Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La communauté de communes du Pays Sous-Vosgien a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner solidairement les sociétésC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier, Scanzi à lui verser la somme de 19 650 euros en réparation des désordres affectant le sol des bureaux du rez-de-chaussée de son siège et, d'autre part, de condamner solidairement les sociétés Santini et C...à lui verser la somme de 6 500 euros au titre des désordres affectant les murs de l'immeuble.
Par un jugement n° 1300306 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 avril 2014, la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien, représentée par la SELAS Bruno Kern Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 20 février 2014 ;
2°) de condamner solidairement les entreprisesC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et Scanzi à lui verser les sommes de 9 650 euros HT pour la remise en état du revêtement de sol des bureaux du rez-de-chaussée et de 10 000 euros pour réparer le trouble de jouissance causé par ces désordres ;
3°) de condamner le groupement de maîtrise d'oeuvre à lui verser la somme de 6 500 euros HT en réparation des désordres relatifs au défaut d'assainissement des murs ;
4°) de mettre à la charge des parties perdantes les frais d'expertise taxés à la somme de 5 352,99 euros ;
5°) de mettre à la charge solidaire des entreprisesC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et Scanzi le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les désordres affectant le revêtement de sol créent un risque pour la sécurité des agents compte tenu de la destination des locaux qui ont pour vocation de recevoir des bureaux et du personnel de la structure intercommunale et rendent l'ouvrage impropre à sa destination ;
- les désordres ont pour origine l'absence d'assainissement des murs anciens et relèvent donc d'une erreur de conception de l'ouvrage ;
- ils sont également imputables à l'entreprise chargée de la pose des revêtements de sol qui a accepté un support non conforme ;
- les travaux nécessaires pour remédier aux désordres sont estimés à 9 650 euros HT ;
- elle a également subi un préjudice de jouissance évalué à 10 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2014, la société Serge Santini Ingénierie, représentée par la SCP Nicolier-Simplot, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien ;
2°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien n'apporte aucun nouvel élément permettant d'établir la nature décennale des désordres ;
- la société Serge Santini Ingénierie n'est intervenue ni dans le descriptif des travaux, ni dans le choix conceptuel du revêtement du sol.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 août 2014, le groupement d'intérêt économique Ceten Apave, représentée par la SELARL GVB, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien ;
2°) à titre subsidiaire, de réduire les prétentions de la communauté de communes appelante ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner les sociétésC..., Serge Santini Ingénierie, Chauvier et Scanzi à la garantir intégralement des condamnations mises à sa charge ;
4°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien le versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les désordres qui ont affecté le revêtement du sol ne présentent pas le caractère de gravité suffisant pour permettre de les considérer comme de nature décennale et ce d'autant que des possibilités de réaffectation du personnel ont pu être mises en oeuvre ;
- le contrôleur technique a pour mission la prévention des aléas techniques mais ne participe directement ni à la conception de l'ouvrage ni à l'exécution des travaux ;
- le contrôleur technique n'a pas de mission générale de conseil ;
- dans le cadre de sa mission, le contrôleur technique a attiré l'attention sur les problèmes d'humidité ;
- l'expert a surévalué le coût de la reprise des sols par la pose d'un carrelage ;
- la part de responsabilité retenue à l'encontre du contrôleur technique ne saurait qu'être minime par rapport à celle des intervenants directs à l'acte de construire tenus pas une obligation de résultat sur l'ouvrage.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2014, M.C..., représenté par la SCP Tournier Mayer-Blondeau Giacomoni Dichamp Martinval, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien ;
2°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le caractère décennal des désordres n'est pas établi ;
- la cause des désordres est discutable puisque le cabinet d'expert Saretec a considéré qu'était en cause une trop forte humidité du support lors de la pose du linoléum ;
- l'expert judiciaire s'appuie sur les simples dires de la société Chauvier qui a indiqué avoir contrôlé l'humidité du dallage avant la pose du linoléum sans rechercher d'autres éléments probants ;
- la mission du groupement de maîtrise d'oeuvre ne comportait pas de mission diagnostic des existants ;
- la demande relative à l'assainissement des murs est infondée puisque la présente procédure n'a été initiée que sur le seul fondement du cloquage du linoléum.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 décembre 2014, la société SARL Chauvier, représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien ;
2°) de rejeter l'appel en garantie formé à son encontre par le GIE Ceten Apave ;
3°) de condamner la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien aux dépens ;
4°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'action en garantie décennale est prescrite ;
- les désordres sont très limités puisqu'ils ne concernent que deux pièces du bâtiment sans risque d'extension et ne présentent aucune gravité ; l'ouvrage n'est donc pas impropre à sa destination ;
- les désordres qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun ;
- le rapport d'expertise confirme la parfaite exécution des travaux incombant à la société Chauvier.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,
- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,
- et les observations de Me A...B...représentant le GIE Ceten Apave.
1. Considérant que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien a passé un marché en vue de la rénovation des locaux abritant son siège ; que la maîtrise d'oeuvre de l'opération a été confiée au cabinet d'architecte C...et à la société Serge Santini Ingénierie ; que le contrôle technique a été confié au groupement d'intérêt économique (GIE) Ceten Apave ; que le lot n°12 " revêtement de sols souples " a été attribué à la société Chauvier ; que les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 15 octobre 2008 ; qu'en décembre 2009 le maître d'ouvrage a constaté l'existence de désordres affectant le revêtement en sol souple de deux bureaux situés en rez-de-chaussée du bâtiment ; que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien a demandé au tribunal administratif de Besançon, d'une part, la condamnation solidaire du cabinet C..., des sociétés Serge Santini Ingénierie, Chauvier et Scanzi ainsi que du GIE Ceten Apave à lui verser la somme de 9 650 euros HT pour la remise en état du revêtement de sol ainsi que la somme de 10 000 euros en réparation des troubles de jouissance occasionnés par ces désordres et, d'autre part, la condamnation solidaire du cabinet C...et de la société Serge Santini Ingénierie à lui verser une somme de 6 500 euros HT au titre des désordres affectant les murs de l'immeuble ; que la communauté de communes relève appel du jugement en date du 20 février 2014 par lequel le tribunal a rejeté l'intégralité des demandes ;
Sur la responsabilité décennale :
2. Considérant, d'une part, que les désordres observés, apparus dans le délai de garantie décennale, consistent en des formations de cloques et en un décollement du revêtement du sol provoqués par des remontées capillaires à travers le dallage de béton dans deux pièces à usage de bureaux situés au rez-de-chaussée de l'immeuble ; que si la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien soutient que ces désordres créeraient un risque pour la sécurité des personnes, ce risque, compte tenu de la faible ampleur des désordres, n'est pas établi ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces désordres, qui sont limités à deux pièces du bâtiment, seraient susceptibles de s'étendre ; que par suite, compte tenu de leurs faibles étendue et importance, ces désordres ne sont pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;
3. Considérant, d'autre part, que si la communauté de communes invoque un éventuel désordre futur lié au défaut d'assainissement des murs, elle ne produit aucun élément permettant d'établir que les conséquences de l'absence d'assainissement des murs dans l'environnement humide du bâtiment entraîneront de manière prévisible des désordres de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon n'a pas retenu le caractère décennal de ces désordres ;
Sur la responsabilité contractuelle :
5. Considérant que si la réception sans réserve demeure sans effet sur la responsabilité contractuelle des maîtres d'oeuvre à raison des manquements à leur obligation de conseil du maître de l'ouvrage au moment de la réception des travaux ou à des fautes commises dans le contrôle des situations de travaux servant au calcul des comptes des entreprises, elle met fin, en revanche, aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les maîtres d'oeuvre en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ;
6. Considérant que la réception de l'ouvrage a été prononcée sans réserve le 15 octobre 2008; qu'ainsi, et à supposer qu'elle entende invoquer ce fondement, la requérante ne peut plus rechercher la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre à raison des fautes qu'il aurait commises dans la conception de l'ouvrage en omettant de prévoir un dispositif d'assainissement des murs ;
Sur les conclusions à fin d'appel en garantie présentées par le GIE Ceten Apave :
7. Considérant qu'aucune condamnation n'étant prononcée à l'encontre du GIE Ceten Apave, les appels en garantie formés par ce groupement doivent être rejetés ;
Sur les dépens :
8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens " ;
9. Considérant que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien reste la partie perdante en appel ; qu'aucune circonstance particulière de l'affaire ne justifie que les frais d'expertise soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ; que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien n'est, par suite, pas fondée à demander que ces frais soient mis à la charge des constructeurs ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des sociétésC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et Scanzi, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien une somme de 1 000 euros à verser à chacune des sociétésC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et Scanzi sur le fondement des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la communauté des communes du Pays Sous-Vosgien est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel en garantie formées par le GIE Ceten Apave sont rejetées.
Article 3 : La communauté de communes du Pays Sous-Vosgien versera la somme de 1 000 (mille) euros à chacune des sociétésC..., Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et Scanzi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes du Pays Sous-Vosgien, au cabinet d'architecteC..., aux sociétés Serge Santini Ingénierie, GIE Ceten Apave, Chauvier et à Me D...liquidateur de la société Scanzi.
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N° 14NC00753