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20/12/2016 | FRANCE | N°15NC01938

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 15NC01938


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...et Mme F...D...épouse C...ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Reims à leur verser la somme totale de 143 257 euros en réparation des préjudices subis à la suite de la prise en charge de Mme C...dans cet établissement le 15 août 2010.

La caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, mise en cause dans l'instance, a demandé au tribunal administratif de condamner le centre hospitalier régional unive

rsitaire de Reims à lui verser la somme de 190 037,81 euros en remboursement des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...et Mme F...D...épouse C...ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Reims à leur verser la somme totale de 143 257 euros en réparation des préjudices subis à la suite de la prise en charge de Mme C...dans cet établissement le 15 août 2010.

La caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, mise en cause dans l'instance, a demandé au tribunal administratif de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Reims à lui verser la somme de 190 037,81 euros en remboursement des débours exposés pour le compte de MmeC..., ainsi qu'une somme de 1 028 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Par un jugement n° 1301335 du 30 juin 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné le centre hospitalier régional universitaire de Reims à verser la somme de 87 781,42 euros à M. et Mme C...en réparation de leurs préjudices, la somme de 99 735,09 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes en remboursement de ses débours, ainsi que la somme de 1 028 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 4 septembre 2015 sous le n° 15NC01916, et un mémoire en réplique enregistré le 17 novembre 2016, M. A...C...et Mme F...D...épouseC..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 30 juin 2015 ;

2°) de porter le montant de la condamnation mise à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims à 449 803 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- Mme C...a été prise en charge par la polyclinique du parc de Charleville-Mézières le 7 juillet 2010 pour le remplacement d'une prothèse de la hanche droite puis, après complications, par le centre hospitalier universitaire de Reims à compter du 15 août 2010 ;

- les manquements fautifs dont l'intéressée a fait l'objet au sein des services de l'hôpital sont de nature à engager la responsabilité de l'établissement ;

- le centre hospitalier doit être condamné à réparer une partie des préjudices subis par Mme C... à raison de 2 375 euros pour son déficit fonctionnel temporaire, 51 200 euros pour son déficit fonctionnel permanent, 11 111 euros pour les souffrances endurées, 8 571 euros pour son préjudice esthétique, 30 000 euros pour son préjudice d'agrément, 20 000 euros pour son préjudice sexuel et 306 546,24 euros pour l'assistance par tierce personne ;

- les préjudices d'affection et sexuel subis par M. C...s'établissent chacun à 10 000 euros.

Par deux mémoires en défense enregistré le 4 février 2016 et le 21 novembre 2016, le centre hospitalier régional universitaire de Reims, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête et à la réformation du jugement attaqué.

Le centre hospitalier fait valoir que :

- les premiers juges ne pouvaient indemniser le déficit fonctionnel temporaire subi par Mme C...du 27 août au 30 novembre 2010 et le préjudice d'affection subi par son époux dès lors que ces chefs de préjudice ont déjà été indemnisés par un jugement du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières du 6 juin 2014 ;

- les autres chefs de préjudice n'ont pas été sous-évalués par les premiers juges ;

- le décompte et l'attestation d'imputabilité produits par la caisse ne permettent pas de distinguer entre les débours imputables à la seule faute de l'établissement de santé et ceux imputables à la faute du praticien de la polyclinique privée ;

- une partie des débours dont le remboursement est demandé aurait en tout état de cause été exposée par la caisse à raison de la pathologie initiale de la victime.

Une mise en demeure a été adressée le 20 janvier 2016 à la société BPCE assurances et à la Previades harmonie mutuelle, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

II. Par une requête enregistrée le 8 septembre 2015 sous le n° 15NC01938, et un mémoire en réplique enregistré le 18 octobre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, représentée par MeB..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 30 juin 2015 ;

2°) à titre principal, de porter le montant de la condamnation mise à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims en remboursement de ses débours à 169 109,74 euros ou, à titre subsidiaire, de porter ce montant à 145 123,58 euros et de condamner l'établissement de santé à lui rembourser les frais futurs sur justificatifs ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes soutient que :

- elle justifie de l'imputabilité des dépenses de santé dont elle demande le remboursement aux manquements fautifs du centre hospitalier ;

- elle a B...au remboursement des dépenses de santé futures sous la forme d'un capital dès lors que le montant de ces dépenses n'excède pas celui du préjudice de la victime.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 4 février 2016 et le 21 novembre 2016, le centre hospitalier régional universitaire de Reims, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête et à la réformation du jugement attaqué.

Le centre hospitalier fait valoir les mêmes moyens que ceux qui sont exposés dans ses mémoires présentés les mêmes jours, enregistrés sous la requête susvisée n° 15NC01916.

Une mise en demeure a été adressée le 20 janvier 2016 à la société BPCE assurances et à la Previades harmonie mutuelle, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 21 décembre 2015 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeG..., pour le centre hospitalier régional universitaire de Reims.

1. Considérant que MmeC..., née le 6 mars 1944, a été opérée le 7 juillet 2010 par un chirurgien exerçant à titre libéral, au sein de la polyclinique du parc de Charleville-Mézières, pour la mise en place d'une nouvelle prothèse totale de la hanche droite ; qu'à la suite de complications, l'intéressée a été prise en charge le 15 août 2010 par le centre hospitalier régional universitaire de Reims où elle a été opérée le lendemain puis, à nouveau, le 27 août 2010 ; qu'après avoir diagnostiqué une infection de la prothèse mise en place à la polyclinique du parc, les praticiens du centre hospitalier ont procédé à la dépose du matériel prothétique, réalisé une fémorotomie et un fraisage de la cavité de l'os du cotyle, puis mis en place un implant temporaire en ciment afin de traiter l'infection ; que la requérante, toujours hospitalisée, a encore été opérée le 11 octobre 2010 en raison d'une " récidive septique " ; que MmeC..., qui a conservé d'importantes séquelles à la suite des interventions chirurgicales précitées, a recherché la responsabilité du chirurgien de la polyclinique du parc devant le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières ; que l'expert désigné par cette juridiction a conclu, dans son rapport déposé le 16 janvier 2013, que Mme C...n'avait jamais présenté aucune infection au cours de sa prise en charge, tant par la polyclinique du parc que par le centre hospitalier régional universitaire de Reims ; que par un jugement du 6 juin 2014, le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières, imputant une partie des préjudices subis par Mme C...au chirurgien de la polyclinique du parc, a condamné celui-ci à verser la somme totale de 21 363 euros à la victime et à son époux, et celle de 5 434,08 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes ; que M. et Mme C...ont sollicité devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la condamnation du centre hospitalier régional universitaire de Reims à leur verser la somme de 143 257 euros en réparation des préjudices subis à la suite de la prise en charge de l'intéressée le 15 août 2010 ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, mise en cause dans l'instance, a demandé le remboursement de ses débours pour un montant total de 190 037,81 euros ; que par un jugement du 30 juin 2015, le tribunal administratif a retenu la responsabilité de l'établissement de santé, tout en limitant le montant des condamnations à 87 781,42 euros pour M. et Mme C...et à 99 735,09 euros pour la caisse primaire d'assurance maladie ; que, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. et Mme C... et la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes relèvent appel de ce jugement et demandent à la cour de porter le montant des condamnations, respectivement, à 449 803 euros et à 169 109,74 euros ; que le centre hospitalier demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il indemnise le déficit fonctionnel temporaire de Mme C...et le préjudice d'affection subi par son époux et, pour le surplus, conclut au rejet des requêtes ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise déposé devant le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières que les séquelles de Mme C...sont imputables tant au chirurgien de la polyclinique qui, après avoir réalisé une pose défectueuse de la nouvelle prothèse, a traité l'intéressée pour une infection et n'a pas été en mesure de procéder à la reprise chirurgicale qui s'imposait, qu'aux praticiens du centre hospitalier qui ont maintenu le diagnostic d'une infection, retiré la nouvelle prothèse et effectué des soins inadaptés alors qu'une simple remise en place de cette prothèse aurait suffi ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'erreur de diagnostic commise par le centre hospitalier et le traitement inadapté qui s'en est suivi constituent des fautes de nature à engager la responsabilité de l'établissement de santé, ce que celui-ci ne conteste pas en appel ;

En ce qui concerne les préjudices de Mme C...:

Quant aux préjudices patrimoniaux :

S'agissant de l'assistance par une tierce personne :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise précité, que les séquelles physiques dont Mme C...reste atteinte depuis sa consolidation le 31 décembre 2010, et qui nécessitent l'assistance d'une tierce personne, sont imputables au seul centre hospitalier régional universitaire de Reims ;

4. Considérant, en premier lieu, que l'expert a évalué l'assistance dont Mme C...a besoin à deux heures d'aide non spécialisée par jour, ce qui, depuis la date de sa consolidation jusqu'à celle du présent arrêt, représente un besoin de 4 380 heures ;

5. Considérant, d'une part, que Mme C...produit à l'instance des factures établies par l'Association d'aide à domicile en milieu rural (ADMR) et l'Association départementale d'aide aux personnes âgées (ADAPAH), dont il ressort qu'elle recourt depuis l'année 2014 aux services d'aide à la personne proposés par ces associations pour un nombre total de 506 heures en 2014 ; qu'après déduction de la participation du département des Ardennes au financement de ces prestations, une somme de 874,25 euros est restée à la charge de Mme C...au titre de l'année 2014 ; que, sur la base de ces factures, Mme C... doit être regardée, de l'année 2014 à la date de lecture du présent arrêt, comme ayant bénéficié des services proposés par ces deux associations à raison de 1 518 heures, sur les 4 380 requises par son état, pour un montant laissé à sa charge de 2 622,75 euros ;

6. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté que Mme C...a également bénéficié de l'aide de son époux qui a complété celle apportée par les deux associations précitées à raison de 2 862 heures ; qu'il y a lieu de calculer le montant de cette assistance sur la base d'un taux horaire moyen de 11 euros, déterminé en tenant compte du salaire minimum moyen augmenté des charges sociales et de l'évolution de ce salaire et de ces charges pendant l'ensemble de la période ; qu'ainsi, le montant de l'assistance apportée par M. C...s'établit à 31 482 euros ;

7. Considérant qu'il résulte des deux points précédents que les frais d'assistance par une tierce personne doivent être évalués, pour la période du 31 décembre 2010 à la date de lecture du présent arrêt, à 34 104,75 euros ; que, par suite, M. et Mme C...sont fondés à soutenir que le montant alloué à ce titre par les premiers juges doit être porté de 9 195,38 euros à 34 104,75 euros ;

8. Considérant, en second lieu, que, sur la base des factures précitées, l'assistance dont Mme C...aura besoin pour la période postérieure au présent arrêt s'établit à 730 heures par an dont 506 heures seront assurées par un prestataire extérieur pour un montant, laissé à la charge de l'intéressée, évalué à 875 euros ; que l'assistance apportée à Mme C...par son époux, à raison de 224 heures par an, doit être fixée dans les mêmes conditions que pour la période antérieure sur la base d'un coût horaire porté à 13 euros afin de tenir compte de l'évolution du salaire minimum moyen et des charges sociales ; qu'ainsi, le coût de l'assistance apportée par M. C...doit être fixé, pour l'avenir, à 2 912 euros par an ; qu'il s'ensuit que le montant annuel total de l'assistance par une tierce personne doit être fixé à 3 787 euros, qu'il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier sous la forme d'une rente annuelle ; qu'il appartiendra à M. et MmeC..., le cas échéant, de saisir le juge afin qu'il se prononce à nouveau sur le montant de cette rente dans l'hypothèse où les conditions de l'assistance par une tierce personne, notamment l'aide familiale, viendraient à être modifiées ;

S'agissant des dépenses de santé :

9. Considérant, en premier lieu, que la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes demande le remboursement des frais hospitaliers exposés pour le compte de Mme C...du 28 août 2010 au 29 novembre 2010, pour un montant de 141 786,32 euros ; qu'il ressort de l'attestation établie le 28 juillet 2015 par le médecin de la caisse que ces frais ont été rendus nécessaires par l'intervention chirurgicale du 27 août 2010 au cours de laquelle les praticiens du centre hospitalier ont apporté à l'intéressée des soins inadaptés à son état ; que si l'établissement de santé se prévaut des conclusions de l'expert, selon lesquelles Mme C...aurait en tout état de cause subi une période de déficit fonctionnel temporaire total d'une durée d'un mois dans l'hypothèse d'une prise en charge conforme aux règles de l'art, il ne résulte pas pour autant de ces mêmes conclusions, et l'hôpital n'apporte aucun élément dans ce sens, qu'une prise en charge correcte aurait nécessairement eu pour conséquence l'hospitalisation de la patiente pendant un mois, quelle que soit par ailleurs l'importance de son incapacité ; que, dans ces conditions, la caisse primaire d'assurance maladie doit être regardée comme établissant que les frais d'hospitalisation dont elle demande le remboursement sont imputables aux seuls manquements reprochés à l'hôpital ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort suffisamment de l'attestation précitée et du décompte détaillé produits en appel par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes que les frais médicaux, les frais pharmaceutiques, les frais d'appareillage et les frais de transport engagés pour des montants, respectivement, de 795,10 euros, 637,02 euros, 647,30 euros et 1 257,84 euros, sont imputables à la seule faute du centre hospitalier régional universitaire de Reims ;

11. Considérant, en dernier lieu, que la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes demande le remboursement de ses frais futurs pour un montant de 23 986,16 euros ; que toutefois, le remboursement à la caisse par le tiers responsable des prestations qu'elle sera amenée à verser à l'avenir, de manière certaine, prend normalement la forme du versement d'une rente et ne peut être mis à la charge du responsable sous la forme du versement immédiat d'un capital représentatif qu'avec son accord ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le centre hospitalier régional universitaire de Reims aurait donné son accord pour le versement d'un capital représentatif des frais que la caisse sera amenée à engager pour le compte de MmeC... ; que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'infirmer les premiers juges qui ont mis ces dépenses à la charge de l'établissement de santé sur présentation de justificatifs, au fur et à mesure qu'elles seront exposées ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes est seulement fondée à soutenir que le montant de ses débours, mis à la charge de l'hôpital, doit être porté de 99 735,09 euros à 145 123,58 euros ;

Quant aux préjudices non patrimoniaux :

13. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des conclusions de l'expert désigné par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières que Mme C...a souffert d'un déficit fonctionnel temporaire total du 27 août au 29 novembre 2010, imputable pour moitié au chirurgien de la polyclinique du parc et, pour l'autre moitié, au centre hospitalier de Reims, ainsi que d'une incapacité temporaire partielle pouvant être fixée à 75 % du 30 novembre au 30 décembre 2010, imputable au seul centre hospitalier ; qu'il ressort du jugement rendu le 6 juin 2014 par le tribunal de grande d'instance que celui-ci n'a indemnisé Mme C...que de la moitié du préjudice résultant pour elle de la période de déficit fonctionnel temporaire total du 27 août au 29 novembre 2010, résultant de la faute retenue à l'encontre du chirurgien exerçant à titre libéral ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, Mme C...a B...à l'indemnisation de l'autre moitié de ce préjudice, imputable à l'établissement public de santé ; qu'il sera fait une plus juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme allouée par les premiers juges de 900 à 1 500 euros ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que les souffrances subies par Mme C...ont été évaluées par l'expert à 2,5 sur une échelle allant de 0 à 7 ; qu'eu égard à ces souffrances résultant notamment des deux interventions chirurgicales subies au sein de l'établissement public de santé les 27 août et 11 octobre 2010, il y a lieu de porter la somme allouée à ce titre par le tribunal administratif de 2 210 euros à 3 000 euros ;

15. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions du rapport d'expertise précité, que l'état de Mme C...est consolidé depuis le 31 décembre 2010, date à laquelle elle était âgée de 66 ans, et que le déficit fonctionnel permanent dont elle reste atteinte s'établit à 40 %, dont 32 % sont imputables au centre hospitalier ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme allouée par les premiers juges de 38 000 euros à 50 000 euros ;

16. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte encore de l'instruction que le handicap dont Mme C...reste atteinte, imputable pour l'essentiel aux manquements du centre hospitalier, ne lui permet plus de se livrer aux activités de loisirs qui étaient les siennes avant l'accident ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de lui allouer une somme de 5 000 euros en réparation de ce préjudice ;

17. Considérant, en dernier lieu, que l'expert a retenu un préjudice esthétique, évalué à 3 sur une échelle de 0 à 7, ainsi qu'un préjudice sexuel ; que le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation de ces deux chefs de préjudice en allouant à Mme C...les sommes respectives de 3 420 euros et 2 000 euros ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant des préjudices personnels subis par Mme C..., évalué à 46 530 euros par le tribunal administratif, doit être porté à 64 920 euros ;

En ce qui concerne les préjudices de M. C...:

19. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'un dommage trouve sa cause dans plusieurs fautes qui, commises par des personnes différentes ayant agi de façon indépendante, portaient chacune en elle normalement ce dommage au moment où elles se sont produites, la victime peut rechercher la réparation de son préjudice en demandant la condamnation de toutes ces personnes ou de l'une d'entre elles, sans préjudice des actions récursoires que les coauteurs du dommage pourraient former entre eux ; que, par un jugement du 6 juin 2014, le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières a alloué à M. C...la somme de 1 500 euros en réparation du préjudice d'affection résultant de la douleur morale qu'il a éprouvée en assistant aux souffrances endurées par son épouse à la suite de la reprise chirurgicale subie par celle-ci au centre hospitalier ; qu'ainsi, M. C... a été indemnisé de son entier préjudice d'affection par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières, à charge pour le chirurgien de la polyclinique du parc de Charleville-Mézières d'exercer, le cas échéant, une action récursoire à l'encontre du centre hospitalier régional universitaire de Reims ; que, par suite, l'établissement public de santé est fondé à soutenir que les premiers juges ne pouvaient le condamner à indemniser, de nouveau, le préjudice d'affection subi par M. C... ;

20. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. C...subit un préjudice sexuel dont il sera fait une juste appréciation en portant la somme allouée par les premiers juges de 1 000 à 2 000 euros ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a limité à 87 781,42 euros le montant de leurs préjudices, qu'il y a lieu de porter, eu égard à ce qui a été dit aux points 7, 8, 18 et 19, à la somme de 101 024,75 euros, dont 99 024,75 euros pour Mme C...et 2 000 euros pour son époux, cette somme étant assortie d'une rente annuelle de 3 787 euros ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit au point 12, les débours exposés par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes doivent être mis à la charge du centre hospitalier pour un montant qu'il convient de porter de 99 735,09 euros à 145 123,58 euros ;

Sur l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

22. Considérant qu'aux termes du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée " ; que l'article 1er de l'arrêté du 21 décembre 2015 dispose que : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 047 € et à 104 € à compter du 1er janvier 2016 " ; qu'eu égard au montant des sommes dont la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes a obtenu le remboursement, il y a lieu de porter le montant de l'indemnité forfaitaire de 1 028 euros à 1 047 euros ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C...et non compris dans les dépens, ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes ;

D E C I D E :

Article 1er : Le montant mis à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Reims par le jugement n° 1301335 du 30 juin 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en réparation des préjudices subis par M. et Mme C...est porté de la somme de 87 781,42 euros à celle de 101 024,75 euros (cent un mille vingt-quatre euros et soixante-quinze centimes), dont 99 024,75 euros (quatre-vingt dix-neuf mille vingt-quatre euros et soixante-quinze centimes) pour Mme C...et 2 000 euros (deux mille euros) pour son époux, cette somme étant assortie d'une rente annuelle de 3 787 euros (trois mille sept cent quatre-vingt sept euros) au bénéfice de Mme C.... Le montant mis à la charge du centre hospitalier, par le même jugement, en remboursement des débours exposés par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes est porté de 99 735,09 euros à 145 123,58 euros (cent quarante-cinq mille cent vingt-trois euros et cinquante-huit centimes).

Article 2 : Le montant de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est porté de 1 028 euros à 1 047 euros (mille quarante sept euros).

Article 3 : Le jugement n° 1301335 du 30 juin 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier régional universitaire de Reims versera à M. et Mme C...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros, ainsi qu'une somme de 1 000 (mille) euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D...épouseC..., à M. A... C..., au centre hospitalier régional universitaire de Reims, à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, à la Previades harmonie mutuelle et à la société BPCE assurances.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme, président de chambre,

- Mme, président-assesseur,

- M., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : JLe président,

Signé : Le greffier,

Signé : La République mande et ordonne à la ministre chargée de la santé et des affaires sociales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de B...commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

2

N° 15NC01916, 15NC01938


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01938
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-04 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Modalités de la réparation.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DROIT MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-12-20;15nc01938 ?
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