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30/06/2016 | FRANCE | N°15NC01595

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 juin 2016, 15NC01595


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 166 500 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en l'absence de désignation d'un abattoir agréé par l'Etat et en raison des délais de délivrance de l'autorisation sollicitée pour le transport des animaux infectés.

Par un jugement n° 1301131 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une re

quête et des mémoires enregistrés le 20 juillet 2015, le 22 février 2016 et le 25 mars 2016, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 166 500 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en l'absence de désignation d'un abattoir agréé par l'Etat et en raison des délais de délivrance de l'autorisation sollicitée pour le transport des animaux infectés.

Par un jugement n° 1301131 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 20 juillet 2015, le 22 février 2016 et le 25 mars 2016, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301131 du 20 mai 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 166 500 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'Etat a commis une inaction fautive en n'agréant pas une entreprise pour l'abattage des poissons contaminés ;

- l'administration lui a délivré tardivement une autorisation de transport des poissons infectés vers des établissements allemands agréés ;

- ces fautes lui ont causé d'importants préjudices financiers.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'Etat n'a pas méconnu les articles 4, 5 et 6 de la directive 2006/88/CE, ni l'arrêté du 4 novembre 2008 qui l'a transposée ;

- l'Etat n'a pas délivré l'autorisation de transport des poissons à abattre dans un délai anormal ;

- il n'y a pas de lien direct de causalité entre les fautes et les préjudices allégués.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/88/CE du 24 octobre 2006 ;

- l'arrêté du 4 novembre 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 11 avril 2011, M.C..., pisciculteur à Abreschviller, signale à la direction départementale des populations de la Moselle, une forte mortalité de truites arc-en-ciel observée depuis le 28 mars (8 tonnes). A la suite d'une visite de cet élevage par le vétérinaire sanitaire et d'analyses, une septicémie hémorragique virale (SHV) est décelée. Par un arrêté du 18 avril 2011 portant déclaration d'infection de septicémie hémorragique virale de la pisciculture contaminée, le préfet prescrit une enquête épidémiologique, définit une zone de confinement sur le territoire de la commune d'Abreschviller ainsi qu'un périmètre de surveillance pour les communes hydrologiquement liées.

2. Dans le cadre de l'enquête épidémiologique, le vétérinaire sanitaire se rend le 18 avril 2011 à la pisciculture de Vasperville appartenant à M B...et prélève des échantillons de truites arc-en-ciel qui sont analysés au laboratoire national référent. Au vu de la déclaration de suspicion du risque d'infection, le préfet prend le 29 avril 2011, un arrêté de mise sous surveillance des installations appartenant à M.B..., puis le 2 mai 2011, au vu des résultats d'analyse confirmant la présence du virus SHV dans les piscicultures appartenant à M C...et MB..., un arrêté portant déclaration d'infection de septicémie hémorragique virale dans ces deux exploitations.

3. Cet arrêté prévoit notamment que les piscicultures d'Abreschviller, dont celle de M. B..., sont placées sous la surveillance du directeur départemental de la protection des populations de la Moselle ainsi que la création d'une zone de confinement comprenant les trois sites appartenant au requérant. Dans cette zone, l'arrêté prévoit, sous contrôle de l'administration, la destruction sans délai des poissons morts ou présentant des signes cliniques, le principe du confinement des autres poissons, des restrictions à la mise sur le marché en vue de la consommation humaine d'animaux ne présentant pas de signes cliniques, l'interdiction d'utiliser les poissons, oeufs ou gamètes provenant de la zone pour réempoissonner le milieu naturel, l'obligation d'arrêter des moyens appropriés de désinfection et la destruction des matières et déchets susceptibles d'être contaminés.

4. Ces prescriptions résultent de la directive 2006/88/CE du Conseil européen du 24 octobre 2006, qui prévoit notamment que les établissements de transformation procédant à l'abattage d'animaux d'aquaculture aux fins de lutte contre les maladies doivent être agréés par l'autorité compétente. La directive a été transposée en droit national par le décret n° 2008-1141 du 4 novembre 2008 modifiant le code rural et par l'arrêté du 4 novembre 2008 relatif aux conditions de la police sanitaire pour les animaux et produits d'aquaculture.

5. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'un expert désigné par l'appelant pour évaluer ses préjudices, que M. B...a, dans le but de remettre ses piscicultures dans un état sanitaire conforme à la législation le plus rapidement possible pour préparer la saison suivante en réalevinant ses bassins avec du poisson sain, décidé de détruire la totalité des poissons de ses deux piscicultures de Vasperviller et de Barville et de les livrer à l'équarrissage.

6. M. B...demande la condamnation de l'Etat à lui rembourser la totalité de ses pertes d'exploitation tenant à la perte de recettes dans la vente des poissons de ses deux piscicultures, le coût d'enlèvement et d'équarrissage des poissons morts, les coûts de nettoyage et désinfection des bassins, ainsi que les frais bancaires exposés en raison de l'absence de recettes et de l'impossibilité de faire face aux dépenses courantes de ses exploitations.

7. Il soutient que la responsabilité de l'Etat doit être engagée sur le fondement des fautes résultant de ce que l'Etat n'a agréé aucun établissement en France afin de procéder à l'abattage et à la transformation pour la consommation de poissons contaminés. Il fait également valoir que l'administration a mis plus de deux mois pour lui donner l'autorisation de transporter ses poissons vers une entreprise de transformation agréée située en Allemagne et que ce retard fautif est également à l'origine de ses préjudices.

Sur l'absence d'agrément d'un établissement français :

8. La seule circonstance non contestée par l'administration qu'aucun établissement n'ait été agréé en France par les pouvoirs publics pour transformer des poissons atteints de maladie en vertu de l'article 4 de la directive 2006/88/CE du 24 octobre 2006, de l'article 4 de l'arrêté du 20 novembre 2008 relatif aux conditions de la police sanitaire applicables aux animaux et aux produits d'aquaculture et de l'article 1-1 de l'arrêté du 8 juin 2006 relatif à l'agrément sanitaire des établissements mettant sur le marché des produits d'origine animale, n'est pas par elle-même de nature à démontrer que M. B... aurait subi un préjudice à raison de la carence alléguée. Il résulte en effet de l'instruction que M. B...dont l'exploitation est située en Alsace, se trouve à une proximité raisonnable d'établissements agréés situés en Belgique et en Allemagne, lui permettant de négocier dans un délai utile les conditions de l'abattage et de la transformation pour la consommation de son cheptel, dans l'un ou l'autre de ces établissements.

Sur les délais de délivrance d'une autorisation de transport des poissons chez un professionnel allemand agréé :

9. Il résulte de l'instruction que M. B...a demandé le 4 mai 2011 aux services de la préfecture l'autorisation de transporter ses poissons contaminés aux fins de transformation vers des établissements situés en Allemagne. Toutefois, les établissements qu'il avait pressentis, n'étaient pas titulaires de l'agrément nécessaire, ainsi que l'en a informé la préfecture dès le 12 mai suivant.

10. Le 19 mai 2011, M. B...a présenté une nouvelle demande concernant un autre établissement en Allemagne titulaire d'un agrément. Il soutient qu'en ne lui donnant une réponse favorable que le 12 juillet 2011, l'administration a commis un retard fautif à l'origine de ses préjudices et de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

11. Il résulte toutefois de l'instruction que le requérant avait fourni à l'administration un numéro d'agrément erroné qui ne lui a pas permis d'identifier immédiatement l'établissement contacté. Il n'est pas contesté que l'administration a, à la suite des recherches qu'elle a conduites, permis à M B...de retrouver ces références et d'engager la procédure avec l'établissement sollicité qui a cependant déclaré le 6 juillet refuser de recevoir les poissons destinés à l'équarissage. Finalement, l'établissement n'a donné son accord que le 12 juillet suivant et l'administration a délivré le jour même à l'appelant, le certificat sanitaire autorisant le transport du poisson. Dans ces conditions, l'administration n'a pas accordé l'autorisation dans un délai anormalement long et n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent en conséquence être accueillies.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 15NC01595


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01595
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : BURKATZKI, LUDWIG, BATON ET MICLO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-06-30;15nc01595 ?
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