Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision en date du 29 octobre 2012 par laquelle le ministre de la défense a aggravé la sanction disciplinaire prise à son encontre en portant de huit à vingt le nombre de jours d'arrêts, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1302102-1302568 du 22 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 29 octobre 2012 en tant qu'elle prévoit, pour son exécution, une période supérieure à douze jours d'arrêts et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 21 novembre 2016, M. C... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 octobre 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 29 octobre 2012, ainsi que la décision expresse en date du 6 mai 2013 rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché de contradictions ;
- le ministre de la défense ne pouvait, le 29 octobre 2012, augmenter de huit à vingt le nombre de jours d'arrêts prononcés à son encontre le 26 juin 2012 par l'autorité disciplinaire de premier niveau, dès lors qu'il avait commencé à exécuter la période initiale de huit jours d'arrêts le 13 juillet 2012 et qu'une levée générale des sanctions d'arrêts est intervenue, à l'occasion de la fête nationale du 14 juillet, pendant l'exécution de cette première période ;
- le ministre ne saurait se prévaloir de l'instruction n° 200690/DEF/SGA/DFP/FM/1 du 30 mai 2006 ;
- il fait l'objet d'une double sanction, en méconnaissance de l'article 4 du protocole 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision contestée a pour effet de le priver du bénéfice de la levée générale des sanctions d'arrêts prononcée le 14 juillet 2012 ;
- elle a des effets défavorables sur ses notations et la suite de sa carrière.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 juillet 2016, le ministre de la défense conclut à ce que la cour prononce un non-lieu à statuer sur la requête.
Le ministre de la défense fait valoir que :
- la requête est devenue sans objet dès lors qu'à la suite de son annulation par le tribunal administratif, la décision contestée a été retirée ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la défense ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.
1. Considérant que, par une décision du 29 juin 2012, le commandant du groupement de gendarmerie nationale du Haut-Rhin - Colmar a infligé à M.B..., sous-officier de gendarmerie affecté au peloton autoroutier de Rixheim (Haut-Rhin), une sanction disciplinaire du premier groupe fixée à huit jours d'arrêts ; que M.B..., qui exécutait cette sanction depuis le 13 juillet 2012, a bénéficié d'une levée générale des sanctions du premier groupe, décidée à l'occasion de la fête nationale du 14 juillet ; qu'il a toutefois été informé, le 14 août suivant, que la sanction prononcée le 29 juin 2012 allait faire l'objet d'un réexamen en vue d'une éventuelle augmentation du nombre de jours d'arrêts retenus à son encontre ; que, par une décision du 29 octobre 2012, le ministre de la défense a porté cette sanction du premier groupe à vingt jours d'arrêts, en précisant qu'ils seraient exécutés du 4 au 23 décembre 2012 ; que le recours gracieux formé par M. B...à l'encontre de cette décision a été rejeté par une décision du 6 mai 2013 ; que M. B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation des décisions du 29 octobre 2012 et du 6 mai 2013 ; que, par un jugement du 22 octobre 2015 dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif a annulé la décision du 29 octobre 2012 en tant qu'elle prévoit, pour son exécution, une période supérieure à douze jours d'arrêts et a rejeté le surplus de sa demande ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu :
2. Considérant qu'aux termes de l'article article R. 4137-23-2 du code de la défense : " L'effacement d'office ou sur demande d'une sanction disciplinaire est effectué de façon à ce que toute mention de la sanction disparaisse des dossiers individuels, livrets, relevés ou fichiers et que le rappel de l'existence de la sanction soit impossible. Il n'a aucun effet rétroactif ni abrogatif sur les mesures prises et ne peut donner lieu à une reconstitution de carrière (...) " ;
3. Considérant que le ministre de la défense fait valoir que la décision contestée du 29 octobre 2012 a été retirée du dossier individuel de M. B...à la suite de son annulation partielle par le tribunal administratif de Strasbourg ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité compétente aurait prononcé le retrait de cette décision et que ce retrait serait devenu définitif, alors en outre que l'intéressé soutient en appel, sans être contredit sur ce point, avoir exécuté les jours d'arrêts supplémentaires prononcés à son encontre ; qu'ainsi, l'appel formé par M. B... à l'encontre du jugement du 22 octobre 2015 en vue d'obtenir l'annulation de la décision du 29 octobre 2012 dans son intégralité conserve son objet ; que, dans ces conditions, les conclusions à fin de non-lieu du ministre de la défense ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 4137-21 du code de la défense : " La levée des sanctions disciplinaires de consigne ou d'arrêts peut être décidée par l'autorité compétente, soit en raison d'un événement particulier, soit en raison du comportement du militaire sanctionné. / La levée de la sanction disciplinaire n'efface pas la sanction mais dispense de l'accomplissement de la fraction non encore effectuée. / L'autorité militaire de premier niveau peut lever en totalité ou en partie les sanctions qu'elle a elle-même infligées (...) / Le ministre de la défense peut lever les sanctions disciplinaires quelles que soient les autorités les ayant infligées " ; qu'aux termes de l'article R. 4137-31 du même code : " Seul le ministre de la défense peut augmenter le nombre de tours de consigne ou de jours d'arrêts déjà infligés par une autorité militaire. / Cette augmentation ne peut intervenir qu'au cours de la période de quatre mois qui suit le jour de la signature de la décision par l'autorité ayant prononcé la sanction initiale " ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code de la défense que la levée de la sanction disciplinaire de consigne ou d'arrêts dispense le militaire, qui exécute une telle sanction lorsque la levée est décidée, d'accomplir la fraction non encore effectuée de jours de consigne ou d'arrêts ; qu'en revanche, cette levée, qui n'a pour effet ni d'effacer la sanction, ni même d'en modifier le quantum, ne fait pas obstacle à ce que le ministre de la défense décide, compte tenu de la gravité des faits reprochés au militaire, d'augmenter le nombre de jours de consigne ou d'arrêts précédemment infligés par une autorité militaire inférieure ; qu'ainsi, la levée des sanctions disciplinaires du premier groupe décidée à l'occasion de la fête nationale du 14 juillet alors que M. B... exécutait les huit jours d'arrêts infligés par la décision du 29 juin 2012 a seulement eu pour effet de le dispenser d'accomplir la fraction non encore effectuée des jours d'arrêts prononcés à son encontre, mais n'interdisait pas au ministre d'en augmenter le nombre ; qu'en outre, il n'est pas contesté que la décision du 29 octobre 2012 portant de huit à vingt le nombre de jours d'arrêts prononcés à l'encontre de M. B...a été rendue dans le délai requis par l'article R. 4137-31 du code de la défense, soit quatre mois à compter de la signature de la décision initiale ; que par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a été rendue en méconnaissance de la mesure de levée des sanctions du premier groupe ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. B...ne saurait utilement se prévaloir de ce que la décision contestée aurait pour effet de le priver du bénéfice de la levée des sanctions du premier groupe décidée le 14 juillet 2012 ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour prendre la décision contestée, le ministre de la défense se serait fondé sur l'instruction du 30 mai 2006 relative aux sanctions disciplinaires et à la suspension de fonctions applicables aux militaires ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le ministre ne saurait invoquer les dispositions de cette instruction ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que la décision contestée du 29 octobre 2012 n'a pas pour objet de prononcer une nouvelle sanction à l'encontre de M. B...à raison des mêmes faits que ceux qui ont motivé la sanction de huit jours d'arrêts prononcée le 29 juin 2012, mais constitue une aggravation de cette même sanction que le ministre de la défense, compte tenu de la gravité des faits reprochés à l'intéressé, pouvait légalement décider en application des dispositions précitées de l'article R. 4137-31 du code de la défense ; qu'ainsi, compte tenu en outre de l'annulation par les premiers juges de la décision litigieuse en tant qu'elle prévoit, pour son exécution, une période supérieure à douze jours d'arrêts, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il ferait l'objet d'une double sanction à raison des mêmes faits ; qu'à cet égard, il ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 4 du protocole n° 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui s'appliquent aux sanctions de nature pénale mais non aux sanctions à caractère disciplinaire ;
9. Considérant, en dernier lieu, que les conséquences éventuelles de la décision du 29 octobre 2012 sur la carrière du requérant sont sans incidence sur la légalité de cette décision ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg n'a annulé la décision du 29 octobre 2012 qu'en tant qu'elle prévoit, pour son exécution, une période supérieure à douze jours d'arrêts et a rejeté le surplus de sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B...demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... et les conclusions à fin de non-lieu du ministre de la défense sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de la défense.
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N° 15NC02399