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22/03/2016 | FRANCE | N°14NC02343

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 22 mars 2016, 14NC02343


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 juin 2014 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1403137 du 16 septembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête enregistrée le 29 décembre 2014, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 juin 2014 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1403137 du 16 septembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 décembre 2014, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 septembre 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 juin 2014 pris à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pendant la durée de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour.

Il soutient que :

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;

- le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas sa demande au regard de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- il peut prétendre à l'obtention d'un titre sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2015, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 27 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Kohler, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que par un arrêté du 12 juin 2014, le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer un titre de séjour à M.C..., ressortissant turc, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé ; que M. C...relève appel du jugement du 16 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. C...reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige, de l'insuffisante motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ainsi que de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination, de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre, l'autorité compétente peut, alors qu'elle ne dispose pas en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en oeuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation ; que, dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées ; qu'en revanche, il en va autrement dans le cas où l'administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit ; que s'il est loisible, dans ce dernier cas, à l'autorité compétente de définir des orientations générales pour l'octroi de ce type de mesures, l'intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif ;

4. Considérant, s'agissant de la délivrance des titres de séjour, qu'il appartient au législateur, sous réserve des conventions internationales, de déterminer les conditions dans lesquelles les étrangers sont autorisés à séjourner sur le territoire national ; que, si les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile régissant la délivrance des titres de séjour n'imposent pas au préfet, sauf disposition spéciale contraire, de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonné le droit d'obtenir ce titre, la faculté pour le préfet de prendre, à titre gracieux et exceptionnel, une mesure favorable à l'intéressé pour régulariser sa situation relève de son pouvoir d'appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; qu'il est loisible au ministre de l'intérieur, chargé de mettre en oeuvre la politique du Gouvernement en matière d'immigration et d'asile, alors même qu'il ne dispose en la matière d'aucune compétence réglementaire, d'énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation ; que c'est toutefois au préfet qu'il revient, dans l'exercice du pouvoir dont il dispose, d'apprécier dans chaque cas particulier, compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'étranger, l'opportunité de prendre une mesure de régularisation favorable à l'intéressé ;

5. Considérant qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner la demande de titre de séjour que M. C... avait présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 au regard de la circulaire susvisée du 28 novembre 2012 doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

7. Considérant que M. C...se prévaut de sa présence en France depuis 2008 et de son appartenance à la communauté Emmaüs en qualité de compagnon ; qu'en considérant, au vu de ces seuls éléments, que l'admission au séjour de l'intéressé ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard des motifs exceptionnels que celui-ci faisait valoir, le préfet du Haut-Rhin n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée sur l'un ou l'autre de ces points ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que la seule circonstance que M. C...serait présent en France depuis 2008 n'est pas de nature à caractériser l'existence de liens personnels et familiaux en France tels que le refus de titre de séjour en litige puisse être regardé comme portant une atteinte disproportionnée au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale ni, par suite, comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N° 14NC02343


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC02343
Date de la décision : 22/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. TREAND
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : ROUSSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-22;14nc02343 ?
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