de protection des zones humides et des espaces agricoles naturels et des espèces qu'en termes paysagers ;

- le candidat sélectionné ne présente pas suffisamment de garanties financières pour l'exécution de ses obligations environnementales ;

- les clauses du contrat de concession prennent insuffisamment en compte l'objectif de développement durable ;

- le contrat prescrit la réalisation de travaux nouveaux, qui ne figurent pas dans la déclaration d'utilité publique du 23 janvier 2008 ;

- les mesures d'évitement, de réduction et de compensation des impacts sont insuffisantes ;

- l'enquête publique était caduque au jour de la signature du contrat de concession ;

- les considérations environnementales et de développement durable n'ont pas été prises en compte pour les modulations de péage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, la société Arcos, représentée par Me Jourdan, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a estimé que l'intervention de la commune n'était pas admise alors que la demande de l'association était irrecevable ;

- la commune n'est pas recevable à faire appel du jugement dans la mesure où elle ne justifie pas d'un intérêt lésé ;

- le moyen lié à la passation est irrecevable et non fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de la déclaration d'utilité publique et de caducité sont irrecevables et inopérants ;

- les modulations des tarifs prennent en compte les considérations environnementales et de développement durable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête de la commune est irrecevable en l'absence d'intérêt lésé de manière directe et certaine ;

- le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

- la requête de l'association était irrecevable faute d'intérêt lésé et pour tardiveté ;

- les intérêts prétendus lésés ne présentent aucun lien avec le moyen tiré de l'insuffisance des garanties financières ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de la déclaration d'utilité publique et de caducité sont inopérants et non fondés ;

- la convention prévoit des modulations tarifaires en fonction de la qualité de polluants.

Par un mémoire enregistré le 13 mars 2018, la commune de Vendenheim déclare se désister de cette instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wallerich, président assesseur,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me Zind, avocat de l'association Alsace Nature et de la commune de Vendenheim et les observations de Me Jourdan, avocat de la société Arcos.

Considérant ce qui suit :

1. L'Etat a lancé en 2014, une procédure de consultation en vue de la passation d'un contrat de concession pour la réalisation de l'autoroute A 355, ou " Autoroute de Contournement Ouest de Strasbourg ", projet déclaré d'utilité publique par un décret du 23 janvier 2008. La concession a été attribuée à un groupement composé des sociétés Vinci Concession et Soc 44, lequel a constitué une société ad hoc dénommée Société concessionnaire de l'autoroute du contournement ouest de Strasbourg (Arcos). Par contrat signé le 29 janvier 2016, l'Etat a confié à cette dernière la conception, le financement, la construction, l'exploitation, l'entretien, et la maintenance de l'autoroute de contournement ouest de Strasbourg et de ses annexes. L'association Alsace Nature a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de ce contrat et relève appel du jugement du 19 mars 2017 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande. La commune de Vendenheim relève également appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas admis l'intervention qu'elle avait présentée au soutien de cette dernière.

2. Les requêtes présentées par l'association Alsace Nature et la commune de Vendenheim tendent à l'annulation du même jugement. Elles ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la requête de la commune de Vendenheim :

3. Par un mémoire enregistré le 13 mars 2018, la commune de Vendenheim déclare se désister de cette instance. Ce désistement étant pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la requête de l'association Alsace Nature :

4. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. En vertu de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, une association de protection de l'environnement agréée justifie d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément.

5. L'association Alsace Nature, association agréée pour la protection de l'environnement, a notamment pour objet, aux termes de ses statuts modifiés en dernier lieu le 23 avril 2016 : " a) de réunir et de coordonner les volontés et les efforts pour la sauvegarde des paysages dans toutes leurs composantes sol, sous-sol, eau, air, flore, faune, milieux naturels et sites bâtis (...) ; h) d'user de tous les moyens légaux disponibles pour défendre le milieu de vie, y compris en matière visuelle, lumineuse et sonore, ainsi qu'un usage sobre et efficace des ressources naturelles (...) ; i) de défendre et promouvoir l'intégration des préoccupations ici décrites dans les diverses politiques publiques, la gestion des propriétés publiques, les contrats administratifs et la commande publique (...) ". Afin d'établir son intérêt à contester la validité du contrat de concession litigieux, l'association Alsace Nature fait valoir que la réalisation et la mise en service de l'autoroute de contournement ouest de Strasbourg auront d'importantes conséquences, directes et indirectes, sur l'environnement, tant en matière de qualité de l'air, d'hydraulique, de protection des zones humides et des espaces agricoles naturels et des espèces, qu'en termes paysagers.

6. S'il est vrai que le projet de construction de la voie autoroutière et de ses dépendances est susceptible d'avoir des répercussions importantes sur l'environnement dans le secteur géographique impacté par son tracé, le montage contractuel retenu pour en assurer la réalisation est en revanche, par lui-même, dépourvu de lien avec l'objet statutaire de l'association requérante. La réalisation des travaux d'aménagement envisagés par le contrat de concession est en particulier, conformément aux articles 6.4 et 6.5 du cahier des charges qui lui est annexé, conditionnée par les résultats des études environnementales qui doivent préalablement être effectuées et par la délivrance d'autorisations administratives. Ce contrat ne saurait donc être regardé comme susceptible, par lui-même, de léser de façon suffisamment directe et certaine les intérêts défendus par l'association Alsace Nature. Ainsi, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres fins de non-recevoir soulevées en défense ni d'ordonner avant-dire droit la production d'annexes du contrat, l'association Alsace Nature n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande comme irrecevable.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'association Alsace Nature demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de la commune de Vendenheim.

Article 2 : La requête de l'association Alsace Nature est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Alsace Nature, à la commune de Vendenheim, au ministre de la transition écologique et solidaire et à la Société concessionnaire de l'autoroute du contournement ouest de Strasbourg.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 17NC01302 - 17NC01303


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01302-17NC01303
Date de la décision : 19/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-08-01-01 Marchés et contrats administratifs. Règles de procédure contentieuse spéciales. Recevabilité. Recevabilité du recours pour excès de pouvoir en matière contractuelle.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : SCP GIDE LOYRETTE NOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-06-19;17nc01302.17nc01303 ?
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