Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, dans le dernier état de ses écritures, d'annuler l'arrêté en date du 17 décembre 2013 par lequel le ministre de la culture et de la communication a modifié les conditions de son reclassement dans le corps des attachés d'administration depuis le 1er janvier 2010 et d'enjoindre à l'administration de lui rembourser la somme de 1 629 euros au titre de la période du 1er octobre 2013 au 31 août 2014 et de ne pas mettre à sa charge la somme de 1 603,40 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 octobre 2012.
Par un jugement n° 1402188 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2015 et le 9 juin 2016, Mme C...A..., représentée par la SCP B...- Delval - Creusat et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 octobre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2013 ;
3°) d'enjoindre au ministre de la culture et de la communication de lui rembourser la somme de 1 629 euros au titre de la période du 1er octobre 2013 au 31 août 2014 et de ne pas mettre à sa charge la somme de 1 603,40 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 octobre 2012 ;
4°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme tardive dès lors que l'arrêté du 17 décembre 2013 ne mentionne pas l'ensemble des voies et délais de recours au sens de l'article R. 421-5 du code de justice administrative et que la décision du 11 février 2014 rejetant son recours gracieux ne rappelle pas ces voies et délais de recours ;
- l'arrêté du 8 janvier 2010 prononçant son détachement au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration est une décision créatrice de droit qui ne pouvait plus être retirée ;
- ce reclassement au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration, qui n'est pas entaché d'irrégularité, est justifié par la circonstance que la grille indiciaire applicable au corps des professeurs des écoles, auquel elle appartient, est plus favorable que celle des attachés d'administration et que son détachement a pour effet de lui faire perdre le bénéfice des congés scolaires ;
- l'arrêté contesté omet de mentionner son ancienneté conservée de 3 ans, 10 mois et 4 jours au 27 février 2006 dans le 8ème échelon du grade de professeur des écoles.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2016, le ministre de la culture et de la communication conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la demande présentée par Mme A...devant les premiers juges est tardive ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 2005-1215 du 26 septembre 2005 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour MmeA....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., professeur des écoles de classe normale, a été détachée, à compter du 1er février 2002, auprès du centre national de documentation pédagogique, en vue d'une affectation au centre régional de Champagne-Ardenne ; que, par un arrêté pris le 8 janvier 2010, Mme A...a ensuite été détachée pour une durée de trois ans, à compter du 1er janvier 2010, auprès du ministère de la culture et de la communication et classée au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration ; que, par un arrêté du 17 décembre 2013, le ministre de la culture et de la communication a renouvelé le détachement de Mme A...pour une durée de deux ans et reclassé l'intéressée au 10ème échelon du grade d'attaché d'administration à compter du 1er janvier 2010, puis au 11ème échelon de ce grade à compter du 1er novembre 2012 ; qu'après avoir exercé une recours gracieux devant l'administration, Mme A...a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 décembre 2013 et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme de 1 629 euros au titre de la période du 1er octobre 2013 au 31 août 2014 et de ne pas mettre à sa charge la somme de 1 603,40 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 octobre 2012 ; que, par un jugement du 20 octobre 2015 dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande pour tardiveté ;
Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; que l'administration n'est, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais de recours administratifs préalables obligatoires ; que si elle peut y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, c'est à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif ;
3. Considérant que l'arrêté du 17 décembre 2013 mentionne que " la présente mesure peut être contestée, par voie de recours administratif devant l'autorité administrative compétente ou par voie de recours contentieux devant la juridiction administrative compétente, dans le délai de deux mois à compter de sa notification " ; qu'un tel libellé qui semblait ouvrir à Mme A...le droit d'exercer, de façon seulement alternative, un recours administratif ou un recours contentieux dans un même délai de deux mois, alors que le premier de ces recours, s'il était exercé dans un délai de deux mois, n'interdisait pas à l'intéressée d'exercer ensuite un recours contentieux dans un nouveau délai de deux mois à compter de la notification de la décision, expresse ou implicite, rendue sur son recours administratif, présente une ambiguïté qui a été de nature à induire la requérante en erreur ; que, dans les circonstances de l'espèce, cette ambiguïté n'a pu être levée par la décision du 21 mars 2014 rejetant le recours gracieux de MmeA..., faute pour cette décision de rappeler les voies et délais de recours contentieux ; que, dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir qu'en l'absence de mention régulière des voies et délais de recours dans l'arrêté contesté, sa demande n'était pas tardive lorsque celle-ci a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 17 novembre 2014 ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge (...) " ;
5. Considérant que, contrairement à ce que soutenait le ministre de la culture et de la communication devant les premiers juges, la demande présentée par Mme A...mentionne de façon suffisamment précise les faits, moyens et conclusions dont elle entendait saisir le tribunal administratif ; que, reprenant les arguments exposés dans son recours administratif, elle soutenait notamment que l'arrêté du 8 janvier 2010 procédant à son reclassement initial dans le grade d'attaché d'administration revêtait le caractère d'une décision créatrice de droits lui accordant un avantage financier que l'administration ne pouvait plus retirer une fois passé le délai de quatre mois suivant son édiction ; qu'ainsi, la demande de Mme A...était suffisamment motivée ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande comme irrecevable ; que son jugement en date du 20 octobre 2015 doit, dès lors, être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... ;
Sur la légalité de l'arrêté du 17 décembre 2013 :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 27 du décret du 26 septembre 2005 portant dispositions statutaires communes applicables aux corps des attachés d'administration et à certains corps analogues, dans sa version applicable au litige : " Peuvent être placés en position de détachement dans un corps d'attachés d'administration les fonctionnaires appartenant à un corps ou à un cadre d'emplois classé dans la catégorie A ou de même niveau. / Le détachement est prononcé à équivalence de grade et à l'échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont l'intéressé bénéficiait dans son grade d'origine. / Le fonctionnaire détaché conserve, dans la limite de l'ancienneté moyenne exigée à l'article 22 pour une promotion à l'échelon supérieur, l'ancienneté d'échelon acquise dans son précédent grade lorsque l'augmentation de traitement consécutive à son détachement est inférieure ou égale à celle qui aurait résulté d'un avancement d'échelon dans son grade d'origine ou à celle qui a résulté de sa promotion au dernier échelon lorsqu'il a déjà atteint l'échelon terminal de son grade d'origine (...) " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., professeur des écoles de classe normale alors classée au 6ème échelon de son grade, a été détachée, à compter du 1er février 2002, auprès du centre national de documentation pédagogique qui, par une décision du 18 février 2002, a prévu que l'intéressée serait " rangée pour la détermination de son traitement au 8ème échelon des professeurs des écoles classe normale (IB 634 - INM 530) " puis, par une décision du 31 janvier 2007, a fixé le niveau de rémunération de l'intéressée au 9ème échelon de son grade de professeur des écoles de classe normale, avec effet au 1er août 2006 ; que si, au vu de cette dernière décision, le ministre de la culture et de la communication a, par un arrêté pris le 8 janvier 2010, classé Mme A...au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration à la date de son détachement, soit le 1er janvier 2010, il ressort de l'arrêté du 9 juillet 2010 établi par le bureau de la gestion des ressources humaines des enseignants du premier degré du ministère de l'éducation nationale que Mme A...était classée, à cette même date, au 8ème échelon de son grade de professeur des écoles de classe normale ; qu'eu égard à l'ancienneté conservée par Mme A...dans cet échelon depuis le 27 février 2006, et à l'indice net majoré de 531 dont celui-ci est pourvu, l'intéressée ne pouvait être classée, en application des dispositions précitées de l'article 27 du décret du 26 septembre 2005, qu'au 10ème échelon du grade d'attaché d'administration à la date du 1er janvier 2010 puis au 11ème échelon de ce grade à compter du 1er novembre 2012 ; que la seule circonstance que l'arrêté contesté du 17 décembre 2013 ne rappelle pas l'ancienneté conservée par la requérante au 8ème échelon de son grade d'origine n'est pas de nature à établir que le ministre de la culture et de la communication aurait omis de prendre en compte cette ancienneté pour fixer son échelon de reclassement dans le grade d'attaché d'administration, dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 27 du décret du 26 septembre 2005 ; que Mme A... ne saurait se prévaloir ni des conditions de rémunération qui étaient les siennes dans les services du centre national de documentation pédagogique, lesquelles étaient fixées par référence à un échelon supérieur à celui qui était effectivement le sien dans son grade d'origine, ni de la circonstance que son détachement aurait pour effet de lui faire perdre le bénéfice des congés scolaires ; qu'ainsi, Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'eu égard à l'échelon détenu dans son grade de professeur des écoles de classe normale, elle devait être classée au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration à la date du 1er janvier 2010 ;
9. Considérant, en revanche, qu'une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage et ne peut être retirée, sauf dispositions législatives contraires ou demande en ce sens de l'intéressé, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté du 17 décembre 2013 qui reclasse Mme A...au 10ème échelon du grade d'attaché d'administration à compter du 1er janvier 2010 et au 11ème échelon de ce même grade à compter du 1er novembre 2012 a pour effet de retirer l'arrêté du 8 janvier 2010 en tant que celui-ci classait l'intéressée au 11ème échelon dès le 1er janvier 2010 et lui permettait de bénéficier du niveau de rémunération afférent à cet échelon entre le 1er janvier 2010 et le 30 octobre 2012 ; qu'il est constant que Mme A... a bénéficié dès le 1er janvier 2010 d'une rémunération calculée sur la base du 11ème échelon du grade d'attaché d'administration ; que dans ces conditions, les circonstances que Mme A...ne détenait pas, en sa qualité de professeur des écoles de classe normale, l'ancienneté permettant légalement, dès le début de son détachement le 1er janvier 2010, un classement au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration et que l'administration d'accueil se soit fondée, pour procéder à un tel classement, sur les décisions prises par le centre national de documentation pédagogique fixant sa rémunération à un échelon supérieur à celui qui était effectivement le sien dans son corps d'origine, ne suffisent pas à faire regarder le classement prononcé par l'arrêté du 8 janvier 2010 comme résultant, à l'évidence, d'une pure erreur matérielle, privant ledit arrêté de toute existence légale et ôtant à celui-ci tout caractère créateur de droits au profit de l'intéressée ; que dès lors, l'arrêté du 8 janvier 2010, quand bien même il serait illégal en tant qu'il classe l'intéressée au 11ème échelon dès le 1er janvier 2010, ne pouvait plus être retiré le 17 décembre 2013, plus de quatre mois après son édiction ; qu'ainsi, l'arrêté du 17 décembre 2013 est entaché d'illégalité en tant qu'il procède à un tel retrait ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...est seulement fondée à soutenir que l'arrêté 17 décembre 2013 doit être annulé en tant qu'il retire l'arrêté du 8 janvier 2010 la classant au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration pour la période du 1er janvier 2010 au 30 octobre 2012 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive (...) " ;
13. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de la décision du 21 mars 2014 rejetant le recours administratif de MmeA..., que le ministre de la culture et de la communication a émis à son encontre un titre de perception afin de recouvrer le trop perçu de 1 603,40 euros résultant de ce que l'intéressée a été indûment rémunérée, pour la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2012, sur la base du 11ème échelon du grade d'attaché d'administration ; qu'eu égard aux dispositions précitées de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, l'annulation par le juge du retrait de la décision illégale attribuant un avantage financier à l'agent au motif qu'il est intervenu postérieurement à l'expiration du délai de retrait n'implique pas nécessairement qu'il soit enjoint à l'administration de s'abstenir d'engager ou de conduire à son terme une procédure visant à recouvrer les sommes précédemment versées à l'agent en application d'une décision illégale attribuant un avantage financier ; que, dans ces conditions, les conclusions présentées par Mme A...tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de ne pas prélever sur son traitement la somme de 1 603,40 euros à raison de la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2012 ne peuvent qu'être rejetées ;
14. Considérant, d'autre part, que Mme A...demande également qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme de 1 629 euros, prélevée à raison d'un trop perçu au titre de la période du 1er octobre 2013 au 31 août 2014 ; que toutefois, ce prélèvement résulte d'une régularisation de la situation de l'intéressée qui a bénéficié par erreur d'un avancement au 12ème échelon d'attaché d'administration à compter du 1er octobre 2013 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette erreur résulterait de l'arrêté contesté du 17 décembre 2013 qui classe Mme A... au 10ème échelon à compter du 1er janvier 2010 puis au 11ème échelon à compter du 1er novembre 2012, et présenterait un lien avec le présent litige ; que dans ces conditions, les conclusions à fin d'injonction précitées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1402188 du 20 octobre 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'arrêté en date du 17 décembre 2013 en tant qu'il retire l'arrêté du 8 janvier 2010 classant Mme A...au 11ème échelon du grade d'attaché d'administration pour la période du 1er janvier 2010 au 30 octobre 2012 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre de la culture et de la communication.
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N° 15NC02492