La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2017 | FRANCE | N°16NC01881

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 09 mars 2017, 16NC01881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., veuveB..., a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 151875 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :<

br>
Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 août 2016 et le 19 février 2017, Mme A...C..., r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., veuveB..., a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 151875 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 août 2016 et le 19 février 2017, Mme A...C..., représentée par Me Dole, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 3 mars 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 4 novembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me Dole, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- le jugement ne répond pas à la totalité de ses arguments venant au soutien du moyen tiré du défaut d'exercice par le préfet de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie avant que le préfet prenne sa décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet, qui s'est borné à relever l'absence de visa de long séjour, n'a pas examiné sa situation d'ascendant à charge d'un ressortissant français qui justifiait qu'il fasse usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- il n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande pour motif médical ;

- alors même qu'elle n'avait pas obtenu de visa pour un séjour supérieur à trois mois, elle remplit les conditions de fond d'octroi d'un titre de séjour en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français ;

- la décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;

- le principe du contradictoire prévu par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne a été méconnu ;

- la décision est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination de la mesure d'éloignement sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 15 novembre 2016, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme C...n'est fondé.

Mme C...a obtenu le bénéficie de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Dhiver a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeD..., veuveB..., ressortissante marocaine née le 1er janvier 1952, relève appel du jugement du tribunal administratif de Besançon du 3 mars 2016 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, Mme C...reprend, avec la même argumentation, son moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision du préfet ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois (...) " ;

4. Considérant que si Mme C...soutient qu'elle avait sollicité un visa de long séjour auprès des autorités consulaires à Casablanca, il est constant qu'elle est entrée en France en octobre 2014 sous couvert d'un visa de court séjour portant la mention " ascendant non à charge " ; qu'au surplus, si la requérante produit des documents montrant que sa fille, de nationalité française, l'aide financièrement tous les mois, elle ne justifie ni être dépourvue de ressources ni que les ressources de sa fille sont suffisantes pour permettre sa prise en charge de manière permanente et intégrale ; que, dès lors, elle ne peut se prévaloir d'un droit au séjour en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant de nationalité française, au sens des dispositions précitées de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des motifs de sa décision, que le préfet du Doubs, qui pouvait légalement refuser à Mme C... la délivrance d'un titre de séjour en sa qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français ou en qualité de visiteur au seul motif qu'elle ne disposait pas d'un visa de long séjour, se serait cru à tort tenu de rejeter la demande de la requérante pour ce seul motif, sans exercer le pouvoir d'appréciation qui lui appartient ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier de la décision contestée, que le préfet se serait estimé lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, ni qu'il n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de Mme C...et de sa demande pour motif médical ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 14 du jugement attaqué, d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation du préfet ;

8. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du séjour des étrangers ne peut être utilement invoqué que par un étranger qui entre effectivement dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, Mme C...ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit ; qu'elle n'est par suite, pas fondée à soutenir que la décision contestée serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière du fait du défaut de consultation de cette commission ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Doubs du 4 novembre 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...n'a jamais été reçue en préfecture, ni lors de l'examen de sa demande de titre de séjour, malgré la demande faite par son avocat le 26 mars 2015, ni avant la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que MmeD..., qui n'a pas bénéficié du droit d'être entendue lors de l'examen de sa demande, est ainsi fondée à soutenir qu'elle a été privée de ce droit qu'elle tient notamment de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est, pour ce motif, entachée d'illégalité ; que l'annulation de cette décision entraîne, par voie de conséquence, l'annulation des décisions fixant un délai de départ volontaire et fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays d'éloignement ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

13. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dole, avocat de MmeD..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dole de la somme de 1 500 euros qu'elle demande ;

D E C I D E :

Article 1er : Les décisions du préfet du Doubs en date du 4 novembre 2015 faisant obligation à Mme C...de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, ainsi que le jugement n° 151875 du tribunal administratif de Besançon du 3 mars 2016 en tant qu'il rejette les conclusions de Mme C...dirigées contre ces décisions sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me Dole, avocat de MmeD..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Dole renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., veuve B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Doubs.

2

N° 16NC001881


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01881
Date de la décision : 09/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-09;16nc01881 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award