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26/09/2017 | FRANCE | N°16NC00352

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2017, 16NC00352


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...et Mme D...épouse B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 24 octobre 2014 par lesquels le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant leur pays de destination.

Par un jugement n° 1500790-1500791 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Sous le n° 16NC00

344, par une requête enregistrée le 22 février 2016, M.B..., représenté par Me C...demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...et Mme D...épouse B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 24 octobre 2014 par lesquels le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant leur pays de destination.

Par un jugement n° 1500790-1500791 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Sous le n° 16NC00344, par une requête enregistrée le 22 février 2016, M.B..., représenté par Me C...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 4 juin 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 24 octobre 2014 pris à son encontre par le préfet des Vosges ;

3°) d'enjoindre au préfet des Vosges de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C...de la somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge de renonciation par cet avocat, à la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- le refus de séjour n'est pas suffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et actualisé de sa situation personnelle ;

- le refus de séjour ne pouvait légalement, sans avoir été précédé de la présentation d'observations de la part de l'étranger, être fondé sur les dispositions de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui impliqueraient que l'étranger satisfasse à ' l'ensemble des conditions prévues par le code, ce qui apparaît disproportionné ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen qui était soulevé à cet égard ;

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu, prévu à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008 en ce que le préfet s'est estimé tenu de prendre une mesure d'éloignement après avoir refusé le séjour ;

- elle porte une atteinte excessive à sa situation personnelle et elle est donc entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision ne lui accordant qu'un délai de départ volontaire de trente jours doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 et le préfet n'a pas examiné sa situation particulière au regard de sa particulière vulnérabilité ;

- cette situation justifiait que lui soit accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des autres décisions ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard des risques encourus en cas de retour en Albanie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2017, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête, à ce qu'une somme de 200 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à ce que le montant de la condamnation prononcée, le cas échéant, contre l'Etat soit limitée à la somme de 500 euros.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2016.

II. Sous le n° 16NC00352, par une requête enregistrée le 22 février 2016, Mme D...épouseB..., représentée par Me C...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 4 juin 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 24 octobre 2014 pris à son encontre par le préfet des Vosges ;

3°) d'enjoindre au préfet des Vosges de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C...de la somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge de renonciation par cet avocat, à la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Elle invoque les mêmes moyens que son époux dans la requête n°16NC00344.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2017, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête, à ce qu'une somme de 200 euros soit mise à la charge de Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à ce que le montant de la condamnation prononcée, le cas échéant, contre l'Etat soit limitée à la somme de 500 euros.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme D...épouse B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2016.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Kolbert, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que les requêtes de M. et Mme B...sont dirigées contre un même jugement, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

2. Considérant que M. et MmeB..., ressortissants albanais nés tous deux en 1991, sont entrés irrégulièrement en France le 28 mars 2013 et y ont demandé la reconnaissance du statut de réfugiés ; qu'après le refus qui leur a été opposé par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 13 février 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le 25 septembre 2014, chacun d'eux a fait l'objet, le 24 octobre 2014, d'un arrêté du préfet des Vosges leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours et désignant le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé ; qu'ils relèvent appel du jugement du 4 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté les requêtes qu'ils ont formées contre chacun des arrêtés les concernant ;

Sur les refus de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés contestés comportent l'énoncé détaillé des considérations de droit et de fait qui les fondent et qu'ils ne peuvent, en particulier, être regardés comme présentant une motivation stéréotypée ; qu'à la date à laquelle ils ont été pris, au vu d'un examen particulier des éléments dont disposait alors le préfet des Vosges, ce dernier n'avait pas encore été rendu destinataire du certificat médical que ne lui ont transmis les requérants que par un courrier daté du 2 février 2015 et qu'ainsi, il n'avait pas à prendre position sur les informations figurant dans ce certificat quant à l'état de santé de MmeB... ; que dans ces conditions, les moyens tirés de ces arrêtés ne répondraient pas aux exigences de motivation résultant de la loi du 11 juillet 1979 ou ne procèderaient pas d'un examen particulier de la situation des requérants doivent être écartés ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'une demande d'asile a été définitivement rejetée, l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour doit justifier, pour obtenir ce titre, qu'il remplit l'ensemble des conditions prévues par le présent code. " ;

5. Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de ces dispositions que le préfet serait spécifiquement tenu de recueillir les observations d'un étranger ayant demandé le séjour en qualité de réfugié avant de prendre une décision de refus de séjour ;

6. Considérant, d'autre part, qu'en mentionnant cet article dans les décisions de refus de titre de séjour, qui sont fondées non sur ces dispositions mais sur celles des articles L. 313-13 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet, qui n'avait été saisi que de demandes tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié, s'est borné à rappeler qu'il appartient à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée et qui solliciterait la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement, d'apporter les éléments tendant à démontrer qu'il remplit les conditions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir le titre de séjour demandé ; que le préfet n'a ainsi pas commis d'erreur de droit, ni entaché ses décisions d'un défaut de base légale ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant, d'une part, qu'eu égard à la faible durée de la présence en France des requérants à la date des arrêtés attaqués, à l'absence de toute autre présence familiale dans ce pays que leur fils Advi qui y est né le 19 janvier 2014 et qui a vocation à les suivre, alors qu'il n'est pas contesté qu'ils ont encore des attaches familiales en Albanie où résident notamment la mère de M. B... et les parents et la soeur de MmeB..., le refus de séjour qui leur a été opposé ne peut, en dépit des progrès accomplis dans leur apprentissage de la langue française et de leur investissement dans des activités bénévoles, être regardé comme ayant porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par cette mesure ;

9. Considérant, d'autre part, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser sa situation ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B... avaient, à la date des arrêtés attaqués, uniquement sollicité des titres de séjour en qualité de réfugiés ; que si, ainsi qu'il vient d'être dit, les refus de titre de séjour comportaient une motivation relative à la vie privée et familiale des intéressés, dans le cadre de la vérification par le préfet du respect des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préfet ne peut, ce faisant, être regardé comme ayant examiné le droit au séjour des intéressés au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les requérants ne peuvent, par suite, utilement se prévaloir ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ;

11. Considérant, d'une part, que dans son jugement du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Nancy, après avoir cité ces stipulations ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a mentionné la naissance en France de l'enfant commun des requérants et relevé notamment que les décisions contestées ne faisaient pas obstacle à ce que leur cellule familiale se reconstitue en dehors du territoire français, écartant par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ; qu'il s'en suit que contrairement à ce que soutiennent les épouxB..., ce jugement qui a répondu, de manière suffisante à ce moyen, n'est pas irrégulier ;

12. Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les deux refus de séjour opposés aux épouxB..., n'ont pas pour effet de séparer d'eux leur enfant Advi, qui a vocation à les suivre en dehors du territoire français ; qu'il n'est pas établi que le préfet des Vosges n'aurait pas, à la date à laquelle il a pris ces décisions, tenu compte à cet égard de l'intérêt supérieur de cet enfant en fonction des éléments dont il disposait alors ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les époux B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a refusé d'annuler les refus de séjour qui leur ont été opposés ;

Sur les obligations de quitter le territoire français

14. Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que les décisions obligeant les requérants à quitter le territoire français devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des refus de séjour doit être écarté ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union ; qu'ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant ;

16. Considérant, toutefois, qu'il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union ; que ce droit implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

17. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les circonstances invoquées par les époux B...selon lesquelles le préfet des Vosges ne les aurait pas expressément informés qu'en cas de rejet de leur demande de titre de séjour, ils seraient susceptibles d'être contraints de quitter le territoire français, en les invitant à formuler leurs observations sur cette éventualité, et qu'ils n'auraient pas été auditionnés par les services de la préfecture quant à la possibilité de bénéficier d'un titre de séjour pour motif humanitaire, ne sont pas de nature à permettre de regarder les intéressés comme ayant été privés de leur droit à être entendus ;

19. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes des décisions en litige que le préfet des Vosges se serait estimé à tort en situation de compétence liée pour assortir la décision de refus de titre de séjour d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il n'aurait pas examiné, préalablement à son édiction, les conséquences de décision en litige sur la situation personnelle des épouxB... ;

20. Considérant, en quatrième lieu, que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir directement, à l'appui de leurs recours, des objectifs fixés par l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 dès lors qu'à la date des décisions attaquées, ce texte avait été transposé en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

21. Considérant, en cinquième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 8 ci-dessus, et alors qu'il n'est pas établi, en particulier par le certificat médical daté du 19 janvier 2015, qu'à la date des décisions attaquées, Mme B...présentait un état de santé qui aurait pu faire obstacle à ce que soit prise à son encontre une mesure d'éloignement, ces décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;

22. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les époux B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a refusé d'annuler les décisions les obligeant à quitter le territoire français ;

Sur les décisions fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

23. Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le délai de départ volontaire à trente jours devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des refus de séjour et des décisions d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

24. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 37 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 prise afin d'assurer la transposition de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée: " (...) II Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions législatives, qui ne sont pas en contradiction avec celles de la directive, qu'en dehors de l'hypothèse d'absence de délai de départ volontaire ou de rejet d'une demande expresse d'un délai supérieur à trente jours, la décision fixant le délai de départ volontaire n'a pas le caractère d'une décision devant être motivée au sens de la loi du 11 juillet 1979 ; que dès lors, M. et Mme B... ne peuvent utilement soutenir que les décisions contestées sont insuffisamment motivées ;

25. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet se soit cru lié par le délai de trente jours et n'aurait pas examiné, au vu des pièces dont il disposait, la possibilité de prolonger le délai de départ volontaire accordé à M. et MmeB... ; que, par suite, et en l'absence d'autre élément porté à la connaissance du préfet, ces derniers ne sont pas fondés à soutenir qu'il aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne leur accordant pas un délai plus long ;

26. Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a refusé d'annuler les décisions fixant à trente jours le délai de départ volontaire ;

Sur les décisions fixant le pays de renvoi

27. Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de renvoi devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des décisions précédentes doit être écarté ;

28. Considérant, en deuxième lieu, que les décisions contestées, après avoir notamment visé le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionné la nationalité albanaise des requérants, indique que les intéressés n'ont pas établi être exposés à des peines ou des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Albanie ; que ces décisions qui comportent ainsi des éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement sont donc suffisamment motivées ;

29. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

30. Considérant que M. et Mme B... qui soutiennent avoir subi des menaces et violences en lien avec l'activité politique de M. B...en Albanie, ne produisent pas d'éléments suffisamment probants permettant d'établir la réalité des risques allégués alors d'ailleurs que ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ni la Cour nationale du droit d'asile n'en ont reconnu l'existence ; que par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

31. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

32. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que soient adressées, sous astreinte, diverses injonctions au préfet des Vosges doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

33. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le préfet des Vosges et tendant à la condamnation des requérants sur le fondement des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions du préfet des Vosges présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Mme D...épouse B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Vosges.

4

N° 16NC00344-16NC00352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00352
Date de la décision : 26/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Eric KOLBERT
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-09-26;16nc00352 ?
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