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08/06/2017 | FRANCE | N°16NC01809

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 juin 2017, 16NC01809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Loisirs et Culture a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 17 juillet 2015 par laquelle le maire de Gandrange a refusé de mettre à sa disposition des locaux communaux ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement no 1506971 du 22 juin 20016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces deux décisions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 août 2016, la commune de Gandrang

e, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1506971 du 22 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Loisirs et Culture a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 17 juillet 2015 par laquelle le maire de Gandrange a refusé de mettre à sa disposition des locaux communaux ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement no 1506971 du 22 juin 20016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces deux décisions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 août 2016, la commune de Gandrange, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1506971 du 22 juin 20016 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de condamner l'association Loisirs et Culture à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'à supporter les entiers frais et dépens.

La commune de Gandrange soutient que :

- le tribunal aurait dû rejeter la demande comme irrecevable dès lors qu'il n'a pas été justifié de l'habilitation du président de l'association à agir en justice ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit, le tribunal ayant introduit une condition non prévue par l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales en exigeant qu'elle justifie de la nécessité de reprendre les locaux jusqu'alors occupés par l'association ;

- les décisions contestées sont légalement fondées sur les nécessités de l'administration des propriétés communales et le fonctionnement des services communaux ;

- le maire a pu légalement mettre fin à la mise à disposition gratuite des locaux dès lors que ceux-ci appartiennent au domaine public communal et que l'autorisation a été donnée à titre précaire et révocable, sans créer de droits à l'association ;

- au motif indiqué dans la décision du 17 juillet 2015 peut être substitué celui tiré de ce que la commune aurait légalement pu exiger le paiement d'une redevance, que l'association s'est elle-même dite dans l'incapacité de payer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2016, l'association Loisirs et Culture, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Gandrange à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association Loisirs et Culture soutient qu'elle a intérêt à agir contre les décisions litigieuses et qu'aucun des moyens soulevés par la commune n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales,

- le code général de la propriété des personnes publiques,

- la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle,

- le code civil local,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Loisirs et Culture bénéficiait, à titre gratuit, de l'usage de 5 garages appartenant à la commune de Gandrange, où elle entreposait son matériel lorsque, par un courrier du 29 septembre 2014, le maire l'a informée de sa décision de mettre fin à cette mise à disposition le 31 décembre 2014 et lui a demandé de libérer les lieux. Le 6 juillet 2015, l'association, qui occupait toujours les lieux, a sollicité la mise à disposition de locaux équivalents. Par une décision du 17 juillet 2015, le maire de la commune de Gandrange a rejeté sa demande et a ensuite implicitement rejeté le recours gracieux formé le 1er septembre 2015 par l'association contre cette décision.

2. La commune de Gandrange relève appel du jugement du 22 juin 2016 par lequel le tribunal administratif a annulé ces deux décisions.

Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal :

3. La commune de Gandrange soutient que c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la demande présentée par l'association Loisirs et Culture, alors que sa présidente n'était pas habilitée à agir en justice par son assemblée générale.

4. Aux termes de l'article 7 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle : " Continuent à être appliquées, telles qu'elles sont encore en vigueur dans les trois départements, à la date fixée à l'article 1er, même en tant qu'elles contiennent des règles de droit civil, les lois locales suivantes : (...) 9° Les articles 21 à 79 du code civil local, ainsi que toutes autres dispositions sur les associations (...) ". Aux termes de l'article 26 du code civil allemand maintenu en application dans les départements du Haut-Rhin, Bas-Rhin et de la Moselle : " L'association doit posséder une direction. La direction peut se composer de plusieurs personnes. / La direction assure la représentation judiciaire et extrajudiciaire de l'association ; elle a la situation d'un représentant légal. L'étendue de son pouvoir de représentation peut être limitée par les statuts avec effet à l'égard des tiers ".

5. Aux termes de l'article 13 des statuts de l'association Loisirs et Culture : " L'association est représentée en justice et dans tous les actes de la vie civile par son président ou à défaut par tout autre membre du comité de direction, spécialement habilité à cet effet par le président ".

6. Ces dispositions confient au président de l'association le pouvoir de la représenter en justice aussi bien en défense que, en l'absence de dispositions expresses contraires, pour agir en son nom. Une habilitation de l'assemblée générale n'était donc pas requise pour que Mme Kindelberg, présidente de l'association, puisse saisir le tribunal en son nom.

7. Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par la commune doit être écartée.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

8. Pour annuler les décisions litigieuses, le tribunal a considéré qu'elles étaient entachées d'erreur de droit, dès lors qu'elles étaient fondées sur un motif qui n'était pas tiré des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services ou du maintien de l'ordre public.

9. Aux termes de l'article L. 2144-3 du code général de collectivités territoriales, alors applicable : " Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande. / Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. / Le conseil municipal fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation ".

10. Il résulte de ces dispositions que la mise à disposition d'un local communal à une association ne peut être légalement refusée que pour des motifs tirés des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public et à condition qu'il ne soit pas porté atteinte au principe d'égalité de traitement entre les personnes intéressées.

11. Selon les termes de la décision du 17 juillet 2015, la demande de mise à disposition de locaux a été rejetée au motif que la commune ne disposait pas de locaux disponibles pour entreposer le matériel de l'association.

12. La commune fait valoir qu'elle ne disposait pas d'autres locaux et qu'elle ne pouvait pas laisser les garages à la disposition de l'association car elle en avait besoin pour entreposer son propre matériel. L'association soutient que ce motif est fallacieux et masque la volonté de la commune de l'évincer de ses locaux en raison du différend qui les opposait et de l'animosité personnelle du maire à son égard.

13. Il est constant qu'un différend est né en 2014 entre la commune et l'association au sujet du concours matériel fourni par cette dernière à diverses manifestations organisées sur le territoire communal. Ce différend est rappelé dans le courrier que la commune a adressé à l'association le 29 septembre 2014 pour l'informer de sa décision de se doter de son propre matériel et de mettre fin à la mise à disposition des garages. Mais, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il ressort des pièces du dossier, notamment des termes de ce courrier, que seule la nécessité de disposer de locaux afin d'entreposer ce matériel a justifié la décision de la commune de mettre fin à la mise à disposition des garages à l'association et non le différend précédemment rappelé.

14. La commune produit d'ailleurs, pour la première fois en appel, des factures datées de juillet 2014, janvier, mars et juin 2015, relatives à des achats de stands et de comptoirs. L'association ne discute pas ces éléments, alors que ces acquisitions correspondent à du matériel utilisé pour des manifestations festives.

15. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, en particulier du bulletin municipal de septembre 2016, que l'association occupait toujours les garages à ce moment-là et que, faute de place ailleurs, la commune entreposait provisoirement son matériel dans des locaux rachetés à une entreprise et destinés à être détruits pour y construire une salle de sport. L'association ne conteste pas ces éléments, qui révèlent le manque de locaux disponibles pour les propres services de la commune.

16. Dans ces conditions, la commune de Gandrange est fondée à soutenir que les décisions ont été prises en raison des nécessités de l'administration des propriétés communales et du fonctionnement des services communaux.

17. Par conséquent, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour les annuler, le tribunal administratif a considéré que les décisions litigieuses étaient entachées d'erreur de droit.

18. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association Loisirs et Culture, tant devant le tribunal que devant elle.

Sur les autres moyens soulevés par l'association Loisirs et Culture :

19. En premier lieu, la violation du principe d'égalité de traitement ne peut pas être utilement invoquée en l'absence de locaux communaux disponibles pour une utilisation par des tiers.

20. En deuxième lieu, la circonstance que l'association soit de bonne foi et ait besoin de ces locaux pour exercer sa mission est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées.

21. En troisième lieu, quand bien même les relations entre la commune et l'association auraient été tendues avant que ne soient prises les décisions litigieuses, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune ait délibérément organisé une pénurie de ses locaux disponibles dans le but de nuire à l'association. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

22. En conclusion de ce tout qui précède, la commune de Gandrange est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 17 juillet 2015 par laquelle le maire de Gandrange a refusé de mettre à la disposition de l'association Loisirs et Culture des locaux communaux, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux. Dès lors, la commune est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gandrange qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'association Loisirs et Culture demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association Loisirs et Culture une somme à verser à la commune de Gandrange au titre de ces mêmes dispositions.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement no 1506971 du 22 juin 20016 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'association Loisirs et Culture devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Gandrange et à l'association Loisirs et Culture.

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N°16NC01809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01809
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-02 Collectivités territoriales. Commune. Biens de la commune.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CHOFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-06-08;16nc01809 ?
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