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29/09/2016 | FRANCE | N°15NC02463

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2016, 15NC02463


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1500376 du 26 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision fixant le pays de destination en tant qu'elle prévoit que l'intéressée peut être éloignée ve

rs l'Azerbaïdjan.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1500376 du 26 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision fixant le pays de destination en tant qu'elle prévoit que l'intéressée peut être éloignée vers l'Azerbaïdjan.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mai 2015 du tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a, par son article 2, rejeté le surplus de sa requête ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 4 septembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 800 euros, à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- la décision lui retirant son autorisation provisoire de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne du droit de la défense et de bonne administration ;

- le préfet a commis une erreur de droit au regard des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et s'est estimé en situation de compétence liée ;

- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation faut de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 29 octobre 2015, Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 dont les dispositions ont été notamment reprises par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dont les dispositions ont été notamment reprises par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot,

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 alors en vigueur: " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision portant refus de titre de séjour prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; que, par ailleurs, en rejetant la demande de titre de séjour formulée par MmeC..., la décision contestée impliquait nécessairement l'abrogation de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivrée durant l'instruction de sa demande ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, le préfet de Meurthe-et-Moselle pouvait abroger cette autorisation provisoire de séjour sans mettre l'intéressée à même de présenter des observations écrites ou orales ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que la décision de refus de séjour prise à l'encontre de MmeC..., entrée irrégulièrement en France en 2012 pour solliciter la reconnaissance du statut de réfugié, vise les dispositions applicables, rappelle les conditions d'entrée en France de l'intéressée puis mentionne que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle indique encore que la requérante ne peut prétendre à un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la décision ne contrevient pas aux dispositions des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que son époux fait également l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'elle précise également qu'aucun élément ne s'oppose à ce qu'une mesure d'éloignement soit prononcée à son encontre ; qu'ainsi, la décision de refus de titre de séjour attaquée dont il ressort des termes mêmes qu'elle a été précédée d'un examen particulier de la situation de la réquérante, est suffisamment motivée en droit et en fait au regard de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, alors même qu'elle ne mentionne pas qu'elle était enceinte et que ses deux enfants sont scolarisés ;

4. Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet ne s'est pas cru tenu de prendre une décision de refus de titre de séjour à son encontre après le rejet de sa demande d'asile mais qu'il a pris en considération l'ensemble des éléments relatifs à sa situation avant de prendre la décision contestée ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que Mme C...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le tribunal administratif de Nancy dans son jugement du 26 mai 2015 ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ;

7. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, qui doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui est loisible, tout au long de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; que MmeC..., qui a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile et pouvait ainsi faire valoir à tout moment auprès de la préfecture les éléments pertinents relatifs à sa situation tant en ce qui concerne son séjour en France que ses perspectives d'éloignement avant que n'intervienne la décision portant obligation de quitter le territoire français litigieuse, n'est ainsi pas fondée à soutenir qu'elle a été privée du droit d'être entendue qu'elle tient notamment de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions de refus de titre de séjour doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que la requérante soutient qu'il découle de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui transpose l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008 et des objectifs qu'elle poursuit, que l'autorité compétente de l'État membre dispose d'un large pouvoir d'appréciation lorsqu'elle prend une décision d'éloignement d'un ressortissant étranger ; que, toutefois, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle se serait estimé lié par la décision portant refus de titre de séjour et n'aurait pas examiné les conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée qui n'a d'ailleurs fait valoir aucun motif humanitaire ou motif exceptionnel, avant de prendre l'obligation de quitter le territoire français litigieuse à l'encontre de MmeC... ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet s'est cru en situation de compétence liée et a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux développés précédemment au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle de la requérante ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

12. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impliquent pas que l'autorité administrative, lorsqu'elle prend une décision de retour prévoyant un délai de départ volontaire de trente jours, comme c'est le cas en l'espèce, démontre l'absence de circonstances particulières qui auraient pu, le cas échéant, justifier une prolongation de ce délai ; que lorsqu'elle accorde le délai de trente jours, l'autorité administrative n'a, par suite, pas à motiver spécifiquement cette décision, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une telle prolongation ou justifie avoir informé l'autorité administrative d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire, au sens des dispositions précitées, une telle prolongation ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision octroyant à Mme C...un délai de départ volontaire de trente jours serait insuffisamment motivée doit être écarté ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

14. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la décision en litige, qui mentionne que la situation personnelle de Mme C...ne justifie pas que soit prolongé le délai de trente jours qui lui est imparti, que le préfet, qui a examiné sa situation, n'a pas méconnu l'étendue de sa propre compétence en décidant d'assortir sa décision portant obligation de quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire de trente jours ; que le moyen tiré de l'erreur de droit doit ainsi être écarté ;

15. Considérant, en quatrième lieu, que la seule circonstance que l'intéressée soit enceinte et nécessite des soins ne saurait, faute de précisions quant au caractère pathologique de cette grossesse et au caractère impératif d'une prise en charge médicale en France, suffire à caractériser une erreur manifeste d'appréciation ; que ce moyen doit également être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

19. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme C...une somme en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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N°15NC02463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02463
Date de la décision : 29/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON-PHILIPPOT
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-09-29;15nc02463 ?
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