La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/04/2016 | FRANCE | N°15NC01279

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 07 avril 2016, 15NC01279


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1405862 du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juin 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1405862 du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juin 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 janvier 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 28 juillet 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision lui refusant un titre de séjour n'est pas motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 ainsi que celles de l'article 2 du décret du 6 juin 2001 ;

- elle est entachée d'erreur de droit dans la mesure où le préfet, pour une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne pouvait exiger la production d'un visa de long séjour et d'une autorisation de travail avant de se prononcer sur son droit au séjour ;

- le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il répondait aux conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu prévu à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné doit être annulée en raison de l'illégalité des deux précédentes décisions.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 octobre 2015, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par une décision du 28 avril 2015, le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Les parties, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, ont été informées que l'arrêt de la cour était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public tiré de ce que le pouvoir de régularisation du préfet peut servir de fondement à la décision en litige, en se substituant à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur la base duquel le préfet a pris l'arrêté contesté.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Dhiver a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain né le 2 septembre 1970 et entré en France le 17 novembre 2000 selon ses déclarations, a sollicité, le 25 mars 2013, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 28 juillet 2014, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai ; que, par un jugement du 20 janvier 2015, dont M. B...relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de ce que la décision lui refusant un titre de séjour ne serait pas motivée ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

4. Considérant que M.B..., qui ne peut utilement se prévaloir des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en faisant état de l'ancienneté de son séjour en France et de la présence sur le territoire de deux de ses soeurs ; que toutefois, l'intéressé, qui déclare être entré régulièrement en France le 17 novembre 2000, ne produit aucun document permettant d'attester de la date exacte de son arrivée sur le territoire ni de sa présence pour les années 2000, 2001, 2006 et 2012 ; que, s'agissant des autres années, les pièces qu'il fournit sont, pour la plupart, de faible valeur probante et permettent tout au plus de justifier, avant 2013, d'une présence ponctuelle au cours de l'année 2005 puis de 2007 à 2011 ; qu'en outre, le requérant, célibataire et sans enfant, a vécu au moins jusqu'à l'âge de 30 ans au Maroc où résident toujours ses parents, une autre de ses soeurs et son frère ; que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet, qui a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé, n'a pas, commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile en retenant que l'admission exceptionnelle au séjour de M.B..., au titre de la vie privée et familiale, ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard de motifs exceptionnels ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, traitant ainsi de ce point au sens de l'article 9 de cet accord, il fait obstacle à l'application des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers lors de l'examen d'une demande d'admission au séjour présentée par un ressortissant marocain au titre d'une telle activité ; que cet examen ne peut être conduit qu'au regard des stipulations de l'accord, sans préjudice de la mise en oeuvre par le préfet du pouvoir discrétionnaire dont il dispose pour apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité de délivrer à titre de régularisation un titre de séjour à un étranger ne remplissant pas les conditions auxquelles cette délivrance est normalement subordonnée, pouvoir dont les stipulations de l'accord ne lui interdisent pas de faire usage à l'égard d'un ressortissant marocain ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'un ressortissant marocain ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour exercer une activité salariée ; que, par suite, les moyens soulevés par M. B...tirés de la violation de ces dispositions sous cet angle, pris en toutes ses branches, de la méconnaissance de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article 2 du décret du 6 juin 2001, dès lors que le préfet n'aurait pas transmis sa demande à la direction régionale de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sont inopérants à l'appui de sa contestation de la légalité du refus de titre de séjour ;

7. Considérant, d'autre part, que le préfet du Bas-Rhin ne pouvait légalement rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. B...au titre d'une activité salarié sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il y a lieu de substituer à ce fondement erroné celui tiré du pouvoir dont dispose le préfet de régulariser ou non la situation d'un étranger, dès lors que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation que lorsqu'elle examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, si M. B...se prévaut de trois promesses d'embauche, au demeurant anciennes, comme chauffeur livreur et cuisinier puis d'un contrat qu'il présente comme étant à durée indéterminée en qualité de serveur, ces éléments ne constituent pas à eux seuls des motifs exceptionnels ; qu'en outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier ni n'est allégué que le requérant aurait déjà exercé une activité professionnelle en France ou qu'il disposerait d'une expérience dans les métiers précités ; qu'il suit de là qu'en ne régularisant pas la situation de M. B..., le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation sur cet autre point ;

8. Considérant, enfin, qu'en raison des éléments propres à la situation personnelle et familiale de M. B...énumérés au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en l'absence de toute illégalité entachant la décision refusant un titre de séjour à M.B..., le moyen tiré de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée, par voie de conséquence de l'illégalité de cette autre décision, ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de la méconnaissance de son droit d'être entendu préalablement à l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français, principe général du droit de l'Union européenne repris à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Strasbourg ;

11. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité des décisions accordant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en l'absence de toute illégalité entachant les décisions refusant un titre de séjour à M. B...et portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que les décisions lui accordant un délai de départ volontaire et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné doivent être annulées, par voie de conséquence de l'illégalité de ces autres décisions, ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

''

''

''

''

3

N° 15NC01279


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01279
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-04-07;15nc01279 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award