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10/03/2016 | FRANCE | N°15NC00972

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 mars 2016, 15NC00972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 euros par jour à compter du 23 mars 2011 en réparation du préjudice moral subi du fait de ses conditions de détention au sein de la maison d'arrêt de Reims.

Par un jugement n° 1301527 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à lui verser une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts et rejeté le surplus de sa demande.
>Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2015, M.A..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 euros par jour à compter du 23 mars 2011 en réparation du préjudice moral subi du fait de ses conditions de détention au sein de la maison d'arrêt de Reims.

Par un jugement n° 1301527 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à lui verser une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2015, M.A..., représenté par la Selarl Pelletier et Associés, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1301527 du 24 mars 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a limité à 500 euros le montant de l'indemnité que l'Etat a été condamné à lui verser ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 euros par jour à compter du 23 mars 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

- la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée au regard de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article 22 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 dès lors qu'il est incarcéré dans une cellule exiguë au regard du nombre de détenus, qu'il est victime du tabagisme de ses codétenus et de l'auxiliaire d'étage, que les conditions d'hygiène minimales ne sont pas respectées et que son état de santé n'a pas été pris en compte de façon satisfaisante ;

- l'indemnisation accordée à hauteur de 4,85 euros par jour qui correspond au prorata de la période de 103 jours pendant laquelle ses conditions de détention ont été regardées comme irrégulières est insuffisante eu égard à son statut de personne handicapée et nécessitant de nombreux soins médicamenteux et ne permet pas de sanctionner véritablement l'administration pénitentiaire. L'indemnité doit être revalorisée à hauteur de 100 euros par jour de retard.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2015, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés, le requérant ne démontrant pas avoir été exposé à des souffrances autres que celles qui ont été indemnisées par le tribunal.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...a été écroué à la maison d'arrêt de Reims dans le cadre de l'exécution d'une peine de 5 ans d'emprisonnement pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans, du 23 mars 2011 au 13 juin 2014. Il demande la réformation du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à lui verser une somme de 500 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de ses conditions de détention et demande que cette somme soit portée à 100 euros par jour à compter de son incarcération à la maison d'arrêt le 23 mars 2011.

2. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 22 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 : " L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l'intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l'âge, de l'état de santé, du handicap et de la personnalité de la personne détenue ".

3. En raison de la situation d'entière dépendance des personnes détenues vis-à-vis de l'administration pénitentiaire, l'appréciation du caractère attentatoire à la dignité des conditions de détention dépend notamment de leur vulnérabilité, appréciée compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de leur personnalité et, le cas échéant, de leur handicap, ainsi que de la nature et de la durée des manquements constatés et des motifs susceptibles de justifier ces manquements eu égard aux exigences qu'impliquent le maintien de la sécurité et du bon ordre dans les établissements pénitentiaires, la prévention de la récidive et la protection de l'intérêt des victimes. Seules des conditions de détention qui porteraient atteinte à la dignité humaine, appréciées à l'aune de ces critères et à la lumière des dispositions du code de procédure pénale, notamment des articles D. 349 à D. 351 ainsi que de l'article D. 354, révèlent l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique. Une telle atteinte, si elle est caractérisée, est de nature à engendrer, par elle-même, un préjudice moral pour la personne qui en est la victime.

4. Par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a écarté les moyens de M. A...tiré des fautes que l'administration aurait commises à son encontre concernant la privation du matériel qui lui aurait été nécessaire pour l'entretien de sa cellule, l'accès insuffisant aux soins dont il avait besoin ou l'exposition au tabagisme de ses codétenus. Le tribunal a en revanche estimé que les conditions dans lesquelles M. A...avait été détenu pendant 103 jours étaient, compte tenu de l'exiguïté de sa cellule et du nombre de codétenus avec lesquels il se trouvait, de nature à engager la responsabilité pour faute de l'État et que le requérant était fondé à demander la réparation du préjudice moral qui en est résulté à hauteur de 500 euros.

5. M.A..., qui se borne à reproduire purement et simplement ses écritures de première instance, ne produit aucun élément probant de nature à établir l'existence d'une faute de l'administration pénitentiaire autre que celle retenue par le jugement contesté qui a estimé que seules les conditions dégradantes dans lesquelles l'intéressé a été détenu dans sa cellule pendant une période de 103 jours étaient de nature à engager la responsabilité de l'administration pénitentiaire.

6. M. A...soutient ensuite que l'indemnisation qui lui a été accordée par le tribunal est insuffisante compte tenu " de son statut de personne handicapée et nécessitant de nombreux soins médicamenteux " et de ce que la somme de 500 euros ne permet pas de sanctionner l'administration pénitentiaire. Ces allégations qui ne sont d'ailleurs assorties d'aucune précision, ni élément probant, ne sauraient toutefois suffire à caractériser l'insuffisance du montant de 500 euros accordé à M. A...en réparation du préjudice personnel et certain subi à raison des conditions fautives de sa détention.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a limité à 500 euros la somme que l'Etat a été condamné à lui verser en réparation du préjudice qu'il a subi. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par voie de conséquence être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de la justice.

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N° 15NC00972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00972
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP PELLETIER FREYHUBER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-10;15nc00972 ?
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