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20/12/2016 | FRANCE | N°16NC00900

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 16NC00900


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme B...D...ont demandé par requêtes distinctes au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du

22 juin 2015 par lesquels le préfet de la Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 1502196 et n° 1502197 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demand

es.

Procédure devant la cour :

Par une requête conjointe enregistrée le 17 mai 2016, M. e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme B...D...ont demandé par requêtes distinctes au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du

22 juin 2015 par lesquels le préfet de la Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 1502196 et n° 1502197 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête conjointe enregistrée le 17 mai 2016, M. et MmeD..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ces jugements du 29 décembre 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Marne du 22 juin 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de leur délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 880 euros, à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- le préfet s'est cru à tort lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et n'a pas procédé à un examen personnalisé de leur situation ; les décisions attaquées ne font pas état des violences subies au Kosovo ; elles ne tiennent pas compte de l'évolution de leur situation depuis la date de leur demande, notamment la dégradation de l'état de santé du requérant ;

- la décision prise à l'encontre de M. D...est entachée d'un vice de procédure ; l'avis du médecin de l'agence régionale de santé était incomplet dès lors qu'il ne mentionnait pas la durée prévisible du traitement ;

- la décision prise à l'encontre de Mme D...ne répond pas à sa demande de se voir délivrer un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade ;

- la décision prise à l'encontre de M. D...méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il souffre d'un syndrome de stress post-traumatique en lien avec les évènements subis dans son pays d'origine ; il est en outre sujet à d'importants problèmes cardiaques, et souffre depuis peu d'un cancer des reins ; il bénéficie en France d'une prise en charge globale pour ces pathologies et ne peut bénéficier des soins requis au Kosovo ; il ne peut se confronter aux lieux de ses traumatismes ; il ne peut par ailleurs voyager sans risque ; ces éléments constituent des circonstances humanitaires exceptionnelles ;

- la décision prise à l'encontre de Mme D...méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette dernière devant en conséquence de l'octroi à son époux d'un titre de séjour pour raisons médicales également se voir admettre au séjour ;

Une mise en demeure a été adressée au préfet de la Marne le 10 octobre 2016.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 26 août 2016.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 juin 2015 pris à l'encontre de M. D...:

1. Considérant que par courrier du 11 septembre 2016, postérieur à l'introduction de la requête susvisée présentée par M.D..., le préfet de la Marne a informé celui-ci qu'il avait décidé de lui accorder une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'un an en application de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays de renvoi sont dès lors dépourvues d'objet ; que par suite il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 juin 2015 pris à l'encontre de MmeD... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : la carte de séjour temporaire vie privée et familiale est délivrée de plein droit à " l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'époux de la requérante ayant été admis au séjour en qualité d'étranger malade, cette dernière est fondée à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'accompagnant de son époux porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande en annulation en tant qu'elle se rapporte à l'arrêté du 22 juin 2015 pris à l'encontre de MmeD... ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt implique qu'il soit enjoint au préfet de la Marne de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme D...dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme sollicitée à ce titre par le conseil des requérants ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction relative aux décisions susvisées du 22 juin 2015 concernant la situation de

M.D....

Article 2 : Les décisions susvisées du 22 juin 2015 relatives à la situation de

Mme D...sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Marne de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme D...dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme D...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et Mme B...D...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.

2

N°16NC00900


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00900
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON-PHILIPPOT
Avocat(s) : SCP SAMMUT-CROON-JOURNE-LEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-12-20;16nc00900 ?
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