Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 26 juin 2015, la société MDVP Distribution a demandé à la commission nationale d'aménagement commercial de réformer la décision du 18 mai 2015 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial des Ardennes a accordé une autorisation d'exploitation commerciale au projet de création d'un magasin à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 1 275 m2 à Sedan.
Par une décision du 8 octobre 2015, la commission nationale d'aménagement commercial a accueilli ce recours et refusé le projet présenté par la SNC Lidl.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 novembre 2015 sous le n° 15NC02351, la société MDVP Distribution, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 15 juin 2015 par lequel le maire de Sedan a accordé un permis de construire à la société Lidl relatif à un supermarché de 1 275 m2.
2°) de mettre à la charge de la commune de Sedan une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 600-10 du code de l'urbanisme et de l'article 4 du décret n° 2015-165 du 12 février 2015 que la cour administrative d'appel est compétente pour connaître des litiges relatifs aux permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale ;
- le recours est recevable dès lors que l'affichage du permis de construire sur le terrain n'a débuté que le 20 octobre 2015 et qu'en tout état de cause, elle n'a eu connaissance de la décision de la commission nationale d'aménagement commercial, intervenue sur son recours, que le 6 novembre 2015 ;
- elle a intérêt à agir dès lors qu'elle est un professionnel dont l'activité s'exerce au sein de la zone de chalandise, au sens de l'article L. 752-17 du code de commerce ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé au regard de la loi du 11 juillet 1979 ;
- l'arrêté est entaché d'illégalité dès lors qu'un recours administratif obligatoire a été formé devant la commission nationale d'aménagement commercial et que celle-ci a rendu un avis défavorable au projet de la société Lidl, ce qui entache le permis d'erreur de droit ;
- le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 janvier 2016 complété par un mémoire de production enregistré le 26 janvier 2016, la société Lidl représentée par Me B...conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de la société MDVP Distribution sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la cour est incompétente pour connaître du litige qui relève de la compétence du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne dès lors que la demande d'autorisation commerciale ne relève pas des dispositions transitoires prévues par le décret du 12 février 2015, ni des nouvelles dispositions de la loi du 18 juin 2014 ;
- la demande est tardive dès lors que le permis a fait l'objet d'un affichage régulier et continu à compter du 22 juin 2015 ;
- la saisine de la commission nationale d'aménagement commercial n'a, par elle-même, aucun effet suspensif ;
- la société requérante ne justifie d'aucun intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire qui tient seulement lieu d'autorisation de construire ;
- l'article L. 600-4-1 ne peut trouver à s'appliquer dès lors que le permis accordé n'est pas un permis tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;
- le maire de Sedan pouvait valablement délivrer le permis de construire malgré la saisine de la commission nationale d'aménagement commercial ;
- le permis n'est entaché d'aucune illégalité dès lors qu'au jour de sa délivrance, la commission nationale d'aménagement commercial n'avait pas été saisie ;
- la décision de la commission nationale d'aménagement commercial ne peut en aucun cas remettre rétroactivement en cause la légalité du permis de construire ;
- le projet respecte les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce.
Par un mémoire enregistré le 22 janvier 2016, la commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la société MDVP n'a pas justifié de la qualité et de la capacité pour agir de son représentant ;
- s'agissant d'un permis de construire " classique ", la société MDVP ne justifie pas d'un intérêt pour agir au titre de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- la procédure relative à l'obtention de l'autorisation d'exploitation commerciale ayant été initiée sous l'empire de l'ancienne législation, lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle procédure, le 15 février 2015, tant la demande de permis de construire que celle relative à l'autorisation d'exploitation commerciale étaient " en cours d'instruction ", au sens des dispositions, notamment, de l'article 4 du décret du 12 février 2015 ;
- la société MDVP ne peut valablement invoquer les dispositions des articles L. 600-1-4 alinéa 1er et L. 600-10 du code de l'urbanisme attribuant compétence en premier et dernier ressort aux cours administratives d'appel pour connaître des permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, qui ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 février 2016, la commune de Sedan, représentée par Me A...conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société MDVP Distribution sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que la société MDVP Distribution se fonde sur le régime de l'urbanisme commercial issu de la loi du 18 juin 2014 qui n'est pas applicable à l'autorisation d'urbanisme sollicitée par la SNC LIDL ;
- le fait que le permis litigieux ne soit pas un permis valant autorisation d'exploitation commerciale emporte plusieurs conséquences : incompétence de la cour pour connaître du litige, défaut d'intérêt à agir de la société requérante, tardiveté de la requête et inopérance des moyens soulevés ;
- subsidiairement, le permis contesté peut être régularisé en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire enregistré le 3 février 2016, la société MDVP Distribution conclut aux mêmes fins que sa requête et au surplus à ce que le montant de la somme mise à la charge de la société LIDL soit porté à 5 000 euros.
Outre les moyens déjà soulevés, elle fait valoir que :
- le délai d'instruction de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale court à compter de la réception par le secrétariat de la commission départementale d'aménagement commercial d'un dossier complet, ce dont ne rend pas compte le courrier du 13 février 2015 produit par la commission nationale d'aménagement commercial ;
- la circonstance que le permis de construire du 15 juin 2015 ait été régulièrement affiché est sans incidence sur la recevabilité d'une requête introduite contre le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, lequel impose nécessairement et conformément au 3ème alinéa de l'article L. 752-17 du code de commerce, de saisir la CNAC d'un recours préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis ;
- les conclusions à fin de régularisation ne peuvent qu'être rejetées dès lors que l'aménagement et l'extension d'un établissement de commerce de détail alimentaire de 999 m² de surface de vente, en lieu et place d'un établissement précédemment exploité sur 700 m² de surface de vente, nécessitent que la SNC LIDL sollicite de la CDAC des Ardennes une autorisation préalable d'exploitation, ce projet s'inscrivant dans un ensemble commercial existant au sens du 5° de l'article L. 752-1 du code du commerce.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 février 2016, la SNC Lidl conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.
Elle soutient en outre que :
- les dispositions du IV de l'article 4 du décret du 12 février 2015 ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce ;
- un permis modificatif a été déposé qui n'est pas soumis à une autorisation d'exploitation commerciale dès lors que la surface de vente prévue est désormais de 999 m² et que le projet ne concerne pas un ensemble commercial au sens du 5° de l'article L. 752-1 et de l'article L. 752-3 du code du commerce ;
- les dispositions de l'article L. 752-6 ne sont pas méconnues, le Conseil d'Etat ayant notamment déjà admis qu'une seule desserte quotidienne en transport collectif puisse suffire (CE, 30 avril 2014 n° 362462) sans réserver cette possibilité aux seuls magasins de bricolage.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 février 2016, la commune de Sedan conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.
Elle soutient en outre que la saisine de la CNAC n'a pas pour effet de proroger le délai de recours contentieux.
Vu l'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Nancy du 23 décembre 2015 prononçant la suspension de l'exécution de l'arrêté du 15 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;
- le décret 2015-165 du 12 février 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Richard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la société MDVP Distribution, de Me D... pour la commune de Sedan, et de Me B...pour la Snc Lidl.
Considérant ce qui suit :
1. La société Lidl qui exploite actuellement un supermarché d'une surface de 720 m2 rue des Forges à Sedan a, le 17 décembre 2014, sollicité en vue de rénover et d'agrandir cette surface commerciale un permis de construire valant permis de démolir. Elle a présenté une demande d'autorisation d'exploitation commerciale, reçue le 13 février 2015 par la commission départementale d'aménagement commercial, afin de porter la surface de vente à 1 275 m2. La commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) a commencé l'instruction de ce dossier à compter du 30 mars 2015 et autorisé le projet d'extension de la société Lidl par une délibération du 18 mai 2015. Par un arrêté du 15 juin 2015, le maire de Sedan a délivré le permis de construire sollicité par la société Lidl. Le 26 juin 2015, la société MDVP Distribution a formé un recours préalable contre la décision de la CDAC auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC). La CNAC a fait droit à ce recours préalable le 8 octobre 2015 en refusant d'autoriser le projet de la société Lidl. Par sa requête n° 15NC02351, la société MDVP Distribution demande à la cour d'annuler l'arrêté du 15 juin 2015 par lequel le maire a délivré le permis de construire à la société Lidl.
Sur la compétence la cour :
2. En vue d'assurer la simplification et la modernisation de l'aménagement commercial, le législateur a, par la loi susvisée du 18 juin 2014, modifié les dispositions du code de commerce et du code de l'urbanisme et substitué au régime de double autorisation commerciale et d'urbanisme, une procédure administrative unique selon laquelle, lorsque le projet nécessite la délivrance d'une autorisation de construire, le permis de construire tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la CDAC ou le cas échéant de la CNAC (alinéa 1er de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme) et a, en conséquence, défini des règles contentieuses spécifiques propres à ces permis.
3. Aux termes de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme issu de l'article 58 de la loi susvisée du 18 juin 2014 : " Les cours administratives d'appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs au permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale prévu à l'article L. 425-4 ".
4. L'article L. 425-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. /
A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire (...)".
5. Aux termes de l'article 60 de la loi du 18 juin 2014, l'article 58 entre en vigueur " à une date fixée par décret en Conseil d'Etat et au plus tard six mois à compter de la promulgation de la présente loi ". Les dispositions du décret d'application indispensables à l'application du nouveau régime institué par la loi du 18 juin 2014 n'ayant été adoptées que le 12 février 2015, il y a lieu, pour déterminer la date d'entrée en vigueur de l'article L. 600-10 précité, de se reporter aux dispositions dudit décret. A cet égard, l'article 6 du décret du 12 février 2015 prévoit explicitement que l'article 58 de la loi du 18 juin 2014 susvisée entre en vigueur le lendemain de la publication du décret au journal officiel de la République française, soit le 15 février 2015.
6. Les parties s'opposent sur le maintien à titre transitoire du régime juridique antérieur à la loi du 18 juin 2014 qui reposait sur la délivrance distincte d'une autorisation d'urbanisme commercial et d'un permis de construire et pour lequel l'article 4 du décret du 12 février 2015 maintient un dispositif transitoire d'instruction des demandes d'autorisation commerciale nécessitant un permis de construire en cours d'instruction devant la commission départementale d'aménagement commercial à la date d'entrée en vigueur du décret.
7. Aux termes de l'article 4 du décret du 12 février 2015 : " I. - Par dérogation à l'article R. 752-9 et aux premier et deuxième alinéas de l'article R. 752-10 du code de commerce, l'article R. 752-11 et les premier à troisième alinéas de l'article R. 752-12 du même code s'appliquent aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale nécessitant un permis de construire en cours d'instruction devant la commission départementale d'aménagement commercial à la date d'entrée en vigueur du présent décret. (...). IV. - Pour les demandes de permis de construire en cours d'instruction à la date d'entrée en vigueur du présent décret et relatives à des projets soumis à une autorisation d'exploitation commerciale, les autorisations d'exploitation commerciale valent avis favorables de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. V. - L'article R. 311-3 du code de justice administrative s'applique aux recours contre des décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial relatives à des projets ayant nécessité un permis de construire délivré avant l'entrée en vigueur du présent décret. (...) ".
8. Il résulte des dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme et de l'article 4 du décret du 12 février 2015 que les projets nécessitant à la fois la délivrance d'un permis de construire et d'une autorisation d'exploitation commerciale, pour lesquels les dossiers de demande d'autorisation d'exploitation commerciale n'étaient pas en cours d'instruction à la date d'entrée en vigueur du décret du 12 février 2015, entraient dans le champ d'application du nouveau régime des permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Il résulte également des dispositions relatives à l'instruction des demandes d'autorisation d'exploitation commerciale dans leur version issue du décret du 12 février 2015, comme dans l'ancienne version d'ailleurs, que l'instruction d'une telle demande ne commence qu'à compter de la date de la réception d'un dossier complet par le secrétariat de la CDAC.
9. Après avoir indiqué que sa demande d'autorisation d'exploitation commerciale avait été déposée le 30 mars 2015, la société Lidl soutient dans le dernier état de ses écritures, que ses dossiers de demande de permis de construire et d'autorisation d'exploitation commerciale ont été déposés auprès des services instructeurs antérieurement au 15 février 2015 et qu'ainsi, l'arrêté du 15 juin 2015, s'il procède à la délivrance d'un permis de construire, ne constitue pas pour autant une autorisation d'exploitation commerciale.
10. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si un dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale a été envoyé le 12 février 2015 au secrétariat de la commission départementale d'aménagement commercial et reçu par celui-ci le 15 février suivant, l'instruction de la demande n'a débuté que le 30 mars 2015, date à laquelle le dossier a été enregistré, après réception des pièces complémentaires demandées au pétitionnaire. Cette demande d'autorisation d'exploitation commerciale ne peut donc être regardée comme ayant été " en cours d'instruction devant la commission départementale d'aménagement commercial à la date d'entrée en vigueur du décret du 12 février 2015 ". La société Lidl n'est donc pas fondée à soutenir que sa demande, qui est relative à un projet nécessitant la délivrance d'un permis de construire et d'une autorisation d'exploitation commerciale, devait être instruite dans le cadre du régime antérieur à celui des dispositions issues de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme et du décret du 12 février 2015.
11. Il s'ensuit qu'indépendamment de son libellé, la délibération de la CDAC en date du 18 mai 2015 doit être regardée comme un avis favorable que le maire de Sedan a d'ailleurs visé comme tel dans son arrêté du 15 juin 2015 délivrant le permis litigieux à la société Lidl. Le permis accordé au vu de cet avis doit donc être regardé comme un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale, qui entre dans la compétence juridictionnelle de la cour en application des dispositions précitées de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme.
Sur la demande d'avis au Conseil d'Etat :
12. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de justice administrative : " Avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu'à un avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai ".
13. Les dispositions de l'article L. 425-4 issues de la loi du 18 juin 2014 instaurent un régime d'autorisation administrative unique sous la forme d'un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale lorsqu'une telle autorisation est requise compte tenu des caractéristiques de l'équipement commercial projeté. Ces mêmes dispositions aménagent également un recours obligatoire contre l'avis de la CDAC pour les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du code du commerce, au nombre desquelles se trouve notamment un tiers concurrent du pétitionnaire, qui souhaitent exercer un recours contentieux contre ce permis de construire.
La requête de la société MDVP Distribution présente à juger les questions suivantes :
En ce qui concerne la recevabilité des recours contentieux dirigés contre un permis de construire visé à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme :
1°) Le recours contentieux formé par un professionnel visé à l'article L. 752-17 du code du commerce (ci-après dénommé " le concurrent ") contre un permis de construire visé à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme est-il soumis aux exigences des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme alors que :
a). les conclusions en annulation et moyens de ce requérant contre ce permis ne sont recevables qu'en tant que ce permis tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale conformément aux dispositions de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme,
b). le requérant doit communiquer au demandeur son recours préalable devant la CNAC dirigé contre l'avis de la CDAC dans les cinq jours suivant sa présentation à cette commission à peine d'irrecevabilité du recours préalable en application des dispositions de l'article R.752-32 du code du commerce '
2°) Le recours visé ci-dessus est-il soumis à des règles de délai dérogatoires par rapport à celles qui sont posées à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme relatives à l'affichage sur le terrain du permis contesté compte tenu, notamment, de l'obligation de déposer un recours obligatoire à l'encontre de l'avis de la CDAC préalablement à l'exercice du recours contentieux dirigé contre le permis '
En cas de réponse positive, les délais de recours contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale courent-ils à compter de la notification de l'avis de la CNAC rendu sur ce recours préalable dans le délai de recours de droit commun ou d'une autre date '
En ce qui concerne l'incidence d'un recours formé auprès de la CNAC sur la procédure de délivrance d'un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale et sur la légalité de ce permis de construire :
3°) En cas d'avis favorable de la CDAC sur une demande d'autorisation d'exploitation commerciale présentée dans le cadre d'un projet de permis de construire, les dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme rapprochées, notamment, des dispositions des articles R. 425-15-1, R. 423-23, R. 423-25 (e), R. 423-36-1, R.423-44-1, R. 424-2 (h) du même code et des articles L. 752-17, R. 752-19, R. 752-30, R. 752-31, R. 752-32, R. 752-34, R. 752-39 du code du commerce, imposent-elles à l'autorité administrative compétente d'attendre que la CNAC ait rendu son avis avant de statuer sur la demande de permis lorsqu'un recours préalable est exercé par un concurrent du pétitionnaire contre l'avis favorable de la CDAC ' En va-t-il de même si l'autorité administrative compétente n'est pas informée de l'existence de ce recours préalable exercé auprès de la CNAC '
En ce qui concerne les conséquences à tirer d'une application inexacte des dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme :
4°) Si les dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme imposent à l'autorité administrative compétente d'attendre que la CNAC ait rendu son avis avant de statuer sur la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, la méconnaissance de ces dispositions invoquée dans le cadre d'un recours dirigé contre ce type de permis :
- conduit-elle à l'annulation totale du permis valant autorisation d'exploitation commerciale ou à ses seules dispositions portant autorisation d'exploitation commerciale, le concurrent ne pouvant quant à lui le contester que dans cette dernière mesure en application de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme, laissant alors le pétitionnaire libre d'exécuter le permis en tant qu'il vaut autorisation d'urbanisme (Comp. CE, 31 juillet 2015, commune de Telgruc-sur-Mer n° 380557 sur l'article L. 425-7 du code de l'urbanisme désormais abrogé par la loi du 18 juin 2014) '
- est-elle susceptible de faire l'objet d'une régularisation du permis entaché d'illégalité par la délivrance d'un permis modificatif (la modification pouvant notamment réduire la surface de vente à un niveau inférieur au seuil prévu à l'article L. 752-1 du code du commerce afin de dispenser le projet de la nécessité d'obtenir une autorisation d'exploitation commerciale) :
a) le cas échéant, préalablement à la décision du juge, dans le cadre d'une application adaptée de la jurisprudence du Conseil d'Etat (2 février 2004 SCI La Fontaine de Villiers n° 238315 ou 30 mars 2015 Société Eole Res n° 369431) '
b) sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme '
14. Ces questions constituent des questions de droit nouvelles présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de la société MDVP Distribution et de transmettre, pour avis sur ces questions, le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat.
D E C I D E :
Article 1er : Le dossier de la requête de la société MDVP Distribution est transmis au Conseil d'Etat pour examen des questions de droit ci-dessus définies.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de la société MDVP Distribution jusqu'à la notification de l'avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois à compter de la transmission du dossier prévue à l'article 1er.
Article 3 : Tous droits et moyens des parties sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat, à la société MDVP Distribution, à la commune de Sedan, à la société Lidl et à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Copie en sera adressée au ministre du logement et de l'habitat durable et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.
2
N° 15NC02351