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19/01/2017 | FRANCE | N°16NC00040

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 janvier 2017, 16NC00040


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 25 avril 2013 par lequel le préfet de la Moselle a autorisé M. F...à exploiter une surface de 1 ha 61 a et 30 ca de terres agricoles situées à Luttange.

Par un jugement n° 1302313 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2016, M.C..., représenté par la Selas Devarenne associés Grand

Est, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302313 du 19 novembre 2015 du tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 25 avril 2013 par lequel le préfet de la Moselle a autorisé M. F...à exploiter une surface de 1 ha 61 a et 30 ca de terres agricoles situées à Luttange.

Par un jugement n° 1302313 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2016, M.C..., représenté par la Selas Devarenne associés Grand Est, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302313 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'une somme de 35 euros au titre des dépens exposés devant le tribunal.

M. C...soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé au regard des exigences de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 311-1 et L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 juillet 2016, M.F..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. F...soutient que les moyens de M. C...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 juillet 2016, le ministre de l'agriculture conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., pour M.C..., ainsi que celles de MeG..., pour M.F....

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande enregistrée le 15 janvier 2013, M.F..., agriculteur retraité, a sollicité du préfet de la Moselle l'autorisation d'exploiter 1 ha 61 a 90 ca de terres agricoles dont il est propriétaire situées sur le territoire de la commune de Luttange, en vue de constituer un élevage équin sur une parcelle de subsistance. Ces parcelles étaient alors mises en valeur, selon bail rural consenti par M. F...à M.C..., gérant de 1'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Saint-André, disposant d'une superficie de 160 ha 45. La commission départementale d'orientation de l'agriculture a émis un avis favorable à la demande de M. F...et par un arrêté du 25 avril 2013, le préfet de la Moselle a fait droit à sa demande à la condition qu'un chemin rural soit aménagé pour permettre à M.C..., preneur en place, d'accéder aux terres et propriétés qu'il exploite autour des parcelles en causes. M. C...relève appel du jugement du 19 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2013.

I. Sur la légalité de l'arrêté du 25 avril 2013 :

2. En premier lieu, M. C...soutient que la décision est insuffisamment motivée au regard des dispositions des articles L. 331-3 et R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ainsi que de la loi du 11 juillet 1979.

3. M. C...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dès lors que ses dispositions n'exigent que la motivation des décisions individuelles défavorables et ne sont pas applicables aux décisions qui font droit, comme en l'espèce, à une demande d'autorisation d'exploiter.

4. Par ailleurs, aux termes de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime : " (...) II. - La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3. (...)".

5. L'arrêté litigieux mentionne dans ses visas les dispositions applicables du code rural et de la pêche maritime ainsi que la référence au schéma directeur départemental des structures du 21 janvier 2011 adopté dans le département de la Moselle.

6. Le préfet de la Moselle fait également état du souhait de M. F...d'exercer son droit de reprise sur une partie des parcelles dont il est propriétaire en vue de constituer une parcelle de subsistance pour y développer une activité d'élevage équin, en conformité avec l'orientation prioritaire du schéma directeur départemental des structures prévue à l'article 1er, relative à l'installation d'agriculteurs, et l'article 3 du même document, traitant expressément de la constitution des parcelles de subsistance, et procède à l'analyse de la situation de M.F..., preneur en place, et des conséquences de la décision envisagée sur son exploitation.

7. En conséquence, le préfet, qui n'était pas tenu de se prononcer expressément sur chacun des critères de l'article L. 331-3, a satisfait, par les indications précitées figurant dans la décision litigieuse, aux exigences de motivation posées à l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime.

8. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 25 avril 2013 ne peut qu'être écarté.

9. En second lieu, M. C...soutient que M. F...n'a pas démontré qu'il disposait d'un élevage de chevaux constituant une activité agricole au sens de l'article L. 311- 1 du code rural justifiant sa demande et qu'en lui délivrant l'autorisation sollicitée, le préfet de la Moselle a entaché son arrêté d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation.

10. D'une part, aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime : " Le contrôle des structures des exploitations agricoles s'applique à la mise en valeur des biens fonciers ruraux au sein d'une exploitation agricole, quels que soient la forme ou le mode d'organisation juridique de celle-ci, et le titre en vertu duquel la mise en valeur est assurée. Est qualifié d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1 (...)". L'article L. 311-1 de ce code dispose que : " Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation (...)". Aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; (...) 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...) L'autorisation peut n'être délivrée que pour une partie de la demande, notamment si certaines des parcelles sur lesquelles elle porte font l'objet d'autres candidatures prioritaires. Elle peut également être conditionnelle ou temporaire ".

11. D'autre part, aux termes de l'article L. 732-39 du code rural et de la pêche maritime dans sa version alors en vigueur : " (...) Sous réserve des dispositions de l'article L. 815-2 du code de la sécurité sociale, le schéma directeur départemental des structures agricoles, fixé après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture instituée par l'article L. 313-1 du présent code, détermine la superficie dont un agriculteur est autorisé à poursuivre l'exploitation ou la mise en valeur, sans que cela fasse obstacle au service des prestations d'assurance vieillesse liquidées par un régime obligatoire, dans la limite maximale du cinquième de la surface minimum d'installation ". L'article 1er du schéma directeur départemental des structures agricoles du département de la Moselle prévoit que " l'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs (...) " et son article 3 dispose que " la surface de la parcelle de subsistance qu'un agriculteur est autorisé à exploiter ou à mettre en valeur sans que cela fasse obstacle au service des prestations d'assurance vieillesse, prévue par l'article L. 353-1 du code rural, est fixée à 2 ha pondérés ".

12. Il ressort des pièces du dossier que M. F... a déposé une demande d'autorisation d'exploiter 1 ha 61 a 90 ca de terres agricoles dont il est propriétaire pour constituer une parcelle de subsistance en vue d'y développer un élevage équin. M. C... ne produit pas d'élément probant de nature à établir qu'à la date de la décision litigieuse, cette demande ne visait en fait qu'à permettre au pétitionnaire d'exercer une activité de loisir. L'activité d'élevage, que M. F...indiquait vouloir développer grâce à plusieurs juments devant être affectées à la reproduction, doit être regardée comme une activité agricole au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 311-1 précité.

13. Il résulte des dispositions légales et règlementaires précitées que la constitution d'une parcelle de subsistance est permise pour un exploitant retraité en vue de lui apporter un complément de revenu. Il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. F...a souhaité s'installer pour développer son activité d'élevage dans ce but et conformément aux dispositions de l'article 3 du schéma directeur départemental précité dès lors que la surface de sa parcelle de subsistance ne dépasse pas le seuil de deux hectares. Il ressort en outre des pièces du dossier que le préfet a pris en compte les inconvénients engendrés par la délivrance de l'autorisation contestée pour M.C..., preneur en place à qui congé a été délivré par M. F..., dès lors que l'arrêté conditionne, conformément au dernier alinéa de l'article L. 331-3 précité, l'autorisation délivrée à M. F...à la réalisation d'un chemin d'accès afin de permettre à M. C...de poursuivre son activité dans de bonnes conditions. M. C... ne produit d'ailleurs pas d'élément de nature à contredire sérieusement ces indications ou à établir que la privation de l'exploitation des surfaces visées par l'autorisation contestée est de nature à handicaper fortement sa propre exploitation laquelle porte sur une surface de 160 ha.

14. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en autorisant M. F... à exploiter 1 ha 61 a 90 ca de terres agricoles sur le territoire de la commune de Luttange, le préfet de la Moselle a entaché son arrêté du 25 avril 2013 d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation.

15. En conclusion de tout ce qui précède, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2013.

II. Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat ou de M. F...qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

17. En revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de M. C...le paiement de la somme de 1 500 euros à M. F...au titre des frais que celui-ci a exposés pour sa défense.

18. Il n'y a pas lieu, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, de mettre les dépens à la charge de l'Etat.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : M. C...versera à M. F...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à M. E...F...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 16NC00040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00040
Date de la décision : 19/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP J-C et M. SEYVE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-01-19;16nc00040 ?
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