Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Yves Probst a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008.
Par un jugement n° 1103281 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 mai 2015, la SARL Yves Probst, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 mars 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ;
3°) de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article R. 61 A 1 du livre des procédures fiscales ont été méconnues par le service qui a mis l'impôt en recouvrement alors que l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires ne lui avait pas encore été notifié ;
- la motivation de la proposition de rectification est contradictoire ;
- c'est à tort que l'administration n'a pas admis en déduction la taxe sur la valeur ajoutée grevant les matières premières ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées, ne sont pas suffisamment motivées et sont calculées sur une base erronée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la SARL Yves Probst ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Didiot,
- et les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public,
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) " ; que l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales dispose, dans sa rédaction applicable à la procédure en cause : " I.-La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du même code ; 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. II.-Dans les domaines mentionnés au I, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit " ; qu'aux termes de l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter la demande prévue au premier alinéa de l'article L. 59. / L'administration notifie l'avis de la commission au contribuable et l'informe en même temps du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition " ; que l'article R. 60-3 du même code dispose que : " L'avis ou la décision de la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts " ; qu'enfin l'article R. 61 A 1 du même livre prévoit que : " Le montant de l'impôt exigible à la suite d'une procédure de rectification est calculé : (...) c) Soit sur la base notifiée par l'administration au contribuable après avis de la commission compétente dans le cas où le litige lui a été soumis " ;
2. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque le contribuable a manifesté son désaccord sur les rectifications qui lui ont été notifiées, l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie de ce désaccord, doit lui être notifié avant la mise en recouvrement de l'imposition supplémentaire ; que cette règle ne trouve toutefois à s'appliquer que dans le cas où ladite commission était compétente en application des dispositions précitées de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales ;
3. Considérant que la SARL Yves Probst, qui exerce une activité de réalisation et de revente de prothèses dentaires ainsi que d'enseignement et de démonstration, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ; qu'à l'issue de cette vérification, l'administration lui a réclamé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et les majorations correspondantes, par un premier avis de mise en recouvrement du 6 novembre 2009 relatif aux droits non contestés, et un second le 21 juin 2010 postérieurement à la notification de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que si la société soutient qu'aucune mise en recouvrement ne pouvait être opérée avant notification dudit avis, il est constant que la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires à l'initiative de l'intéressé ne portait que sur la question de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ; que ce différend n'est pas au nombre des domaines mentionnés au I des dispositions précitées de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, de sorte que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente, ainsi qu'elle l'a au demeurant elle-même admis, pour se prononcer sur ce litige ; que dès lors, la circonstance que les droits de taxe sur la valeur ajoutée en cause aient été partiellement mis en recouvrement le 6 novembre 2009 par un premier avis de mise en recouvrement, avant que la société requérante ait été informée du chiffre que l'administration se proposait de retenir comme base d'imposition à la suite de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 22 mars 2010, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les impositions litigieuses ont été établies à la suite d'une procédure irrégulière ;
En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4. 1° (...) les fournitures de prothèses dentaires par les dentistes et les prothésistes " ; qu'aux termes de l'article 271 du même code : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...). II. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est (...) celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 (...). / 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession desdites factures (...) " ;
5. Considérant qu'il est constant que la SARL Yves Probst exerce pour partie une activité de réalisation de prothèses dentaires exonérée de taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées du 1° de l'article 261-4 du code général des impôts ; que la société soutient que le service a refusé à tort la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux achats de matières premières réalisés en vue de la confection de ces prothèses dentaires ; que toutefois, la société ne pouvait légalement déduire la taxe grevant les factures afférentes à cette activité par application du coefficient de déduction, et notamment les factures d'achat de matières premières, dès lors que les biens en cause n'étaient pas utilisés pour la réalisation d'opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; que dès lors l'administration a fait une exacte application des dispositions précitées des articles 261 et 271 du code général des impôts ; que, par ailleurs, l'administration s'étant bornée, par application desdites dispositions, à refuser la déduction des seuls achats de matières premières concourant à la réalisation d'opérations exonérées, la requérante ne saurait utilement faire valoir que l'administration " a évalué à zéro ses achats de matières premières " ;
En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;
7. Considérant que l'administration fait valoir que la SARL Yves Probst a omis de déclarer une partie importante de son chiffre d'affaires et qu'eu égard, d'une part, à la nature et au caractère répété des anomalies dans la tenue de sa comptabilité, la société s'abstenant, de façon systématique, de déclarer la taxe résultant de sa comptabilité et, d'autre part, à la circonstance que ces manquements avaient déjà été signalés lors de précédents contrôles, la société requérante ne pouvait ignorer que sa gestion connaissait de graves anomalies à l'origine d'une minoration des recettes déclarées ; que, contrairement à ce que soutient la SARL Yves Probst, ces constatations concernent également l'année 2008, au titre de laquelle l'administration lui a réclamé un rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 9 718 euros ; que dans ces conditions, le service établit l'importance et le caractère répétitif des omissions constatées traduisant la volonté délibérée, de la part de la société, d'éluder une partie de l'impôt dû ; que l'administration a par suite apporté la preuve, dont la charge lui incombe, du caractère délibéré des manquements et de la mauvaise foi de la société requérante de nature à justifier les pénalités encourues ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qi précède que la SARL Yves Probst n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Yves Probst est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Yves Probst et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 15NC01113