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30/11/2017 | FRANCE | N°17NC00845

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2017, 17NC00845


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises.

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises.

Par un jugement n° 1700387,1700388 du 10 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal

administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises.

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises.

Par un jugement n° 1700387,1700388 du 10 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 7 avril 2017, sous le n° 17NC00844, Mme D..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte rejet de sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France ou subsidiairement de procéder, dans un délai de quinze jours, à un nouvel examen de sa demande et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- c'est à tort que le préfet a refusé de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France compte tenu des risques qu'il encourt aux Pays-Bas ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2017, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

II.) Par une requête, enregistrée le 7 avril 2017, sous le n° 17NC00845, M. E..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte rejet de sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2017 par lequel la préfète de l'Aube a décidé sa remise aux autorités néerlandaises ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France ou subsidiairement de procéder, dans un délai de quinze jours, à un nouvel examen de sa demande et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- c'est à tort que le préfet a refusé de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France compte tenu des risques qu'il encourt aux Pays-Bas ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2017, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. E...et Mme D...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 26 juin 2017.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Etienvre.

1. Considérant que M. E...et son épouse, MmeD..., ressortissant iraniens, entrés en France selon leurs déclarations le 5 septembre 2016, ont demandé le 14 octobre 2016 à être admis à séjourner en France afin de solliciter l'octroi du statut de réfugié ; que les services préfectoraux ayant constaté que les intéressés étaient entrés aux Pays-Bas sous couvert de visas Schengen délivrés par ces autorités, ils ont saisi celles-ci de demandes de prise en charge ; qu'après acceptation des autorités néerlandaises, la préfète de l'Aube a décidé, le 13 février 2017, la remise des intéressés à ces autorités ; que M. E... et Mme D...relèvent appel du jugement du 10 mars 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes d'annulation de ces décisions ;

2. Considérant que les requêtes présentées par M. E...et son épouse, Mme D...et enregistrées sous les n°s 17NC00844 et 17NC00845 sont dirigées contre le même jugement et tendent à juger des mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative (...) " ;

4. Considérant que les arrêtés contestés comportent de manière suffisamment précise l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé ; que le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé des décisions de remise des intéressés aux autorités néerlandaises doit être, par suite, écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces des dossiers que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle des requérants ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...) La demande est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2 (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable (...) " ; qu'aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) " ;

7. Considérant que les Pays-Bas sont membre de l'Union Européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette présomption est toutefois réfragable lorsque qu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant ; que dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités italiennes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ;

8. Considérant qu'en se bornant à faire état de la présence aux Pays-Bas d'agents iraniens chargés d'établir des listes de réfugiés et qui les rechercheraient, les requérants n'établissent pas qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque sérieux de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; qu'ils ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que c'est à tort que le préfet a décidé de ne pas procéder à l'examen de leurs demandes d'asile ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant qu'eu égard au caractère récent de leur entrée en France, il ne ressort pas des pièces des dossiers que la préfète a porté une atteinte disproportionnée au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale ;

11. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que la préfète ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions contestées sur la situation personnelle des intéressés ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes en annulation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. M. E...et de Mme D... ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à son conseil de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. E...et de Mme D...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E..., à Mme A... D...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.

2

N° 17NC00844,17NC00845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00845
Date de la décision : 30/11/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-11-30;17nc00845 ?
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