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29/05/2018 | FRANCE | N°17NC02352

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 29 mai 2018, 17NC02352


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2016 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1701144 du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 septembre 2017, M.

C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2016 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1701144 du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 septembre 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 23 novembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien n'est pas motivée ;

- la procédure est irrégulière au regard du principe du contradictoire dès lors qu'en dépit de sa demande, l'avis du médecin consulté ne lui a pas été communiqué en méconnaissance des dispositions des articles L. 311-2 et L. 114-7 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire tel que prévu par les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux ;

- l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour entache d'illégalité la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation s'agissant des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français entache d'illégalité la décision fixant le délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wallerich, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., de nationalité algérienne, a déclaré être entré en France le 25 juin 2001. La demande d'asile territorial présentée par l'intéressé le 11 juin 2001 a été rejetée par le ministre de l'intérieur le 13 mars 2002 et il a alors été invité à quitter le territoire français. Alors qu'il était en séjour irrégulier, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence le 22 novembre 2013, mais le préfet du Haut-Rhin a rejeté cette demande le 30 décembre 2013 et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français. M. C...a présenté le 21 juin 2016 une nouvelle demande de titre de séjour en se prévalant notamment de son état de santé. Par un arrêté du 23 novembre 2016, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 31 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien, applicable aux ressortissants algériens qui demandent la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. Au ressortissant algérien résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. En premier lieu, la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, l'article L. 114-7 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Ainsi qu'il est dit à l'article L. 311-2 et dans les conditions posées à cet article, les avis au vu desquels est prise, sur demande, une décision individuelle créatrice de droits sont communicables à l'auteur de la demande dès leur envoi à l'administration compétente. " et aux termes de l'article L. 311-2 de ce code : " Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Le droit à communication ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Cependant, les avis, prévus par les textes législatifs ou réglementaires, au vu desquels est prise une décision rendue sur une demande tendant à bénéficier d'une décision individuelle créatrice de droits, sont communicables à l'auteur de cette demande dès leur envoi à l'autorité compétente pour statuer sur la demande. Lorsque les motifs de l'avis n'y figurent pas, ceux-ci doivent être également communiqués au demandeur en cas d'avis défavorable (...) ".

5. Les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration ont pour objet de faciliter de manière générale l'accès des personnes qui le demandent aux documents administratifs. Les articles R. 311-12 et suivants et R. 343-11 et suivants de ce code définissent les modalités selon lesquelles est assuré le respect de cette obligation, en particulier par la saisine de la commission d'accès aux documents administratifs. Ces dispositions n'ont, en revanche, pas pour objet de modifier les règles particulières qui régissent la procédure de délivrance des titres de séjour et elles ne peuvent donc utilement être invoquées pour contester la légalité d'une décision refusant d'accorder un titre de séjour.

6. Il résulte de ce qui précède que si M. C...a demandé, dès le 27 septembre 2016, la communication par le préfet du Haut-Rhin de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui, sur le fondement des dispositions de l'article R. 312-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avait été rendu dans le cadre de l'instruction de sa demande de certificat de résidence algérien pour raison médicale, le refus implicite qui a été opposé à cette demande par l'autorité préfectorale est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 23 novembre 2016 qui a rejeté sa demande de titre de séjour, alors au demeurant que cet avis a été transmis au requérant au cours de l'instruction devant le tribunal administratif.

7. En troisième lieu, dans son avis du 1er juillet 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que, si l'état de santé de M. C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les soins nécessités par son état de santé présentent un caractère de longue durée, l'intéressé peut toutefois effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie. Ce faisant, et contrairement à ce que soutient le requérant, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été émis sur le fondement des critères définis par les stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien. En outre, le préfet a entendu refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces seules stipulations. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit commise à cet égard ne peut qu'être écarté.

8. En dernier lieu, M. C...n'établit pas qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Algérie. Il ne justifie pas davantage par les pièces qu'il produit, avoir, ainsi qu'il le soutient, résidé en France de façon continue depuis 2001 et relever ainsi de circonstances humanitaires exceptionnelles. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait, en lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, fait une inexacte application des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ou aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. En premier lieu, si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré, comme en l'espèce, de la violation des articles 41 et 47 de la Charte, par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

10. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

11. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a déposé une demande de titre de séjour en raison de son état de santé, le 21 juin 2016, et que, lors de cette procédure, il a été mis à même de présenter s'il l'estimait utile tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de la décision attaquée. La seule circonstance que le préfet du Haut-Rhin n'ait pas, en l'espèce, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé l'étranger qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder le requérant comme ayant été privé de son droit à être entendu.

12. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, ne peut qu'être écarté.

13. En troisième lieu, en se bornant à se prévaloir de son état de santé, du fait qu'il serait hébergé chez sa tante depuis de nombreuses années et qu'il résiderait en France depuis 2001, ce qui ne ressort pas des pièces du dossier, M. C...ne justifie pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en lui faisant obligation de quitter le territoire français.

Sur la légalité des décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination :

14. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de ce que les décisions attaquées devraient être annulées, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

2

N° 17NC02352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC02352
Date de la décision : 29/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Accès aux documents administratifs - Accès aux documents administratifs au titre de la loi du 17 juillet 1978 - Contentieux.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : DOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-05-29;17nc02352 ?
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