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31/05/2016 | FRANCE | N°15NC00378

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 31 mai 2016, 15NC00378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société E. Woo Technology, devenue la société Vatech France, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 407 400,35 euros, augmentée des intérêts moratoires à compter du 23 septembre 2009 au titre du décompte de liquidation du marché résilié ainsi que la somme de 50 000 euros au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale.

Par un jugement n° 1002140 du 27 novembre 2014,

le tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, a condamné les Hôpitaux universitai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société E. Woo Technology, devenue la société Vatech France, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 407 400,35 euros, augmentée des intérêts moratoires à compter du 23 septembre 2009 au titre du décompte de liquidation du marché résilié ainsi que la somme de 50 000 euros au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale.

Par un jugement n° 1002140 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, a condamné les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à verser à la société Vatech France la somme de 407 400,35 euros assortie des intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 5 juin 2010 et, d'autre part, a rejeté sa demande de réparation au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 janvier 2015 et 10 septembre 2015 sous le n° 15NC00196, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, représentés par la SELARL CM Affaires Publiques, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 novembre 2014 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg les a condamnés à verser à la société Vatech France la somme de 407 400,35 euros, augmentée des intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 5 juin 2010 au titre du décompte de liquidation du marché résilié ;

2°) de rejeter la demande de la société Vatech France présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de condamner la société Vatech France à lui rembourser la somme de 427,30 euros au titre de divers frais notamment d'huissier qu'elle a exposés ;

4°) à titre subsidiaire, avant dire droit de désigner un expert ;

5°) de mettre à la charge de la société Vatech France, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance et une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en appel.

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, la demande de la société Vatech France au titre du décompte de liquidation du marché résilié est irrecevable en application de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales fournitures courantes et services (CCAG-FCS) dès lors qu'elle ne leur a pas adressé un mémoire en réclamation dans un délai de trente jours à compter de la naissance du différend résultant de la décision 16 juillet 2009 de suspension du paiement des factures de la société ;

- cette demande est irrecevable au titre des mêmes stipulations dès lors que le premier mémoire en réclamation est intervenu le 19 avril 2009 soit plus de trente jours après la notification de la décision de résiliation du marché ;

- la société Vatech France n'a pas droit au paiement des prestations relatives à la formation du personnel dès lors qu'elle n'a pas intégralement exécuté ses obligations prévues au marché ;

- il en va de même s'agissant des prestations relatives aux tomographes en raison des défauts dans la qualité des images et dans le temps de leur reconstruction qui sont imputables à un manquement de la société à ses obligations contractuelles, la portée de l'ensemble des prescriptions techniques du cahier des clauses techniques particulières du marché devant s'apprécier au regard des finalités médicales décrites à l'article 1.1 de ce document ;

- ces équipements ne respectent pas les normes de dosimétrie ;

- les lancements d'impression sur les reprographes compatibles avec Dicom Print ainsi que la gravure sur CD et DVD des clichés connaissent des dysfonctionnements ;

- en raison de ces dysfonctionnements, ils ont dû passer un avenant au marché pour la fourniture d'un équipement panoramique dit " PetP ", qui s'est avéré par ailleurs défaillant, et renoncer à l'utilisation de certains équipements ;

- le moyen tiré de l'absence de mise en demeure préalable à la résiliation est inopérant en application des stipulations du marché ;

- le moyen tiré du défaut de motivation de la mise en demeure est inopérant en application des stipulations du marché et, en tout état cause, n'est pas fondé ;

- la société a été mise à même de présenter ses observations ;

- le moyen tiré de ce que le courrier du 15 décembre 2009 n'est pas une décision de résiliation est nouveau en appel et est, par suite, irrecevable ;

- la mise en service ne vaut pas réception des prestations du marché, qui doit faire l'objet d'un procès-verbal spécifique en vertu des articles 6.1 et 6.2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché ;

- les nombreux dysfonctionnements constatés justifient le bien-fondé de la résiliation ;

- la société ne peut dès lors prétendre à une indemnité en application des stipulations de l'article 15.1 du CCAP du marché ;

- à titre subsidiaire, la demande de la société Vatech France tendant à la réparation du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale ne peut qu'être rejetée en l'absence de demande préalable dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de résiliation en application des stipulations de l'article 51-1 du CCAG-FCS ;

- ces préjudices ne sont, en tout état de cause, pas établis ;

- la société ne justifie pas de sa demande de paiement correspondant au prix du marché ;

- la société ne peut prétendre à des intérêts moratoires compte tenu de la suspension du paiement des factures, qui n'a pas été contestée ;

- ils ont exposé des frais de stockage, de transport, de gardiennage et d'huissier en raison de l'absence de reprise du matériel par la société intimée pour la somme de 427,30 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 août 2015, la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD, venant aux droits de la société Vatech France, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, d'établir le décompte de résiliation du marché à la somme de 407 400,35 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 23 septembre 2009 et de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale qu'elle estime avoir subis du fait de la résiliation du marché ;

3°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance est recevable dès lors qu'en l'absence de décompte de liquidation du marché résilié, le délai de trente jours prévu à l'article 34 du CCAG-FCS n'est pas opposable à sa réclamation en date du 15 avril 2010 ;

- cette demande est en tout état de cause recevable dès lors qu'elle a adressé un mémoire en réclamation le 28 décembre 2009 ;

- le personnel des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) a bénéficié d'une formation par un ingénieur d'application du 14 au 17 avril 2009 puis le 2 octobre 2009 ;

- l'éventuel non-respect des formalités liées à la formation ne permet pas de prouver l'absence de réalisation des formations ;

- les dysfonctionnements relatifs à la qualité des images et à leur temps de reconstruction sont la conséquence de demandes spécifiques des HUS ;

- les dysfonctionnements en termes d'impression et de gravure résultent des demandes des HUS en termes d'évolution technique des tomographes ;

- s'agissant de la dosimétrie, les valeurs des doses sont conformes aux normes en vigueur ;

- les besoins du marché ont été mal définis par les HUS qui souhaitaient en réalité une technologie plus sophistiquée que celle résultant des stipulations du CCTP ;

- l'avenant n°1 au marché a été passé pour répondre aux besoins résultant de l'accroissement de l'activité des HUS ;

- l'équipement panoramique dit " PetP " fonctionnait parfaitement et le matériel a été utilisé pendant plusieurs mois avant la résiliation ;

- à titre subsidiaire, en cas d'annulation du jugement, le courrier du 15 décembre 2009 ne peut être considéré comme une décision de résiliation ;

- la procédure de résiliation est irrégulière dès lors que la mise en demeure du 30 octobre 2009 ne saurait constituer celle préalable à une décision de résiliation et que celle du 2 décembre 2009 n'était pas motivée ; les mises en demeure ne l'ont pas invitée à présenter ses observations dans un délai déterminé ;

- les HUS avaient l'obligation de dresser le procès-verbal de réception après livraison du matériel ;

- la décision de résiliation est disproportionnée dès lors que les problèmes d'utilisation n'ont jamais empêché les appareils de fonctionner en pratique courante.

Par ordonnance du 22 septembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 13 octobre 2015.

Un mémoire présenté pour la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD a été enregistré le 27 novembre 2015.

II. Par une requête enregistrée le 27 février 2015 sous le n° 15NC00378, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, représentées par la SELARL CM Affaires Publiques, demandent à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 novembre 2014 ;

2°) de mettre à la charge de la société Vatech France, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance et une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en appel.

Ils soutiennent que :

- ils sont bien fondés à demander le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative dès lors que la société Vatech France est en situation de fragilité financière ;

- pour les mêmes moyens que ceux exposés à l'appui de sa requête n° 15NC00196, ils sont bien fondés à demander le sursis à exécution de ce jugement sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative.

La requête a été communiquée à la société Vatech France, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, ainsi que celles Me B...pour la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD.

1. Considérant que par un acte d'engagement du 15 décembre 2008, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) ont confié à la société E. Woo France, devenue la société Vatech France, puis Vatech Ewoo Holdings Co., LTD, (ci-après société Vatech), le lot n°2 d'un marché de " fourniture, installation et mise en service de deux tomographes 3D faisceau conique par RX " pour un prix forfaitaire de 388 000,34 euros toutes taxes comprises (TTC) ; qu'un avenant au marché a été conclu le 11 mars 2009 ayant pour objet la fourniture d'un équipement panoramique dentaire dit " PetP " pour un montant de 19 400 euros TTC ; que la société Vatech a adressé aux HUS trois factures d'un montant global de 407 400,35 euros en règlement de ses prestations ; que par une lettre du 16 juillet 2009, les HUS ont décidé de suspendre le paiement de ces factures, puis ont adressé à la société Vatech des mises en demeure en date des 30 octobre et 2 décembre 2009 ; que par une lettre du 15 décembre 2009, les HUS ont résilié le marché aux frais et risques de la société Vatech ; que la société a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation des HUS à lui verser, d'une part, la somme de 407 400,35 euros au titre du décompte de liquidation du marché résilié et, d'autre part, la somme de 50 000 euros au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale qu'elle estimait avoir subis en raison de la décision de résiliation du marché à ses frais et risques ; que par un jugement du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, a condamné les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à verser à la société Vatech la somme de 407 400,35 euros assortie des intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 5 juin 2010 et a rejeté sa demande au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale, et, d'autre part, a rejeté la demande reconventionnelle présentée par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg ; que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg relèvent appel de ce jugement et demandent à la cour d'en prononcer le sursis à exécution ;

2. Considérant que les requêtes n° 15NC00196 et n° 15NC00378 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales fournitures courantes et services (CCAG-FCS), applicable au marché : " Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8.7 du même document contractuel : " Cas de résiliation du marché : / En cas de résiliation du marché, quelle qu'en soit la cause, une liquidation des comptes est effectuée ; les sommes restant dues par le titulaire sont immédiatement exigibles " ; qu'aux termes de l'article 30.1 de ce même document : " Le marché résilié est liquidé en tenant compte, d'une part, des prestations terminées et admises et, d'autre part, des prestations en cours d'exécution dont la personne responsable du marché accepte l'achèvement. / Le décompte de liquidation du marché qui contient éventuellement l'indemnité fixée à l'article 31 est arrêté par décision de la personne publique et notifié au titulaire (...) " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société Vatech a adressé aux HUS le 4 juin 2009 trois factures d'un montant total de 407 400,35 euros correspondant au prix du marché modifié par l'avenant n°1 ; que par une lettre du 16 juillet 2009, les HUS ont suspendu le paiement de ces factures au motif que le procès-verbal de réception n'avait pas été reçu et que la formation complète des utilisateurs n'avait pas été effectuée ; que la décision du 16 juillet 2009 de suspension du paiement présentait ainsi un caractère provisoire et avait vocation à devenir caduque dès la production par la société intimée des documents requis ; que, dans ces conditions, cette décision ne saurait être regardée comme un refus ferme et définitif de procéder au règlement des prestations réalisées et n'a pas ainsi fait naître un différend au sens des stipulations précitées de l'article 34 du CCAG-FCS ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des stipulations précitées des articles 8.7 et 30.1 du CCAG-FCS, qu'en cas de résiliation du marché, il incombe à la personne responsable du marché d'arrêter le décompte de liquidation du marché et de le notifier à l'entreprise ; qu'il résulte de l'instruction que les HUS n'ont pas arrêté le décompte de liquidation du marché ; que, par suite, le délai de trente jours prévu par les stipulations précitées de l'article 34 du CCAG-FCS n'est pas opposable à la réclamation préalable de la société Vatech du 15 avril 2010 tendant au paiement des prestations exécutées au titre du marché résilié, la seule résiliation du marché ne pouvant être regardée comme ayant fait naître le différend relatif au solde du marché, objet de la réclamation de la société ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les HUS ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas accueilli les fins de non-recevoir qu'ils avaient opposées à la demande de la société Vatech ;

Sur l'établissement du décompte de liquidation du marché :

8. Considérant que la société Vatech a demandé le paiement des sommes qu'elle estimait lui êtres dues en règlement des prestations exécutées au titre du marché modifié par l'avenant du 11 mars 2009 pour la somme totale de 407 400,35 euros et correspondant à la facture n° FC0028 relative à la livraison de l'équipement panoramique dentaire dit " PetP " d'un montant de 19 400,01 euros TTC et aux factures n° FC0025 et FC0027 relatives à la fourniture de deux tomographes 3D à faisceau conique type Master 3D, d'un montant chacune de 194 000,17 euros TTC ; que les HUS soutiennent que la société Vatech n'est pas fondée à demander le paiement de ces prestations en raison des manquements qu'elle a commis dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;

En ce qui concerne les prestations relatives à la formation du personnel :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'article 3 du CCTP du marché impose au titulaire du marché de former les utilisateurs mais ne définit toutefois pas l'étendue de cette obligation de formation ; qu'il résulte des mails des 25 mars, 2 avril, 17 et 22 septembre 2009, que les personnels des HUS ont bénéficié d'une formation sur écran les 9, 14, 15, 16 et 17 avril 2009 ainsi que d'une formation sur machine le 2 octobre 2009 ; qu'en outre, et alors que les HUS n'apportent aucun élément probant de nature à établir le défaut ou l'insuffisante qualité de la formation de son personnel, les mises en demeure des 30 octobre et 2 décembre 2009 ainsi que la décision de résiliation du 15 décembre 2009 ne mentionnent aucune carence de la société Vatech dans la formation dispensée au personnel du centre hospitalier ou dans l'accomplissement des formalités relatives à cette prestation prévues au CTTP du marché ; que, dans ces conditions, aucune faute contractuelle ne saurait être retenue à l'encontre de la société Vatech au titre des prestations qu'elle a exécutées en matière de formation du personnel ;

En ce qui concerne les tomographes, la connexion des équipements et l'archivage des données :

10. Considérant, en premier lieu, que les HUS soutiennent que les dysfonctionnements liés à la qualité des images des tomographes et à la lenteur de leur reconstruction sont imputables à la société Vatech qui a pris l'initiative de fournir un capteur plus performant que le besoin exprimé dans les stipulations du marché ; que selon l'article 1.2 du CCTP du marché : " La solution proposée réalisera en acquisition directe des clichés numériques à l'aide d'un capteur plan. Le champ de vue sera adapté à l'activité (minimum 12*16) " ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du devis descriptif et estimatif du 16 octobre 2008 ainsi que des factures du 4 juin 2009 que la société Vatech s'est engagée sur un capteur de champ de vue de 20*19 à 0,3 voxel ; qu'à la suite d'une demande des HUS, elle a ensuite fourni un capteur de champ de vue 24*19 à 0,08 voxel ; que, d'une part, il ne résulte pas de l'instruction que les modifications mises en oeuvre par la société Vatech auraient engendré une dégradation de la qualité des images ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction et notamment des courriers de la société Vatech des 28 décembre 2009 et 15 avril 2010 que la lenteur du processus de reconstruction des images résulte de l'augmentation de la taille du champ de vue couplée à une diminution de la taille du voxel, évolutions souhaitées par les HUS ; que, contrairement à ce que soutiennent ces derniers, aucune obligation de résultat en termes de performances techniques des prestations commandées par la collectivité publique ne résulte de l'article 1er du CCTP ou d'une autre stipulation du marché ; que, par suite, et dès lors qu'il résulte de l'instruction que le dysfonctionnement procède d'une évolution technique commandée par les HUS, aucun manquement ne serait être retenu à l'encontre de la société Vatech dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;

11. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société Vatech a assuré la connexion des tomographes à des reprographes compatibles avec le format d'impression Dicom Print ainsi que l'intégration d'un système de gravure sur CD ou DVD couplé avec un viewer permettant la visualisation des images au format Dicom sur un PC ; que les défauts d'impression et les difficultés de gravure constatées résultent de l'augmentation de la taille du champ de vue procédant, ainsi qu'il a été dit, d'une demande des HUS et ne sont donc pas imputables à la société Vatech qui n'était pas tenue à une obligation de résultat en vertu des stipulations du marché ; qu'il suit de là qu'aucune faute ne saurait être retenue à l'égard de la société Vatech ;

En ce qui concerne la dosimétrie :

12. Considérant que l'article 1.2 du CCTP du marché obligeait la société Vatech en matière de dosimétrie à prévoir un système de mesure de la dose délivrée par unité de surface ; que, d'une part, si les HUS ont signalé un dysfonctionnement du système de mesure dans la mise en demeure du 30 octobre 2009, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté que les équipements fournis par la société Vatech ont intégré un système de calcul de la dose délivrée ; que, d'autre part, si les HUS soutiennent que le calcul de la dose théoriquement mesurée ne correspond pas à la dose réellement délivrée, ils ne le démontrent pas alors qu'il résulte de l'instruction et notamment des photographies annexées au mail du 21 avril 2009 de la société Vatech et de son courrier du 28 décembre 2009 que les valeurs des doses, qui sont indiquées à l'écran et sur les impressions réalisées, sont conformes aux normes en vigueur : qu'il suit de là qu'aucun manquement de la société Vatech à ses obligations contractuelles ne saurait être retenu ;

En ce qui concerne l'équipement panoramique dentaire dit " PetP " :

13. Considérant que les HUS soutiennent qu'en raison d'une impossibilité technique de réaliser avec les master 3DS, objet du marché initial, des panoramiques dentaires standard, ils ont été contraints de conclure l'avenant du 11 mars 2009 pour acquérir un équipement panoramique dit " PetP ", qui s'est avéré par ailleurs défaillant ; que, d'une part, il résulte de l'instruction que cet équipement, qui permet de réduire le temps de reconstruction des images, a été commandé par les HUS uniquement en raison de l'augmentation importante de l'activité dentaire sur le site de Hautepierre ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction que les problèmes liés à la qualité des images de l'équipement panoramique " PetP " avaient pour cause un mauvais positionnement des patients ; que, par suite, et alors d'ailleurs que la mise en demeure du 30 octobre 2009 n'a fait état d'aucun dysfonctionnement de l'équipement dit " PetP ", aucun manquement de la société Vatech à ses obligations contractuelles ne saurait être retenu ;

14. Considérant qu'ainsi, et sans qu'y fasse obstacle l'absence de procédure de mise en service et de réception formelle, les HUS ne sont pas fondés à soutenir que les prestations en litige, alors même que leur performance serait inférieure à leurs attentes, n'ont pas été exécutées conformément aux stipulations du marché avant que n'intervienne la décision de résiliation du 15 décembre 2009 ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, que les HUS ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg les a condamnés à verser la somme de 407 400,35 euros à la société Vatech au titre du décompte de liquidation du marché résilié ;

Sur les intérêts :

16. Considérant que si les HUS soutiennent que la société Vatech ne peut prétendre à des intérêts moratoires en raison de la suspension du paiement des factures prononcée le 16 juillet 2009, il résulte de ce qui a été précédemment dit que la société Vatech a droit au paiement de ses factures au titre des prestations exécutées conformément aux stipulations du marché ; qu'il suit de là que les HUS ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a assorti la somme de 407 400,35 euros au titre du décompte de liquidation du marché résilié des intérêts moratoires au taux contractuel ;

Sur la demande de condamnation présentée par les HUS :

17. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'aucune faute ne saurait être reprochée à la société Vatech dans l'exécution de ses obligations contractuelles ; qu'il s'ensuit que les HUS ne sont pas fondés à demander la condamnation de la société Vatech à l'indemniser des conséquences onéreuses de la résiliation du marché prononcée aux frais et risques de l'entreprise le 15 décembre 2009 ; qu'il suit de là que leur demande tendant au remboursement des frais d'huissier et de gardiennage du matériel en litige, évalués à la somme de 427,30 euros, ne peut être que rejetée ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg les a condamnés à verser à la société Vatech la somme de 407 400,35 euros au titre du décompte de liquidation du marché résilié et a rejeté leur demande tendant au paiement de la somme de 427,30 euros au titre des conséquences onéreuses du marché résilié ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire par la société Vatech :

19. Considérant qu'eu égard au sens du présent arrêt, qui donne entièrement satisfaction aux conclusions présentées à titre principal par la société Vatech, il n'y a pas lieu de se prononcer sur ses conclusions, présentées à titre subsidiaire, tendant à la condamnation des Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice économique et de l'atteinte à sa réputation commerciale, qu'elle estime avoir subis du fait de la résiliation du marché ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

20. Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions des Hôpitaux universitaires de Strasbourg tendant à l'annulation du jugement n° 1002140 du 27 novembre 2014 du tribunal administratif de Strasbourg ; qu'il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 15NC00378 par laquelle les Hôpitaux universitaires de Strasbourg demandent qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, enregistrée sous le n° 15NC00196, est rejetée.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 15NC00378 des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Article 3 : Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg verseront à la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg et à la société Vatech Ewoo Holdings Co., LTD.

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15NC00196, 15NC00378


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00378
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation.


Composition du Tribunal
Président : M. TREAND
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : CM.AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-05-31;15nc00378 ?
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