La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/07/2017 | FRANCE | N°16NC01898

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 20 juillet 2017, 16NC01898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre pour la commune d'Oeting le 9 juillet 2013 d'un montant de 21 835,62 euros en vue du recouvrement de la participation pour voies et réseaux liée à l'édification d'un bâtiment autorisé par un permis de construire.

Par un jugement n° 1303990 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le titre exécutoire du 9 juillet 2013.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête enregistrée le 25 août 2016, la commune d'Oeting, représentée par Me D..., demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre pour la commune d'Oeting le 9 juillet 2013 d'un montant de 21 835,62 euros en vue du recouvrement de la participation pour voies et réseaux liée à l'édification d'un bâtiment autorisé par un permis de construire.

Par un jugement n° 1303990 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le titre exécutoire du 9 juillet 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2016, la commune d'Oeting, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303990 du 23 juin 2016 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A...une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune d'Oeting soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé en ce qui concerne le motif d'annulation retenu ;

- la demande de M. A...était tardive et irrecevable ;

- la créance n'était pas prescrite.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 décembre 2016, M.A..., représenté par la Selas Olszak et Levy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune d'Oeting au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que les moyens soulevés par la commune d'Oeting ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 janvier 2017, l'instruction a été close au 6 février 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour M. B...A....

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 8 novembre 2001, le conseil municipal d'Œting a fixé une participation pour voies nouvelles et réseaux d'un montant de 175 661 francs, soit 26 779,35 euros, à la charge de M. A...au titre de l'extension des réseaux basse tension et eau potable de la rue du Mehlpuhl. Le 28 novembre 2001, un permis de construire a été délivré à M. A...pour la construction d'un bâtiment rue du Mehlpuhl mentionnant qu'il devait s'acquitter de la participation précitée. Par un courrier du 10 juillet 2012, la commune d'Œting a rappelé à M. A...qu'un dégrèvement partiel avait été demandé " en son temps " compte tenu des investissements réalisés par ce dernier, ce qui avait donné lieu à un courrier du 7 mars 2005 par lequel la commune avait exigé le versement d'une somme ramenée à 8 700,29 euros. L'intéressé a également été informé que compte tenu du coût global des investissements réalisés par la commune, il ne bénéficierait pas d'une réduction de la somme due au titre de la participation et était invité à prendre ses dispositions avant qu'un titre exécutoire ne lui soit délivré. Un titre exécutoire a été émis le 9 juillet 2013 par la commune d'Œting à l'encontre de M. A...pour un montant de 21 835,62 euros. La commune d'Oeting relève appel du jugement du 23 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le titre exécutoire du 9 juillet 2013.

Sur la régularité du jugement :

2. La commune d'Oeting soutient que les premiers juges ont insuffisamment motivé le point de jugement par lequel ils ont retenu le moyen tiré de la prescription quinquennale applicable à la créance litigieuse.

3. Il ressort toutefois des termes du jugement contesté et notamment de ses points 4 et 5 qu'après avoir énoncé les textes dont il entendait faire application, le tribunal a indiqué de façon suffisamment précise les raisons pour lesquelles la créance visée par le titre litigieux lui apparaissait prescrite au regard des règles posées à l'article 2224 du code civil relatives à la prescription quinquennale, le tribunal ayant indiqué que le délai de cette dernière courait notamment à compter du 19 juin 2008. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement contesté, à le supposer même expressément invoqué par la commune d'Oeting, ne peut dès lors qu'être écarté.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. La commune d'Oeting soutient que la demande de M. A...était tardive.

5. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) 2° L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que M. A...a reçu le titre exécutoire litigieux au plus tôt le 17 juillet 2013 et que l'intéressé l'a contesté par une demande formée le 6 septembre 2013 devant le tribunal. Ainsi et alors même que les actes dont procéderait le titre en cause seraient devenus définitifs, la fin de non recevoir pour tardiveté que la commune oppose à la demande de première instance de M. A...tendant à l'annulation du titre exécutoire du 9 juillet 2013 ne peut qu'être écartée.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

7. Le tribunal a annulé le titre exécutoire du 9 juillet 2013 au motif que la créance de la commune d'Oeting était prescrite en application des dispositions de l'article 2224 du code civil et des dispositions des articles L. 332-11-1 et L. 332-11-2 du code de l'urbanisme.

8. D'une part, aux termes de l'article 2224 du code civil dans sa version issue de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". Aux termes de l'article 26 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 : " Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure " .

9. D'autre part, aux termes de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme : " Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : ... 2° Le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnées à l'article L. 332-6-1 (...) " ...". Aux termes de ce dernier article, dans sa version alors en vigueur, issue de la loi susvisée du 13 décembre 2000 applicable à la date de la délibération attaquée : " Les contributions aux dépenses d'équipements publics prévues au 2° de l'article L. 332-6 sont les suivantes : 2° ... d) La participation au financement des voies nouvelles et réseaux prévue à l'article L. 332-11-1 ". Aux termes de l'article L. 332-11-1 du même code, issu de l'article 46 de la même loi : " Le conseil municipal peut instituer une participation pour le financement de tout ou partie des voies nouvelles et des réseaux réalisés pour permettre l'implantation de nouvelles constructions (...) / Le conseil municipal arrête par délibération pour chaque voie nouvelle et pour chaque réseau réalisé la part du coût des travaux mise à la charge des propriétaires riverains ". Aux termes de l'article L. 332-11-2 du même code, introduit par le même article de la loi précitée : " La participation prévue à l'article L. 332-11-1 est due à compter de la construction d'un bâtiment sur le terrain ". Enfin, aux termes de l'article L. 332-28 du même code, dans sa rédaction issue de la loi précitée : " Les contributions mentionnées ou prévues au 2° de l'article L. 332-6-1... sont prescrites... par l'autorisation de construire. Cette autorisation en constitue le fait générateur (...) ". Il résulte de ces dispositions que la participation qu'un conseil municipal peut instituer pour le financement de voies nouvelles ou des réseaux réalisés afin de permettre l'implantation d'une nouvelle construction ne peut légalement être mise à la charge du pétitionnaire que par l'autorisation de construire.

10. Il résulte de l'instruction que la délivrance du permis de construire et la construction du projet de M. A...ont fait courir à l'égard de la créance communale le délai de la prescription trentenaire de droit commun alors en vigueur en vertu de l'ancien article 2262 du code civil, auquel s'est substitué, en l'absence d'autres dispositions spécifiques applicables, le délai de cinq ans défini à l'article 2224 du code civil dans les conditions fixées par l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 qui énonce que " Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ".

11. La commune, si elle entend opposer l'interruption du délai de prescription quinquennal courant à compter du 19 juin 2008 en invoquant notamment le courrier transmis à M. A...le 27 juillet 2012, ne peut toutefois utilement se prévaloir sur ce point des dispositions de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances détenues sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables au présent litige, la créance litigieuse étant en l'espèce détenue par la commune sur une personne privée.

12. Par ailleurs, la circonstance que M. A...n'ait pas contesté le permis de construire qui lui a été délivré le 28 novembre 2001, alors qu'il exigeait le versement de la participation litigieuse, ou la délibération antérieure posant le principe de cette participation ne saurait avoir pour effet de faire obstacle à l'application des règles relatives à la prescription de la créance communale émanant du code civil et notamment celles de l'article 2224 applicables en l'espèce, la requérante ne se prévalant d'ailleurs d'aucune règle spécifique sur ce point .

13. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que M. A...ait reconnu le droit propre à la créance en cause détenu à son encontre par la commune. Il n'a donc pu de ce fait interrompre de délai de prescription au sens de l'article 2240 du code civil.

14. Enfin, la circonstance que la commune ne connaissait pas le montant précis des travaux à mettre à la charge de M.A..., laquelle découle des conditions dans lesquelles la participation a été mise à la charge de l'intéressé, ne lui permet pas de se prévaloir de l'un des cas dans lesquels le délai de prescription est suspendu au sens de l'article 2234 du code civil qui prévoit que " la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou force majeure ".

15. Il s'ensuit qu'en l'absence de tout élément utilement avancé par la commune, de façon suffisamment précise, de nature à justifier l'interruption ou la suspension du délai courant à compter du 19 juin 2008, le moyen tiré de ce que la créance n'était pas prescrite lorsque le titre exécutoire du 9 juillet 2013 a été émis ne peut qu'être écarté.

16. En conclusion de tout ce qui précède, la commune d'Oeting n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le titre exécutoire du 9 juillet 2013.

Sur les frais d'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune d'Oeting demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

18. En revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la commune d'Oeting le paiement de la somme de 1 500 euros à M. A... au titre des frais que celui-ci a exposés pour sa défense.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Oeting est rejetée.

Article 2 : La commune d'Oeting versera à M. A...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Oeting et à M. B...A....

2

No 16NC01898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01898
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques.

Urbanisme et aménagement du territoire - Contributions des constructeurs aux dépenses d'équipement public.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : BRANCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-20;16nc01898 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award