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08/02/2018 | FRANCE | N°17NC00273

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 février 2018, 17NC00273


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2016 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1605529 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 et 21 février 2017, M.D..., représenté par MeB..., dem

ande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler l'arrêté p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2016 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1605529 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 et 21 février 2017, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;

3°) au besoin d'ordonner la communication de son dossier intégral et une expertise médicale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me B...d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- c'est à tort que le préfet et le tribunal administratif n'ont pas suivi l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en se fondant sur des documents insuffisants pour contredire cet avis pris après analyse de son dossier médical ;

- de même le préfet ne dispose d'aucun élément de nature à contredire l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui a estimé que le requérant ne peut voyager sans risques ;

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2018, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Stefanski, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., ressortissant algérien entré régulièrement en France le 27 novembre 2011 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 8 décembre 2011, a demandé le 4 février 2016, un titre de séjour en raison de son état de santé. Il interjette appel du jugement du 5 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigé contre l'arrêté du 19 septembre 2016 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié par le troisième avenant, entré en vigueur le 1er janvier 2003 : " Le certificat de résidence portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. Il n'est pas contesté que par avis du 1er août 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. D...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas dans son pays d'origine de traitement approprié et que son état de santé ne lui permettait pas de voyager sans risque vers son pays d'origine.

4. Le préfet n'est pas lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé. Néanmoins, il lui appartient, lorsque ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine, de justifier des éléments qui l'ont conduit à ne pas suivre cet avis médical.

5. Il ressort d'un certificat médical du 29 novembre 2016 du DrC..., praticien du pôle psychiatrie du groupe hospitalier de la région de Mulhouse et sud Alsace, que M. D... souffre d'une schizophrénie répondant partiellement à un traitement composé de quatre médicaments et que, d'ailleurs son état s'est aggravé après le refus de titre de séjour. Il n'est pas contesté que le dossier médical soumis au médecin de l'agence régionale de santé comportait notamment un rapport établi par ce même médecin.

6. Pour rejeter la demande de M.D..., le préfet a indiqué, dans l'arrêté contesté, que le requérant avait levé le secret médical et produit une attestation du Dr C... mentionnant qu'il est suivi en consultation psychiatrique, que le rapport transmis au médecin de l'agence régionale de santé avait été établi par ce même médecin, que les traitements des pathologies psychiatriques sont disponibles en Algérie comme l'atteste le médecin conseil du consulat de France à Alger, ainsi que la liste des médicaments disponibles en Algérie et, à tort, que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 1er août 2016 indique que l'intéressé peut voyager sans risque vers son pays d'origine.

7. Toutefois, le préfet s'est fondé sur une attestation du 2 juin 2016 du Dr C..., qui mentionne seulement que M. D...est régulièrement suivi dans sa consultation et ne comporte aucune indication sur la pathologie de l'intéressé, sa gravité ou ses particularités. Le courriel du 10 avril 2016 du consulat de France à Alger est relatif à un autre étranger dont rien n'indique que la maladie est comparable à celle de l'appelant et mentionne seulement, de façon générale, que les neuroleptiques prescrits à l'autre patient sont disponibles dans les officines algériennes, sont délivrés sur ordonnance établie par un spécialiste en psychiatrie et que des structures spécialisées existent sur le territoire algérien. Le préfet produit également une liste de médicaments disponibles en Algérie et remboursables par le régime de sécurité sociale algérien, parmi lesquels figurent les médicaments prescrits à M.D....

8. Ces seuls éléments qui, soit ne concernent pas directement M.D..., soit sont relatifs, de façon générale, aux maladies psychiatriques et à leurs traitements en Algérie, dont rien ne permet de conclure qu'ils sont transposables au cas de l'appelant ne suffisent pas à démontrer que le préfet disposait de documents suffisamment précis, applicables au cas particulier de l'appelant, de nature à remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. Ainsi, le préfet n'a pas fondé sa décision sur des éléments de nature à justifier qu'il n'ait pas suivi l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et l'a par suite entachée d'illégalité.

9. Il résulte de ce qui précède que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. M. D...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Maître B...de la somme de 1 500 euros qu'il demande.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : Le jugement attaqué du 5 janvier 2017 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté contesté du préfet du Bas-Rhin sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me B... la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin et à M. E...de la République près le tribunal de grande instance de Strasbourg.

2

N° 17NC00273


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00273
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : THABET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-02-08;17nc00273 ?
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