Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Socotec France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la commune de Strasbourg à lui verser la somme de 48 624 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du rallongement de sa mission de contrôle technique dans le cadre de la construction de la cité de la musique et de la danse.
Par un jugement n° 1304516 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 février 2015 et 2 octobre 2015, la société Socotec France, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 18 décembre 2014 ;
2°) de condamner la commune de Strasbourg à lui verser la somme de 48 624 euros, assortie des intérêts moratoires à compter de la date d'enregistrement de sa requête ;
3°) de condamner la commune de Strasbourg aux dépens ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Strasbourg le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ne se sont pas prononcés sur le bouleversement de l'économie du contrat ;
- ils ne pouvaient rejeter sa demande au motif qu'elle n'apportait pas la preuve d'une faute du maître de l'ouvrage dès lors que le bouleversement de l'économie du contrat n'implique pas l'administration d'une telle preuve ;
- l'économie du contrat a été bouleversée en raison d'une charge de travail supplémentaire imprévisible lors de la conclusion du contrat à la suite des insuffisances et des erreurs contenues dans les plans d'exécution du maître d'oeuvre, des retards de livraison de ces plans ainsi que de diverses malfaçons et non-conformité de l'ouvrage.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2015, la commune de Strasbourg, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Socotec France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges n'ont pas omis de se prononcer sur le moyen tiré du bouleversement de l'économie du contrat dès lors que ce moyen n'avait pas été invoqué par la société ;
- aucune faute ne saurait être reprochée au maître de l'ouvrage ;
- la société ne peut se prévaloir de l'existence d'une sujétion imprévue et d'un bouleversement de l'économie du contrat.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la responsabilité contractuelle sans faute de la collectivité publique cocontractante au titre des difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait qui trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat procède d'une cause juridique distincte de la responsabilité pour faute de la collectivité publique et n'est pas d'ordre public. Il suit de là que les conclusions présentées par la société Socotec France sur le terrain de la responsabilité contractuelle sans faute de la commune de Strasbourg, qui n'ont pas été soulevées en première instance, sont nouvelles en appel, et, par suite, irrecevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la commune de Strasbourg.
1. Considérant que par un acte d'engagement du 30 août 1999, la commune de Strasbourg a confié à la société Socotec France la mission de contrôle technique afférente à la réalisation de la cité de la musique et de la danse, destinée à accueillir les activités du conservatoire national de région, pour un marché à prix forfaitaire de 49 613 euros hors taxes ; que la société Socotec France a demandé par courrier du 12 juin 2013 à la commune de Strasbourg de l'indemniser du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait du rallongement de sa mission de contrôle technique pour la somme de 48 624 euros ; que la société Socotec France relève appel du jugement du 18 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de ce préjudice ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que la société Socotec France soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la responsabilité de la commune de Strasbourg était engagée en raison des difficultés qu'elle a rencontrées dans l'exécution du marché et qui ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que la société Socotec France n'avait toutefois pas présenté de demande sur ce fondement, qui n'est pas d'ordre public, se bornant à invoquer une faute de la maîtrise d'oeuvre ; qu'il suit de là que la société Socotec France n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;
Sur la demande indemnitaire :
3. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics ;
4. Considérant que la société Socotec France demande en appel la condamnation de la commune de Strasbourg sur le seul fondement des difficultés rencontrées dans l'exécution de son marché à forfait en raison d'une charge de travail supplémentaire imprévisible lors de la conclusion du contrat ; que, toutefois, la responsabilité contractuelle sans faute de la collectivité publique cocontractante au titre des difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait qui trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat procède d'une cause juridique distincte de la responsabilité pour faute de la personne publique et n'est pas d'ordre public ; qu'il suit de là que les conclusions présentées par la société Socotec France sur ce terrain, qui n'a pas été invoqué en première instance, sont nouvelles en appel, et, par suite, irrecevables ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Socotec France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Strasbourg aux dépens ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société Socotec France une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Strasbourg sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Socotec France est rejetée.
Article 2 : La société Socotec France versera à la commune de Strasbourg une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Socotec France et à la commune de Strasbourg.
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15NC00311