La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2017 | FRANCE | N°15NC00357

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 02 mars 2017, 15NC00357


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2007.

Par un jugement n° 1101879 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2015, MmeA..., représentée par

MeB..., demande à l

a cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 décembre 2014 ;

2°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2007.

Par un jugement n° 1101879 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2015, MmeA..., représentée par

MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 décembre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2007 ;

3°) de condamner l'Etat au remboursement des sommes versées assorties des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'administration ne pouvait, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de son unique client, la société Rohr Environnement, se faire communiquer le livre de police qui ne constitue pas une pièce comptable ;

- l'administration ne lui a pas remis la copie des originaux des documents obtenus auprès de cette société, mais celle d'un nouveau document constitué de toute pièce par le vérificateur, sur lequel elle n'a indiqué qu'une partie des renseignements figurant sur les documents de la société Rohr Environnement ;

- l'exercice par l'administration de son droit de communication n'a par ailleurs pas préservé son anonymat ;

- l'argumentation de l'administration n'est étayée que par les allégations des employées de la société Rohr ainsi que par les éléments du livre de police de cette société qui n'est pas rigoureusement tenu et peut facilement être modifié ; l'administration ne peut opposer utilement au contribuable des informations recueillies auprès d'un tiers dans le cadre de son droit de communication que si ces éléments sont corroborés par des constatations propres à son entreprise, à ses activités ou à sa situation ;

- la qualification d'activité occulte n'est pas suffisamment motivée dans la proposition de rectification, ce qui ne permettait pas à l'administration l'extension du délai de prescription à six années ;

- l'administration a manqué à son devoir de loyauté en utilisant les éléments obtenus lors de l'utilisation de son droit de communication uniquement à charge et en " spoliant " les documents obtenus auprès de la société Rohr Environnement d'éléments importants, tels que les quantités livrées par Mme A...;

- l'administration ne pouvait se dispenser de lui adresser une mise en demeure de déposer une déclaration annuelle de chiffre d'affaires dès lors qu'elle s'était fait connaître d'un centre de formalités des entreprises antérieurement à la notification des rectifications ;

- son imposition au titre des bénéfices industriels et commerciaux n'est pas justifiée dès lors qu'elle n'a pas la qualité de commerçant en application des articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de commerce, les métaux vendus lui ayant été remis à titre gratuit ;

- la version du livre de police de la société Rohr Environnement présentée par l'administration ne comporte pas l'ensemble des mentions exigées par les dispositions du code pénal et ne précise pas, pour l'ensemble des années en litige, la quantité de biens livrés ; compte-tenu des irrégularités affectant sa tenue, s'agissant notamment du renseignement des livraisons de Mme A...sous trois identités distinctes, de l'incohérence des quantités prétendument livrées et du nombre de livraisons effectuées, il ne pouvait fonder les rectifications opérées ; le tribunal n'a d'ailleurs sur ce point pas tiré les conséquences de l'autorité de la chose jugée au pénal par le tribunal de grande instance de Colmar, lequel a considéré que le produit de la vente ne pouvait être précisément établi ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 4 mai 2016, Mme A...conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code pénal ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot,

- et les conclusions de Mme Peton-Philippot , rapporteur public,

1. Considérant qu'à la suite de l'engagement d'une instance pénale diligentée dans le cadre d'une enquête pour des faits de travail dissimulé à raison desquels Mme A...a été condamnée par le tribunal correctionnel de Colmar par jugement du 6 avril 2010, l'administration fiscale a, au cours de l'enquête et dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du ministère public, obtenu des informations permettant de considérer que l'intéressée avait exercé, à titre habituel et de manière occulte, pendant plusieurs années et jusqu'à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés le 1er juin 2007, une activité de négoce de ferrailles ; que l'administration a procédé à une vérification de comptabilité relative à la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2007 ; que le service a également exercé un droit de communication auprès de la société Rohr Environnement à Colmar, unique cliente de

MmeA..., sur le fondement des articles L. 81 et L.85 du livre des procédures fiscales ; que par une proposition de rectification du 27 février 2009, l'administration a notifié à l'intéressée les rehaussements envisagés en matière de bénéfices industriels et commerciaux selon la procédure d'évaluation d'office ; que Mme A...relève appel du jugement du 11 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2007 ;

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions supplémentaires au titre des années 2004 à 2006 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, l'administration peut évaluer d'office les bénéfices imposables selon un régime de bénéfice réel qu'un contribuable tire d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale lorsqu'il n'a pas déposé la déclaration annuelle afférente à ces revenus dans le délai légal ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 68 du même livre, auxquelles celles de l'article L. 73 renvoient, cette procédure n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure ; que, toutefois, aux termes de l'article L. 68 susmentionné, dans sa rédaction applicable à la présente procédure, " il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable (...)ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si elles autorisent l'administration à imposer selon la procédure d'évaluation d'office les bénéfices industriels ou commerciaux qu'un contribuable a omis de déclarer sans adresser à ce contribuable une mise en demeure de régulariser sa situation préalablement à la notification des redressements dans les cas qu'elles énumèrent limitativement, elles ne la dispensent pas d'envoyer une telle mise en demeure au contribuable qui s'est fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce antérieurement à la notification des redressements dès lors que sa déclaration d'activité, quand bien même elle comporterait des erreurs ou des omissions, notamment en ce qui concerne la date à laquelle l'activité a débuté, mentionne l'adresse à laquelle le contribuable peut être joint et l'activité industrielle, commerciale ou artisanale qui motive l'inscription ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, consécutivement à l'examen des documents de l'enquête pénale, l'administration a estimé que Mme A...avait exercé à titre habituel une activité de négoce de ferrailles au moins depuis l'année 2003 avant de s'immatriculer au registre du commerce le 1er juin 2007, et a procédé à l'évaluation d'office du bénéfice imposable tiré de cette activité ; qu'elle lui a notifié à cet effet, le 27 février 2009, une proposition de rectification concernant, notamment les années 2004 à 2006, sans lui avoir préalablement adressé une mise en demeure de régulariser sa situation ; que si l'administration a accordé à l'intéressée des garanties propres à la procédure contradictoire, telles qu'un droit de réponse du contribuable, un délai supplémentaire de trente jours pour formuler des observations à la suite de la notification de la proposition de rectification ou encore la faculté de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il résulte de l'instruction et notamment des termes mêmes de la proposition de rectification, que l'administration n'a pas renoncé à la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office ; que d'ailleurs la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires s'est déclarée incompétente pour connaître du litige en raison précisément de la mise en oeuvre par l'administration de ladite procédure d'imposition d'office ; qu'il s'ensuit que, dès lors que Mme A...s'était fait connaître d'un centre de formalités des entreprises le 1er juin 2007, soit antérieurement à la notification de l'avis l'informant de l'engagement d'une vérification de comptabilité le 13 octobre 2008, l'administration ne pouvait s'abstenir de la mettre préalablement en demeure de souscrire une déclaration de bénéfices au titre des années en cause, alors même que la déclaration a été faite au centre de formalités des entreprises postérieurement au commencement de l'activité et qu'elle comporte une date de début d'activité inexacte ; que la requérante est dès lors fondée à soutenir, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, que les impositions supplémentaires dues au titre des années 2004 à 2006 ont été établies selon une procédure irrégulière ;

Sur les conclusions à fin de décharge de l'imposition supplémentaire au titre de

l'année 2007 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, que la requérante reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés du défaut de communication des documents obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, de l'absence de préservation de son anonymat et du défaut de loyauté de l'administration ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le tribunal administratif de Strasbourg dans son jugement du 11 décembre 2014 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la requérante n'est pas fondée à se prévaloir utilement de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, lesquelles ne sont pas applicables dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office des revenus imposables ; qu'à supposer même que Mme A...ait entendu arguer d'un défaut de motivation de la proposition de rectification du 27 février 2009 en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 du même code, il résulte de l'instruction que les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination ont été portées à sa connaissance trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, intervenue le 31 mai 2010, conformément à ces dispositions ; que le moyen doit dès lors être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. Le droit prévu au premier alinéa s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. (...). " ; que son article L. 85 dispose que : " Les contribuables doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les livres dont la tenue est rendue obligatoire par les articles L123-12 à L123-28 du code de commerce ainsi que tous les livres et documents annexes, pièces de recettes et de dépenses. (...) " ; que

l'article 321-7 du code pénal, dans sa rédaction alors applicable, prévoit que : " Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30000 euros d'amende le fait, par une personne dont l'activité professionnelle comporte la vente d'objets mobiliers usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font le commerce, d'omettre, y compris par négligence, de tenir jour par jour, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, un registre contenant une description des objets acquis ou détenus en vue de la vente ou de l'échange et permettant l'identification de ces objets ainsi que celle des personnes qui les ont vendus ou apportés à l'échange. (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le droit de communication exercé auprès des entreprises industrielles ou commerciales a seulement pour objet de permettre à l'administration fiscale, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé ; que les documents dont la communication peut être demandée par l'administration fiscale comprennent non seulement les documents comptables et financiers, mais aussi les documents de toute nature pouvant justifier le montant des recettes et dépenses ;

8. Considérant que l'administration fiscale a fait usage de son droit de communication auprès de la société Rohr Environnement, unique cliente de MmeA..., afin que cette dernière lui communique une copie du compte fournisseur ferrailles ouvert au nom de A...Marie-Raymonde, A...Alex et Fouchard Delphine, au titre des années 2002 à 2007 ; qu'en réponse la société a transmis au service les extraits du registre de police qu'il lui incombe de tenir en application des dispositions précitées de l'article 321-7 du code pénal, lesdits extraits ayant permis de relever le montant des différents règlements effectués à l'adresse de la requérante au cours des années en cause à l'occasion des livraisons de ferrailles ; que ces extraits, qui comportaient les renseignements sollicités, constituaient des documents existants se rapportant à l'activité professionnelle de Mme A...et se rattachant à sa comptabilité ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, ces documents étaient susceptibles d'être obtenus par l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L 85 du livre des procédures fiscales sans entacher la procédure d'imposition d'irrégularité ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante soutient que le service a méconnu les dispositions combinées des articles L. 73 et L 68 du livre des procédures fiscales précités dès lors qu'il a mis en oeuvre la procédure d'évaluation d'office au titre de l'année 2007 sans avoir préalablement mis en demeure la contribuable de régulariser sa situation ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'une mise en demeure a été effectivement notifiée à Mme A...le 16 octobre 2008, aux fins de régulariser le dépôt d'une déclaration annuelle de son chiffre d'affaires pour l'exercice clos au 31 décembre 2007, à laquelle elle n'a cependant pas donné suite ; que dès lors le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées manque en fait et doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :

10. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 34 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années litigieuses : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale (...) " ; que l'accomplissement à titre professionnel d'actes réputés " de commerce " par la loi commerciale est une activité commerciale au sens de ces disposi-tions ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour exercer son activité occulte de négoce de ferrailles, Mme A...s'approvisionnait auprès de son ancien employeur, la société Vossloh Schwabe, qui lui remettait des métaux dont elle n'avait plus l'usage ; qu'il est constant que cette activité a été exercée à titre habituel par l'intéressée et dans un but lucratif ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que, compte tenu de la nature et des modalités de l'activité dont s'agit, l'administration a considéré que Mme A...avait exercé une activité commerciale et a imposé les revenus tirés de cette activité pour l'année en litige dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, nonobstant la circonstance, à la supposer établie, que les marchandises qu'elle a vendues lui auraient été remises à titre gratuit et n'auraient pas donné lieu à une opération d'achat et de revente ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version applicable aux années litigieuses : " (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) " ; que l'article L. 193 du livre des procédures fiscales dispose que : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. " ;

13. Considérant que, pour déterminer les recettes de Mme A...au cours de l'année en litige, l'administration s'est fondée sur les fichiers qui lui avaient été transmis par la société Rohr Environnement et qui provenaient de son livre de police ; que Mme A...soutient que le livre de police de la société Rohr Environnement était dépourvu de valeur probante aux motifs qu'il n'avait pas été coté et paraphé par le commissaire de police ou par le maire de la commune, qu'il ne mentionnait pas toujours les quantités de métaux livrées, qu'il indiquait qu'elle avait procédé à des livraisons avec un véhicule, immatriculé 4802 TP 68, jusqu'en mai 2007, alors que ce véhicule avait été cédé le 2 février 2007, et qu'il comportait des incohérences par rapport au livre de police versé à la procédure pénale ;

14. Considérant toutefois, qu'ainsi qu'il a été développé ci-dessus, ledit registre de police avait été régulièrement transmis à l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication ; qu'à supposer même qu'il n'ait pas comporté l'ensemble des mentions exigées par les textes applicables, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que l'administration en utilisât les éléments qui lui paraissaient acceptables, alors en outre que ce registre n'avait pas été déclaré illégal par le juge pénal ;

15. Considérant que la requérante, qui a eu accès aux pièces de la procédure pénale, ne produit aucun élément permettant d'établir que les fichiers ayant permis de reconstituer son chiffre d'affaires au cours de l'année 2007 différaient du livre de police tenu par la société Rohr Environnement, laquelle n'était pas tenue d'indiquer les quantités de métaux qui lui avaient été

livrées ; que si Mme A...produit un certificat de cession pour démontrer qu'elle aurait vendu le véhicule immatriculé 4802 TP 68 le 2 février 2007, ce document n'est en tout état de cause pas de nature, à lui seul, à établir qu'elle aurait cessé d'approvisionner la société Rohr Environnement, alors qu'il résulte de l'audition des employées de cette société que lesdites livraisons se sont poursuivies ; que les seules allégations de la requérante sur le nombre de livraisons quotidiennes qu'elle effectuait et la supposée surestimation des quantités transcrites par les employées de la société Rohr Environnement, qui ne sont étayées par aucun élément probant, ne sont pas davantage de nature à remettre en cause les éléments sur lesquels l'administration s'est fondée pour reconstituer ses recettes, compte tenu de la très faible distance séparant l'entreprise d'approvisionnement des métaux de la société Rohr, et alors qu'il n'est pas contesté que les règlements étaient régulièrement globalisés en fin de semaine ; qu'en se bornant à faire valoir que la reconstitution opérée à partir du seul livre de police est critiquable, sans proposer aucune autre méthode d'évaluation permettant d'appréhender avec plus de précision la reconstitution de ses recettes, la requérante, à qui incombe la charge de la preuve en vertu des dispositions précitées de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, n'établit pas que l'évaluation de son chiffre d'affaires au cours de l'année en litige ait été exagérée ;

En ce qui concerne les pénalités :

16. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux pénalités en litige : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte . (...) " ;

17. Considérant, en premier lieu, que, par un jugement du 6 avril 2010, devenu définitif, le tribunal correctionnel de Colmar a condamné Mme A...à une peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 5 000 euros pour l'exécution d'un travail dissimulé du 1er janvier 2006 à la fin du mois de mai 2007 ; que les constatations de fait contenues dans ce jugement, qui sont le support nécessaire de son dispositif, s'imposent au juge administratif avec l'autorité absolue de la chose jugée au pénal ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration a appliqué la pénalité de 80 % aux bénéfices réalisés par Mme A...au cours des mois de janvier 2007 à mai 2007, nonobstant la déclaration faite par la requérante de son activité au centre de formalités des entreprises avant l'envoi de la proposition de rectification ;

18. Considérant, en second lieu, que MmeA..., qui n'avait déclaré aucun bénéfice industriel et commercial au titre de l'exercice 2007 dans le délai de trente jours à compter de la notification le 16 octobre 2008 d'une mise en demeure, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a appliqué la pénalité de 40 %, prévue par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts, aux droits qu'elle a rappelés au titre de cet exercice ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que Mme A...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006 ;

Sur les conclusions à fin de remboursement des sommes versées assorties des intérêts moratoires :

20. Considérant que les conclusions accessoires aux fins de remboursement des sommes versées assorties des intérêts moratoires sont en tout état de cause dépourvues d'objet en l'absence de litige né et actuel avec le comptable du Trésor concernant un tel remboursement, et doivent dès lors être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Mme A...est déchargée des cotisations supplémentaires d''impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 décembre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 2 février 2017, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Etienvre, président assesseur,

Mme Didiot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mars 2017.

Le rapporteur,

Signé : S. DIDIOT Le président,

Signé : J. MARTINEZ

La greffière,

Signé : S. GODARD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. GODARD

2

N° 15NC00357


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00357
Date de la décision : 02/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : ALSACE OMNIJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-02;15nc00357 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award