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29/09/2016 | FRANCE | N°15NC01453

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2016, 15NC01453


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1301686 du 30 avril 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin 2015 et

1er juin 2016, M.B..., représenté par MeC

..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1301686 du 30 avril 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin 2015 et

1er juin 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration ne justifie pas de l'existence d'une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion dès lors qu'il est l'associé unique de la société bénéficiaire de l'apport, que l'opération d'apport s'analyse uniquement comme un changement de mode d'exploitation de son officine et que son activité individuelle a cessé après cet apport ;

- la jurisprudence reconnaît le droit pour la société bénéficiaire de retenir comme valeur d'origine à inscrire au bilan une valeur différente de la valeur vénale du fonds de commerce ;

- les officines pharmaceutiques retenues comme éléments de comparaison par le service ne sont pas pertinentes ;

- c'est à tort que l'administration a refusé de le faire bénéficier du régime de report d'imposition prévu à l'article 151 octies du code général des impôts dès lors que cet article n'exige pas que la valeur des titres soit au moins égale à la valeur réelle de l'ensemble des éléments d'actif immobilisé apportés, diminuée du passif directement affectable à ces immobilisations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Etienvre ;

- et les conclusions de Mme Peton-Philippot.

1. Considérant que M.B..., qui exploitait à titre individuel une officine pharmaceutique à Pierrefontaine-les-Varans (Doubs), acquise le 26 septembre 1995 pour un montant, hors matériel et stock de marchandises, de 391 489 euros, a cédé, dans le cadre d'un apport pur et simple, le 31 juillet 2007, à la Selarl PharmacieB..., dont il était l'unique associé, l'ensemble des éléments d'actifs de son entreprise, diminué du passif, pour

445 400 euros, soit l'actif net de son activité ; qu'en contrepartie, M. B...a reçu

44 540 parts sociales d'un montant unitaire de dix euros ; qu'à l'issue du contrôle sur pièces dont M. et Mme B...ont fait l'objet en 2010, l'administration fiscale a estimé que la valeur d'acquisition de 391 489 euros avait été minorée et fixé celle-ci à 1 179 000 euros ; que la différence a été regardée par le service comme une renonciation de la part de M. B...à prendre en compte, pour le calcul de la plus-value réalisée, la valeur réelle du bien apporté, qui était constitutive d'une libéralité accordée à la Selarl et, par suite, d'un acte anormal de gestion ; que la différence, soit la somme de 787 511 euros, a été imposée dans les mêmes conditions que la plus-value normalement réalisable au taux de 16 % ; que, dans la mesure où, selon elle, l'opération d'apport n'a pas été rémunérée par des titres pour une valeur au moins égale à la valeur réelle de l'ensemble des éléments d'actifs apportés, l'administration fiscale a refusé de faire bénéficier M. B...du régime de report d'imposition prévu à l'article 151 octies du code général des impôts ; que M. B...relève appel du jugement du 30 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a en conséquence été assujetti au titre de l'année 2007 ;

Sur les conclusions aux fins de décharge :

En ce qui concerne l'existence d'une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats de l'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation " ; qu'aux termes de l'article 39 duodecies du même code : " 1. Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme. 2. Le régime des plus-values à court terme est applicable : a. Aux plus-values provenant de la cession d'éléments acquis ou créés depuis moins de deux ans. Le cas échéant, ces plus-values sont majorées du montant des amortissements expressément exclus des charges déductibles ainsi que de ceux qui ont été différés en méconnaissance des dispositions de l'article 39 B ; b. Aux plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'éléments détenus depuis deux ans au moins, dans la mesure où elles correspondent à des amortissements déduits pour l'assiette de l'impôt. Le cas échéant, ces plus-values sont majorées du montant des amortissements expressément exclus des charges déductibles ainsi que de ceux qui ont été différés en contravention aux dispositions de l'article 39 B (...) 3. Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values autres que celles définies au 2. " ;

3. Considérant que, dans le cas où une entreprise industrielle et commerciale aliène, par voie d'apport à une société, un bien constituant un élément de son actif immobilisé et inscrit comme tel à son bilan, la cession de ce bien est génératrice d'une plus-value ou d'une moins-value qui doit être prise en compte pour la détermination des résultats de l'exploitation ; que cette plus ou moins-value est égale à la différence entre la valeur réelle, à la date de l'apport, des titres remis au cédant en contrepartie de l'apport et, d'autre part, la valeur active nette pour laquelle le bien apporté figurait au bilan de clôture de l'exercice précédant l'apport ; que, toutefois, si la valeur réelle du bien apporté est supérieure à celle des titres reçus en contrepartie, la différence ainsi constatée doit être regardée comme une renonciation à la réalisation de la plus-value correspondante et, par suite, comme une libéralité consentie par l'exploitant à la société bénéficiaire de l'apport ; que, dès lors, l'administration est en droit, si cette libéralité constitue, de la part de l'exploitant, un acte anormal de gestion, de prendre en compte, pour le calcul de la plus-value réalisée, la valeur réelle du bien apporté ; que, faute pour l'exploitant de justifier de l'intérêt qu'il a retiré de la renonciation à la réalisation de la plus-value en cause, l'administration doit être regardée comme ayant établi que cette renonciation est intervenue pour un motif étranger à son intérêt ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit précédemment, que la plus-value réalisée par M.B..., à l'occasion de la cession de son fonds de commerce, est égale à la différence entre la valeur réelle, à la date de l'apport, des titres qui lui ont été remis en contrepartie et la valeur active nette pour laquelle ce fonds figurait au bilan de clôture de l'exercice précédant l'apport ; que la circonstance que l'associé unique de la société bénéficiaire de l'apport était M. B...est à cet égard sans incidence sur la réalité de la cession et l'existence d'un acte anormal de gestion ; qu'il s'ensuit que celui-ci ne saurait utilement faire valoir que consécutivement à cet apport, il a cessé d'exploiter son officine pharmaceutique à titre individuel ; qu'enfin, la circonstance que la société bénéficiaire de l'apport, la Selarl PharmacieB..., puisse librement choisir de retenir comme valeur d'origine à inscrire au bilan une valeur différente de la valeur vénale du fonds de commerce, ce choix constituant une décision de gestion qui lui est opposable, est également sans incidence sur la plus-value constatée chez l'apporteur ;

5. Considérant, en second lieu, que pour fixer à 1 179 000 euros la valeur du fonds de commerce de l'officine pharmaceutique de M.B..., l'administration fiscale a évalué celle-ci à 0,88 fois la moyenne du chiffre d'affaires toutes taxes comprises des trois exercices précédant l'apport ; que ce coefficient de 0,88 correspond à la moyenne des prix de cession en proportion du chiffre d'affaires hors taxes d'officines pharmaceutiques situées 66 Grande rue à Audincourt, 11 Grande rue à Cussey-sur-l'Ognon, 23 rue de la République à Pontarlier,

28 Grande rue à Mamirolle, avenue du Huit Mai à Audincourt et 24 Grande rue à Morteau ;

6. Considérant que la valeur réelle des titres non cotés d'une société doit être déterminée par référence à la valeur des autres titres de la société telle qu'elle ressort des transactions portant à la même époque sur ces titres dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance ; qu'en l'absence de toute transaction ou de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale est faite en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les six officines pharmaceutiques sont toutes implantées dans des communes du Doubs à moins de soixante kilomètres de l'officine pharmaceutique de M. B...; que la moyenne de leurs trois derniers chiffres d'affaires toutes taxes comprises réalisés avant la cession des officines en 2006 ou en 2007, comprise entre 876 952 euros et 1 561 232 euros, est comparable à la moyenne de

1 340 043 euros des trois derniers chiffres d'affaires réalisés par M. B...en 2004, 2005 et 2006 ; que M. B...n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'administration fiscale a fixé la valeur réelle de son fonds de commerce en se référant à des éléments de comparaison non pertinents ;

En ce qui concerne le bénéfice du régime de report d'imposition prévu à l'article 151 octies du code général des impôts :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 151 octies du code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 portant loi de finances rectificative pour 2005 : " I. Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées par une personne physique à l'occasion de l'apport à une société soumise à un régime réel d'imposition d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité peuvent bénéficier des dispositions suivantes : a. L'imposition des plus-values afférentes aux immobilisations non amortissables fait l'objet d'un report jusqu'à la date de la cession, du rachat ou de l'annulation des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport de l'entreprise ou jusqu'à la cession de ces immobilisations par la société si elle est antérieure. (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005, qu'un contribuable ne peut bénéficier du dispositif de report d'imposition qu'à la condition que les apports soient rémunérés par des actions ou parts sociales d'une valeur au moins égale à la valeur réelle de l'ensemble des éléments d'actif immobilisé apportés, diminuée du passif directement affectable à ces immobilisations ;

10. Considérant que, comme il a été dit précédemment, la valeur des parts sociales attribuée à M. B...en contrepartie de l'apport de son fonds de commerce d'officine pharmaceutique était inférieure à la valeur réelle de l'ensemble des éléments d'actif immobilisé apportés, diminuée du passif directement affectable à ces immobilisations ; que

M. B...n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que le service a refusé de le faire bénéficier du régime de report d'imposition prévu à l'article 151 octies du code général des impôts ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 15NC01453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01453
Date de la décision : 29/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme PETON-PHILIPPOT
Avocat(s) : SELARL BULLE PITTET SUTTER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-09-29;15nc01453 ?
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