Vu la procédure suivante :
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 mai, 28 août et 6 décembre 2017, la société Distridoubs, représentée par la SCP Aleo Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le permis de construire un centre commercial délivré le 4 avril 2017 par le maire de Houtaud à la société Houtaudis ;
2°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Houtaud et de la société Houtaudis une somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son intérêt à agir n'est pas contestable, dès lors qu'elle exploite un magasin de même nature à environ 2,5 kilomètres du projet et que le permis de construire tient lieu d'autorisation commerciale ;
- il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur du permis de construire contesté ;
- la demande de permis de construire n'a pas été présentée dans les deux ans de la notification de l'autorisation d'aménagement commercial en contravention de la loi n° 2014-626 du 19 juin 2014 ;
- en tout état de cause, l'autorisation de la Commission nationale d'aménagement commercial du 23 septembre 2015 a été accordée en méconnaissance de la loi n° 2014-626 du 19 juin 2014 dès lors que la commission ne pouvait être regardée comme saisie à nouveau de la demande de la société Houtaudis à la suite de l'annulation par la cour administrative d'appel de Nancy de la précédente autorisation accordée le 17 juin 2014 ;
- l'article L. 752-15 du code de commerce est méconnu dès lors qu'une nouvelle demande était nécessaire en raison des modifications substantielles apportées au projet tenant à la nécessité pour la Commission nationale d'aménagement commercial de statuer sur une extension de 340 m² qui ne nécessitait pas une autorisation à la date à laquelle elle avait été réalisée ;
- le permis de construire contesté méconnaît l'article L. 752-6 du code de commerce.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 juillet et le 14 décembre 2017, la commune de Houtaud et la société Houtaudis, représentées par MeA..., conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge de la société Distridoubs une somme de 3 000 euros à verser tant à la commune de Houtaud qu'à la société Houtaudis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elles soutiennent que :
- si la société Distridoubs peut contester le permis de construire en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale, la confirmation irrévocable de la décision du 23 septembre 2015 de la Commission nationale d'aménagement commercial interdit à la société de contester à nouveau cette décision, même par voie d'exception ; par suite, les moyens tirés de l'illégalité de la décision du 23 septembre 2015 de la Commission nationale d'aménagement commercial, qui est devenue définitive, sont inopérants ;
- dès lors qu'elle ne peut être regardée comme contestant l'autorisation du 23 septembre 2015 de la Commission nationale d'aménagement commercial en tant qu'elle vaudrait avis favorable préalable au permis de construire, la société Distridoubs n'a pas qualité et intérêt à agir ;
- la société Distridoubs ne justifie pas d'un préjudice personnel, direct et certain l'autorisant à contester le permis de construire au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- les moyens relatifs à la légalité externe de l'acte, concernant la compétence de l'auteur de l'acte, l'absence de publicité du permis de construire, l'absence de droits acquis au titre de la législation d'aménagement commercial, la nécessité de saisir à nouveau la Commission nationale d'aménagement commercial après l'annulation prononcée par le cour administrative d'appel, portent sur la légalité du permis de construire en tant qu'autorisation d'urbanisme et sont inopérants ;
- le moyen tiré de la tardiveté de la demande de permis de construire ne peut être utilement présenté par la société Distridoubs dès lors qu'il ne concerne pas l'aménagement commercial, mais la légalité externe du permis de construire ; en tout état de cause, l'erreur matérielle commise dans les visas du permis de construire en mentionnant la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 17 juin 2014 est sans incidence sur la légalité du permis de construire ;
- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du permis de construire, qui ne relève pas de l'aménagement commercial mais de la régularité formelle de l'autorisation d'urbanisme, ne peut être utilement invoqué par la société Distridoubs ; en tout état de cause, ce moyen n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. Après annulation d'une décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 17 juin 2014, prise à la suite du recours de la société Distridoubs contre l'accord donné le 11 février 2014 par la Commission départementale d'aménagement commercial du Doubs, la Commission nationale d'aménagement commercial a, par décision du 23 septembre 2015 devenue définitive, accordé à la société Houtaudis l'autorisation préalable requise en vue de procéder à l'extension après reconstruction d'un centre commercial situé à Houtaud et Dommartin. La société Houtaudis a ensuite demandé aux maires de Houtaud et de Dommartin les permis de construire ce centre commercial.
2. La société Distridoubs qui exploite un hypermarché de 6 100 m² comportant une galerie marchande dans la commune de Doubs demande l'annulation du permis de construire délivré 4 avril 2017 par le maire de Houtaud à la société Houtaudis, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
3. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...). "
4. Aux termes de l'article 39 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dans sa rédaction issue de l'article 36 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 : " Pour tout projet nécessitant un permis de construire, l'autorisation d'exploitation commerciale, en cours de validité, dont la demande a été déposée avant le 15 février 2015 vaut avis favorable des commissions d'aménagement commercial ".
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions. ".
6. La société Distridoubs, qui saisit la cour en tant que professionnel dont l'activité, exercée dans la zone de chalandise du projet de la société Houtaudis, est susceptible d'être affectée par le projet, fait partie des personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du code de commerce. Si elle ne peut présenter que de moyens relatifs à la régularité du permis de construire en tant qu'il tient lieu d'autorisation commerciale, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, qui met en cause la légalité du permis de construire en tant qu'il vaut autorisation de construire comme autorisation d'exploitation commerciale, est recevable, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs.
7. Il ressort toutefois des pièces du dossier que par un arrêté du 22 avril 2014 transmis à la préfecture et certifié exécutoire à compter du 2 mai 2014 par le maire de Houtaud, celui-ci a délégué sa signature à son deuxième adjoint afin de lui permettre de signer ''tous les actes relatifs'' à l'urbanisme. Contrairement à ce que soutient la société requérante, cette délégation habilitait cet adjoint à signer le permis de construire en litige, alors même qu'il comportait également autorisation d'exploitation commerciale. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ne peut être accueilli.
8. En deuxième lieu, si le permis de construire attaqué vise un avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 11 février 2014, alors que cette date correspond à la décision de la commission départementale d'aménagement commercial du Doubs qui a été soumise à la Commission nationale d'aménagement commercial, cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité du permis de construire attaqué dès lors que par décision du 23 septembre 2015, la Commission nationale d'aménagement commercial a délivré à la société Houtaudis une autorisation qui vaut avis favorable aux termes de l'article 39 mentionné ci-dessus de la loi du 18 juin 2014.
9. En troisième lieu, la société Distridoubs ne peut utilement se prévaloir de l'article R. 752-27 du code de commerce pour soutenir que la société Houtaudis n'aurait pas présenté sa demande de permis de construire dans un délai de deux ans à compter de la notification de la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial dès lors que cet article ne comportait plus cette rédaction à la date de la demande de permis de construire présentée par la société Houtaudis. En tout état de cause, la demande de permis de construire, effectuée le 30 décembre 2016, a été présentée moins de deux ans après la notification de la décision du 23 septembre 2015 de la Commission nationale d'aménagement commercial.
10. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que le 24 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté la requête de la société Distridoubs tendant à l'annulation de la décision du 23 septembre 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial avait accordé l'autorisation sollicitée à la société Houtaudis. En conséquence, la cour statuant en premier et dernier ressort, cette décision non réglementaire était devenue définitive à la date du 24 novembre 2016. Par suite, les moyens tirés de l'illégalité de cette décision, tenant à ce que la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvait être regardée comme saisie à nouveau de la demande de la société Houtaudis après l'annulation de sa première décision et de la méconnaissance des articles L. 752-15 et L. 752-6, présentés par la société Distridoubs dans sa requête enregistrée le 28 juillet 2017 et dans son mémoire en réplique, sont irrecevables.
11. Enfin, la circonstance, d'ailleurs non avérée, que le permis de construire attaqué n'aurait pas été régulièrement affiché sur le terrain, qui est sans influence sur la légalité du permis de construire et n'a d'effet que sur les délais de recours contentieux, ne peut être utilement invoquée.
12. Il résulte de ce qui précède que la société Distridoubs n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire attaqué.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Houtaudis et de la commune de Houtaud, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Distridoubs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
14. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la société Distridoubs une somme de 750 euros à verser à la société Houtaudis et une somme de 750 euros à verser à la commune de Houtaud au titre des mêmes frais.
Par ces motifs,
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Distridoubs est rejetée.
Article 2 : La société Distridoubs versera à la société Houtaudis une somme de 750 (sept cent cinquante) euros et à la commune de Houtaud une somme de 750 (sept cent cinquante) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Distridoubs, à la société Houtaudis et à la commune de Houtaud.
Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial et au préfet du Doubs.
2
N° 17NC01288