Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le préfet du Jura a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait présentée pour son épouse et leurs deux filles.
Par un jugement n° 1600109 du 23 décembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 janvier 2017, M. C..., représenté par MeG..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 23 décembre 2016 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Jura du 24 novembre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui accorder le bénéfice du regroupement familial de son épouse et de leurs deux filles, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros à verser à MeG..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- le préfet a commis une erreur dans l'appréciation de sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2017, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 15 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2017.
Par un mémoire enregistré le 29 juin 2017, M. C...a produit des pièces complémentaires qui n'ont pas été communiquées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Laubriat, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant kosovar titulaire en France d'une carte de résident, fait appel du jugement du 23 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le préfet du Jura a opposé un refus à sa demande de regroupement familial de sa femme, Mme H...B..., et de leurs deux filles.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". L'article L. 411-5 du même code dans sa rédaction alors en vigueur dispose que : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : (...) 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ".
3. L'arrêté contesté du 24 novembre 2015, fondé sur les dispositions du 3° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est motivé par le fait que " le parcours de M. C...peut être regardé comme une fraude en vue d'obtenir un droit au séjour en France pour introduire au final sa vraie famille, procédé non-conforme aux principes essentiels qui régissent la vie familiale en France ".
4. Le préfet, à qui incombe la charge de prouver l'existence d'une fraude, se prévaut des déclarations de MmeF..., l'ancienne épouse de M.C..., de " la chronologie des évènements " et des éléments objectifs qui constituent la situation familiale de M.C.... Il ressort des pièces du dossier que M. C...et Mme F...ont noué une relation dès septembre 2006 et se sont mariés le 12 décembre 2009 après que Mme F...a obtenu le divorce d'un précédent mariage. Aucune pièce du dossier ne vient confirmer les allégations du préfet selon lesquelles le mariage de M. C...et Mme F...aurait été contracté dans le seul but de permettre à M. C... d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour. Il ressort au demeurant de l'arrêt de cette cour du 28 mars 2013 produit par le préfet que l'enquête diligentée par le Procureur de la République avant la célébration de ce mariage avait établi la sincérité de leur union. Il ressort également des propres déclarations de Mme F...et d'attestations établies par des voisins que la communauté de vie du couple est établie entre 2009 et 2012. Les circonstances dans lesquelles cette union a cessé ne révèlent pas non plus l'existence d'une fraude au mariage. En particulier, le mariage a été rompu à la suite d'un divorce par consentement mutuel, prononcé le 11 juillet 2014 et non en raison de son annulation. Au demeurant, et alors qu'un acte obtenu par fraude peut être retiré à tout moment, le préfet n'a pas retiré à M. C...la carte de résident qui lui a été délivrée en juillet 2013. La seule circonstance que MmeB..., qui était la compagne de M. C...avant sa rencontre avec Mme F..., ait accouchée de leur seconde fille en février 2011, ne suffit pas à caractériser la démarche frauduleuse prêtée à M. C...par le préfet du Jura. Dans ces conditions, les éléments fournis par le préfet du Jura ne permettent pas d'établir, contrairement à ce qu'il soutient, que l'intéressé se serait frauduleusement marié en 2009 avec Mme F...afin d'obtenir un titre de séjour pour pouvoir, en décembre 2014, demander le regroupement familial au profit de MmeB..., devenue depuis novembre 2014 sa nouvelle épouse, et de leurs deux filles. Par ailleurs, les faits mis en avant par le préfet ne relèvent pas des principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. Le motif tiré de la méconnaissance du 3° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait ainsi fonder l'arrêté contesté.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative, qui ne conteste pas que la demande de M. C...répondait aux conditions fixées par les dispositions du 1° et 2° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité accorde à M. C...le bénéfice du regroupement familial qu'il avait sollicité.au profit de son épouse et de leurs filles. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Jura d'accorder le bénéfice du regroupement familial à Mme H...C...née B...et à Mmes E...C...et D...C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. M. C... n'ayant pas déposé de dossier de demande juridictionnelle, son avocat ne peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions de M. C...tendant à mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à MeG....
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 23 décembre 2016 et l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le préfet du Jura a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. C...sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Jura d'accorder le bénéfice du regroupement familial à Mme H... C...née B...et à Mmes E...C...et D...C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Jura.
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N° 17NC00137