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09/03/2017 | FRANCE | N°15NC01610

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 09 mars 2017, 15NC01610


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Nancy à lui verser une somme de 23 458,99 euros en réparation du préjudice financier qu'il estime avoir subi dans sa carrière du fait d'une discrimination syndicale.

Par un jugement n° 1301908 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 10 juillet 2

015, 28 juin 2016 et 7 octobre 2016, M.F..., représenté par MeC..., demande à la cour dans le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Nancy à lui verser une somme de 23 458,99 euros en réparation du préjudice financier qu'il estime avoir subi dans sa carrière du fait d'une discrimination syndicale.

Par un jugement n° 1301908 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 10 juillet 2015, 28 juin 2016 et 7 octobre 2016, M.F..., représenté par MeC..., demande à la cour dans le dernier état de ses conclusions :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 13 mai 2015 ;

2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Nancy à lui verser la somme de 45 151,83 euros en réparation des préjudices subis du fait d'une discrimination syndicale ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Nancy la somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il apporte des éléments sérieux susceptibles de faire présumer qu'il a fait l'objet d'une discrimination dans sa progression de carrière en raison de son appartenance syndicale ;

- pour l'appréciation des critères de promotion, le décompte de son ancienneté devait être effectué en prenant en compte l'année de service national ;

- il a subi un préjudice financier qui, après actualisation, s'élève à 40 151,83 euros ;

- son préjudice moral doit être réparé par le versement d'une indemnité de 5 000 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 novembre 2015, 16 septembre 2016 et 25 novembre 2016, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'autorité relative de la chose jugée s'oppose à ce qu'il soit de nouveau statué sur la demande de M. F...relative à la prise en compte de la période passée sous les drapeaux ;

- les autres moyens soulevés par M. F...ne sont pas fondés ;

- ses dernières conclusions indemnitaires sont irrecevables en tant qu'elles excèdent le montant demandé en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 février 1986 ;

- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

- le décret n° 89-241 du 18 avril 1989 ;

- le décret n° 2007-1188 du 3 août 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., substituant MeC..., pour M. F...et de Me A..., substituant MeE..., pour le centre hospitalier universitaire de Nancy.

1. Considérant que M.F..., né le 9 octobre 1958, a été recruté une première fois par le centre hospitalier universitaire de Nancy en qualité de contractuel comme manoeuvre spécialisé le 15 mars 1977 ; qu'à l'issue de sa période de service national, il a réintégré le centre hospitalier universitaire de Nancy, au sein duquel il a été affecté à des fonctions de brancardier et a bénéficié du statut local des aides-soignants brancardiers créé le 1er janvier 1978 ; qu'après une période probatoire d'un an, il a été titularisé dans le grade d'aide-soignant brancardier de classe normale le 9 février 1980 ; que M.F..., qui considère avoir été victime d'une discrimination dans le déroulement de sa carrière en raison de son appartenance syndicale, a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Nancy à lui verser la somme de 23 458,99 euros en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi ; qu'il relève appel du jugement du 13 mai 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande ; que, dans le dernier état de ses écritures, M. F...a actualisé son préjudice de carrière en le portant à la somme de 40 151,83 euros et a demandé réparation d'un préjudice moral chiffré à 5 000 euros ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions (...) syndicales (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de (...) ses convictions, (...) une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable. (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 de cette même loi, dans sa version applicable au litige : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. " ;

3. Considérant que, de manière générale, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction ; que cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes ; que, s'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

4. Considérant, d'autre part, que le statut particulier des aides-soignants était régi par le décret du 18 avril 1989, abrogé le 31 décembre 2008 et remplacé par le décret du 3 août 2007 ; qu'il résulte des dispositions des articles 4 et 4-1 du décret du 18 avril 1989 et de l'article 13 du décret du 3 août 2007 que la promotion au grade d'aide-soignant de classe supérieure et au grade d'aide-soignant de classe exceptionnelle intervient dans les conditions prévues au 1° de l'article 69 de la loi du 9 janvier 1986 ; qu'aux termes de cet article : " (...) l'avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : 1° Au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire par appréciation de la valeur professionnelle des agents ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, que la promotion au grade d'aide-soignant de classe supérieure et de classe exceptionnelle s'effectue au choix, par appréciation de la valeur professionnelle des agents ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour établir les tableaux d'avancement au grade d'aide-soignant brancardier de classe supérieure des années 1999 à 2006 et les tableaux d'avancement au grade d'aide-soignant brancardier de classe exceptionnelle des années 2007 à 2014, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy a retenu les critères de l'expérience et de la valeur professionnelle, appréciés en fonction de l'ancienneté dans le corps et dans le grade et de la notation ; qu'il ressort des éléments fournis par le centre hospitalier qu'il a également pris en compte la proximité d'un départ à la retraite ;

6. Considérant que M.F..., nommé dans le grade d'aide-soignant brancardier de classe normale le 9 février 1980, a été promu au grade d'aide-soignant brancardier de classe supérieure le 1er janvier 2006 puis au grade d'aide-soignant brancardier de classe exceptionnelle le 1er janvier 2014 ; que M.F..., qui se compare aux autres agents entrés dans le corps des aides-soignants brancardiers en 1978, soutient qu'il a été victime d'un ralentissement dans la progression de sa carrière en raison de son appartenance syndicale ;

7. Considérant que M.F..., qui se borne à faire état de son adhésion à la CGT-FO, n'apporte aucun élément permettant de présumer que cet engagement syndical, à le supposer établi et connu de l'administration, a été l'un des motifs pris en compte par le centre hospitalier régional universitaire de Nancy lors de l'établissement des tableaux d'avancement des années 1999 à 2005 et des tableaux d'avancement au grade d'aide-soignant brancardier de classe exceptionnelle des années 2007 à 2013 ; qu'il résulte en revanche de l'instruction que ces tableaux d'avancement ont été constitués en tenant compte des seuls critères combinés de l'expérience et de la valeur professionnelles ainsi que de la proximité d'un départ à la retraite énoncés par le centre hospitalier ; qu'à supposer que des agents légèrement moins bien notés que M. F...ont été promus avant lui, la notation n'a pas été le critère exclusif retenu pour apprécier la valeur professionnelle des agents ; que, si M. F...remplissait les conditions statuaires pour être promu en classe supérieure avant 2006 et si le temps passé par lui en classe normale a été supérieur à celui d'autres agents, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy n'a procédé à aucune discrimination fautive en promouvant l'intéressé, compte tenu des critères de promotion qu'il avait fixés et du nombre d'agents susceptibles d'être promus chaque année au cours de la période, au grade d'aide-soignant brancardier de classe supérieure le 1er janvier 2006 ; qu'il en est de même pour la promotion de M. F...au grade d'aide-soignant brancardier de classe exceptionnelle qui, compte tenu également du nombre de postes ouverts chaque année, n'a pu intervenir avant le 1er janvier 2014 ;

8. Considérant, en outre, que M. F...reproche au centre hospitalier régional universitaire de Nancy de ne pas avoir pris en compte sa période de service national, effectuée du 1er février 1978 au 1er février 1979, dans le décompte de son ancienneté dans le corps ; que, toutefois, par un jugement n° 0400985 du 31 mai 2005, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande du requérant tendant à la réparation du préjudice qu'il estimait avoir subi de ce fait ; que l'autorité relative de la chose jugée, qui s'attache à ce jugement eu égard à la triple identité d'objet, de cause et de parties, fait obstacle à ce qu'il soit de nouveau statué sur ce grief ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir partielle opposée par le centre hospitalier régional universitaire de Nancy, que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Nancy, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. F... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F...le versement de la somme que le centre hospitalier régional universitaire de Nancy demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier régional universitaire de Nancy présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F...et au centre hospitalier régional universitaire de Nancy.

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N° 15NC01610


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01610
Date de la décision : 09/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Égalité devant le service public - Égalité de traitement des agents publics.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Droit syndical.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : CABINET FILOR - JURI-FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-09;15nc01610 ?
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