La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2018 | FRANCE | N°17NC02112

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 07 juin 2018, 17NC02112


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Longavilla a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le maire de la commune de Longeville-en-Barrois a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire une maison d'habitation sur les parcelles cadastrées AN 523 et 526, jusqu'à l'approbation définitive du futur plan local d'urbanisme, sans que le sursis prononcé puisse excéder deux ans.

Par un jugement n° 1601122 du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejet

sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 août ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Longavilla a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le maire de la commune de Longeville-en-Barrois a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire une maison d'habitation sur les parcelles cadastrées AN 523 et 526, jusqu'à l'approbation définitive du futur plan local d'urbanisme, sans que le sursis prononcé puisse excéder deux ans.

Par un jugement n° 1601122 du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 août 2017 complétée par des mémoires enregistrés les 28 décembre 2017 et 11 janvier et 9 mai 2018, la SCI Longavilla, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2016 du maire de Longeville-en-Barrois ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Longeville-en-Barrois le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SCI Longavilla soutient que :

- la commune lui a délivré un certificat d'urbanisme tacite le 10 juin 2015 ;

- le certificat d'urbanisme qui lui a été délivré le 30 juillet 2015 signalant la possibilité d'opposer un sursis à statuer sur une demande ultérieure de permis n'est pas motivé ;

- un sursis à statuer ne pouvait être opposé à sa demande de permis de construire dès lors que l'état d'avancement des travaux d'élaboration du plan local d'urbanisme ne permettait pas de déterminer la portée exacte des nouvelles conditions d'occupation et d'utilisation du sol, ni de déterminer dans quelle mesure son projet pouvait compromettre leur mise en oeuvre ;

- le plan local d'urbanisme en cours d'élaboration est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du pays barrois.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 novembre et 19 décembre 2017 et 2 janvier et 24 avril 2018, la commune de Longeville-en-Barrois, représentée par la SCP Millot-A... et Fontaine, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la SCI Longavilla sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Longeville-en-Barrois soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par un courrier du 23 mars 2018, des pièces complémentaires ont été demandées aux parties pour compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Par un courrier enregistré le 28 mars 2018, la commune de Longeville-en-Barrois a produit les pièces sollicitées.

Un mémoire présenté pour la commune de Longeville-en-Barrois a été enregistré le 15 mai 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me B...représentant la SCI Longavilla, ainsi que celles de Me A... représentant la commune de Longeville-en-Barrois.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. / Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 102-13, L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. (...) ". L'article L. 153-11 du même code dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 23 septembre 2015 dispose : " L'autorité compétente mentionnée à l'article L. 153-8 prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les objectifs poursuivis et les modalités de concertation, conformément à l'article L. 103-3. / La délibération prise en application de l'alinéa précédent est notifiée aux personnes publiques associées mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9. / A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan ".

2. Le 3 novembre 2015, M. C...D...a déposé pour le compte de la SCI Longavilla un permis de construire une maison d'habitation sur les parcelles cadastrées AN 523 et AN 526 dans la commune de Longeville-en-Barrois. Par un arrêté du 22 février 2016, la maire de cette commune a, sur le fondement des dispositions précitées des articles L. 424-1 et L. 153-11 du code de l'urbanisme, opposé un sursis à statuer sur cette demande jusqu'à l'approbation définitive du plan local d'urbanisme en cours d'élaboration sans que la durée du sursis prononcé puisse excéder deux ans. La SCI Longavilla fait appel du jugement du 20 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 22 février 2016 :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'existence d'un certificat d'urbanisme tacite :

3. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'État, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. / Le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'État par l'autorité compétente mentionnée au a et au b de l'article L. 422-1 du présent code. ". L'article R. 410-10 du même code dispose : " Dans le cas prévu au b de l'article L. 410-1, le délai d'instruction est de deux mois à compter de la réception en mairie de la demande. (...) ". Aux termes de l'article R. 410-12 dudit code : " À défaut de notification d'un certificat d'urbanisme dans le délai fixé par les articles R. 410-9 et R. 410-10, le silence gardé par l'autorité compétente vaut délivrance d'un certificat d'urbanisme tacite. Celui-ci a exclusivement les effets prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 410-1, y compris si la demande portait sur les éléments mentionnés au b de cet article. ".

4. Il résulte de la combinaison des articles L. 424-1, L. 153-11 et L. 410-1 du code de l'urbanisme que tout certificat d'urbanisme délivré sur le fondement de l'article L. 410-1 du même code a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d'autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d'urbanisme applicables à la date de la délivrance du certificat. Parmi ces règles figure la possibilité de se voir opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis, lorsqu'est remplie, à la date de délivrance du certificat, l'une des conditions énumérées à l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme.

5. Il est constant que le 10 avril 2015, M. D...a sollicité du maire de Longeville-en-Barrois la délivrance d'un certificat d'urbanisme sur le fondement des dispositions précitées du b de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme. A défaut de notification dans le délai de deux mois d'un certificat d'urbanisme, le silence gardé par le maire sur cette demande a valu délivrance d'un certificat d'urbanisme tacite. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point précédent que la seule circonstance que le maire de Longeville-en-Barrois ait délivré le 10 juin 2015 à la SCI Longavilla un certificat d'urbanisme tacite ne faisait pas obstacle à ce qu'il oppose un sursis à statuer à la demande de permis de construire présentée le 3 novembre 2015 dès lors qu'était remplie, à la date de délivrance du certificat, l'une des conditions énumérées à l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de motivation du certificat d'urbanisme délivré le 30 juillet 2015 :

6. La circonstance, qui manque d'ailleurs en fait, selon laquelle le certificat d'urbanisme délivré le 30 juillet 2015 à la SCI Longavilla ne serait pas motivé, s'agissant de la possibilité prévue par ce certificat d'opposer un sursis à statuer sur une autorisation d'urbanisme ultérieure, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le maire de Longeville-en-Barrois a opposé un sursis à statuer sur la demande de permis de construire présentée par la SCI Longavilla le 3 novembre 2015.

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l'état d'avancement des travaux d'élaboration du plan local d'urbanisme ne permettait pas de déterminer dans quelle mesure le projet de la SCI Longavilla pouvait compromettre sa mise en oeuvre :

7. La possibilité d'opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis, lorsqu'est remplie, à la date de délivrance d'un certificat d'urbanisme, l'une des conditions énumérées à l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, vise à permettre à l'autorité administrative de ne pas délivrer des autorisations pour des travaux, constructions ou installations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme.

8. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles AN 523 et AN 526 d'implantation du projet porté par la SCI Longavilla se situent 15 rue des Alliés dans le centre ancien de la commune. Cette rue des Alliés est parallèle à la Grand Rue à laquelle elle est reliée par la rue de la Ruelle au nord et par la rue de l'Orme au Sud. Les parcelles AN 523 et AN 526 se situent dans le quadrilatère formé par la Grand Rue, la rue des Alliés, la rue de la Ruelle et la rue de l'Orme.

9. Il ressort également des pièces du dossier que par une délibération du 5 septembre 2012, le conseil municipal de la commune de Longeville-en-Barrois a prescrit l'élaboration d'un plan local d'urbanisme. Un projet de plan d'aménagement et de développement durables a été formalisé dans un document du 16 octobre 2014, qui énumère un certain nombre d'objectifs : préservation du centre ancien, amélioration du cadre de vie et optimisation des déplacements sur la commune. Le document de travail du 16 octobre 2014 prévoit notamment de créer un poumon vert au centre du village en développant une emprise paysagère et naturelle, de connecter les quartiers par une poursuite de la mise en valeur des espaces verts ou de loisirs communaux et en installant des liaisons douces (passerelles) et de poursuivre les initiatives communales pour résoudre la problématique du stationnement dans certaines rues du centre ancien avec notamment la réalisation d'un parking de 27 places entre les rues de l'Orme et de la Ruelle. Le projet de plan d'aménagement et de développement durables a été validé lors de la réunion du conseil municipal du 19 novembre 2014. Lors de la réunion du conseil municipal du 28 janvier 2015, les élus ont évoqué pour la première fois la possibilité de créer des emplacements réservés au centre du village pour créer un aménagement paysager ou une aire de jeux avec une connexion avec le parking récemment créé par la commune, rue de l'Orme. Ce projet de création d'une zone verte au centre du village s'est encore précisé lors de la réunion du conseil municipal du 4 mars 2015, au cours de laquelle les élus ont validé le principe de création d'emplacements réservés sur les parcelles qui ne relèvent pas de la propriété communale pour aménager une zone de loisirs au coeur du village à proximité de l'école située 14 rue des Alliés soit juste en face des parcelles AN 523 et 526 en litige. Lors de cette réunion, les élus ont également prévu de poursuivre la réflexion pour réaliser des stationnements le long de la rue de la Ruelle à l'instar de ceux déjà réalisés rue de l'Orme et pour relier ces deux rues par une rue piétonne créée au coeur de la zone NJ imaginée dans cette zone. Dès mars 2015, les élus prévoyaient donc de créer des emplacements réservés à l'arrière des parcelles riveraines de la rue des Alliés pour créer entre les rues de la Ruelle et de l'Orme une zone verte avec une aire de jeux. L'état d'avancement des travaux d'élaboration du plan local d'urbanisme au 10 juin 2015, date de délivrance à la SCI Longavilla d'un certificat d'urbanisme tacite, permettait ainsi de comprendre que le projet de la SCI Longavilla de construction d'une seconde maison individuelle sur les parcelles AN 523 et 526 était de nature à compromettre l'exécution du futur PLU. Par suite, le maire de Longeville-en-Barrois a pu, par son arrêté du 22 février 2016, opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire présentée par la SCI Longavilla sans entacher son arrêté d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompatibilité du plan local d'urbanisme en cours d'élaboration avec le schéma de cohérence territorial du pays barrois :

10. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'année 2017, la préfecture de la Meuse a informé la commune de ce que la création prévue par le plan local d'urbanisme d'une zone économique en sortie de village était incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du pays barrois. Cette circonstance, postérieure à l'arrêté attaqué et qui par ailleurs ne concerne en aucune façon les parcelles AN 523 et AN 526 en cause dans le présent litige, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 22 février 2016 par lequel le maire de Longeville-en-Barrois a opposé un sursis à statuer sur la demande de permis présentée par la SCI Longavilla pour la construction sur ces deux parcelles d'une maison d'habitation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Longavilla n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Longeville-en-Barrois, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SCI Longavilla demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SCI Longavilla une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à verser à la commune de Longeville-en-Barrois sur le fondement des mêmes dispositions.

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Longavilla est rejetée.

Article 2 : La SCI Longavilla versera à la commune de Longeville-en-Barrois une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Longavilla et à la commune de Longeville-en-Barrois.

2

N° 17NC02112


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC02112
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Sursis à statuer.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS MILLOT-LOGIER et FONTAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-06-07;17nc02112 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award