Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Eurl Haziel a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 13 juin 2006 au 31 décembre 2007 ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement n° 1100775 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la réduction des majorations en substituant à la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prononcée par le service la majoration de 40 % pour manquement délibéré et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2015, l'Eurl Haziel, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 novembre 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 13 juin 2006 au 31 décembre 2007 ainsi que des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière, l'administration s'étant implicitement fondée sur l'existence d'un abus de droit pour justifier le redressement sans respecter les garanties de procédure correspondantes;
- la location meublée avec prestations de services parahôteliers a été à bon droit soumise à la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 261 D 4° b) du code général des impôts et de l'instruction référencée 3 A-2-03 du 30 avril 2003 ;
- la majoration par l'administration pour manoeuvres frauduleuses n'est pas fondée ;
- l'administration a formellement pris position sur sa qualité d'assujettie et de redevable au titre de la location du logement situé quartier Les Molliars à Gordes le 27 juin 2012 ;
- la majoration pour manquement délibéré retenue par le tribunal n'est pas justifiée ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'Eurl Haziel ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Guidi,
- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : a) Qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention " ; que, lorsque l'administration use des pouvoirs qu'elle tient de ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, qu'ils n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ; qu'il résulte également de ces dispositions que lorsque l'administration invoque des faits constitutifs d'un abus de droit pour justifier un chef de redressement, le contribuable, qui n'a pas demandé la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit, doit être regardé comme ayant été privé de la garantie tenant à la faculté de provoquer cette saisine si, avant la mise en recouvrement de l'imposition, l'administration omet de l'aviser expressément que le redressement a pour fondement les dispositions précitées de l'article L. 64 ;
2. Considérant que l'Eurl Haziel a acquis le 30 juin 2006 un mas avec piscine situé à Gordes, loué en meublé à M. A...jusqu'au mois de septembre 2007 puis à la société S.Deux.E DRH ; qu'après une vérification de comptabilité de l'Eurl portant sur la période correspondant aux années 2006 et 2007, l'administration a remis en cause les déductions de taxe sur la valeur ajoutée opérées par la société sur le fondement des dispositions du b) du 4° de l'article de l'article 261 D du code général des impôts en estimant que les prestations de services assortissant la location de cet immeuble n'étaient pas effectuées dans des conditions similaires à celles proposées par des établissements à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle ; qu'il ressort des termes de la proposition de rectification qu'après avoir relevé les liens de dépendance entre les locataires successifs de la villa, M. A...et la société S.Deux.E DRH, et la société Haziel, propriétaire de cet immeuble, l'absence de paiement effectif par les locataires des loyers ainsi que le contenu des prestations assurées par l'Eurl Haziel, l'administration a considéré que les services hôteliers réellement proposés et fournis par l'Eurl Haziel à ses locataires ne répondaient pas aux conditions édictées par la loi pour faire sortir l'activité de location ainsi exercée du champ de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 261 D susmentionné ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient l'Eurl Haziel, l'administration n'a pas écarté le contrat de location, ni remis en cause son contenu ou sa portée ; que le but fiscal, relevé par le service, que l'Eurl Haziel aurait poursuivi en assortissant la location du mas de ces prestations de services dont le caractère hôtelier a été remis en cause par l'administration et l'intérêt résultant du gain fiscal lié à l'assujettissement de son activité de location à la taxe sur la valeur ajoutée ne sauraient suffire à établir que le service s'est implicitement fondé sur l'existence d'un abus de droit pour procéder au rappel litigieux ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait implicitement fondé le rappel de taxe sur la valeur ajoutée sur un abus de droit ou une fraude à la loi de la part de la société requérante et ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
S'agissant de l'application de la loi :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : (...) b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle " ; que les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier doivent être propres à garantir que ne soient exonérés du paiement de cette taxe que des assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles des entreprises hôtelières, avec lesquelles ils ne se trouvent donc pas en situation de concurrence potentielle ; que les critères définis par la loi et précisés par la jurisprudence n'exigent pas que les prestations parahôtelières soient effectivement rendues, mais seulement que le loueur en meublé propose de telles prestations à ses clients et dispose des moyens nécessaires pour répondre à leurs éventuelles demandes ;
4. Considérant que l'Eurl Haziel soutient que la location saisonnière du mas provençal avec piscine dont elle avait fait l'acquisition le 30 juin 2006 ne relevait pas du régime d'exonération prévu à l'article 261 D et devait par suite être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dans la mesure où elle a mis cet immeuble en location et qu'elle proposait des prestations dans des conditions similaires à celles d'un établissement hôtelier en offrant les services d'une femme de ménage chargée de l'entretien régulier des locaux, du linge de maison et de la prestation du petit déjeuner ; que, toutefois, la société requérante ne produit aucun document permettant d'apprécier la nature et la réalité des prestations offertes ; que pour sa part, l'administration fiscale fait valoir sans être contredite que la société ne disposait d'aucun local pour effectuer la préparation de petits déjeuners et que cette prestation se bornait en réalité à l'achat, pour le compte du locataire, de capsules pour une machine à café qui lui était ensuite refacturées avec une marge de 20% ; que si la femme de ménage, employée six heures par semaine pour l'entretien de la villa, s'occupait de l'entretien des locaux et du nettoyage du linge de maison, cette prestation n'était effectuée que trois fois par semaine ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction que l'Eurl Haziel aurait assuré la réception, même non personnalisée, de sa clientèle, constituée uniquement depuis juin 2006 de M. A...et de la société S.Deux.E DRH, qui a loué le mas pour le mettre à disposition de M. A...son gérant ; que, dans ces conditions, la société requérante ne peut être regardée comme ayant mis à la disposition de sa " clientèle " les prestations visées à l'article 261 D du code général des impôts dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle ; qu'il s'ensuit que l'activité de l'Eurl Haziel ne pouvait pas être assimilée à celle d'une entreprise hôtelière et ne concurrençait pas, même potentiellement, celle des hôtels environnants ; qu'elle devait en conséquence être regardée comme entrant dans les prévisions du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration fiscale a considéré que la location de la villa était exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, a remis en cause la déduction de taxe grevant l'acquisition de la villa et a demandé la restitution des crédits de taxe sur la valeur ajoutée dont la société avait obtenu le remboursement ;
S'agissant des articles L 80 A et L 80 B du livre des procédures fiscales :
5. Considérant, en premier lieu, que les énonciations de l'instruction référencée
3 A-2-03 du 30 avril 2003, laquelle se borne à commenter les dispositions précitées du b du
4° de l'article 261 D du code général des impôts, ne contiennent pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont le présent arrêt fait application ; qu'il suit de là que l'Eurl Haziel n'est pas fondée à se prévaloir de cette instruction sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
6. Considérant, en second lieu, que si l'Eurl Haziel se prévaut, sur le fondement des dispositions combinées du premier alinéa de l'article L 80 A et de l'article L 80 B du livre des procédures fiscales, de la position du service des impôts des entreprises d'Apt sur sa qualité d'assujettie à raison de l'activité de location de la villa, cette prise de position, contenue dans une lettre du 27 juin 2012, est postérieure à la mise en recouvrement de l'imposition primitive; qu'ainsi la société ne peut, en tout état de cause, utilement s'en prévaloir ;
En ce qui concerne les pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses " ;
8. Considérant que M. C...a constitué l'Eurl Haziel qui a acquis un mas situé à Gordes loué directement puis indirectement à M.A..., par ailleurs associé de M. C...dans d'autres sociétés et chargé du développement de sa clientèle ; que cette activité de location a été placée à tort sous le régime fiscal des établissements d'hébergement à caractère hôtelier en vue de permettre une minoration de l'impôt dû par l'Eurl et par M.C..., qui par ailleurs exerce la profession d'expert comptable ; que, contrairement à ce que soutient l'Eurl Haziel, la déduction abusive de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition de la villa est ainsi constitutive d'un manquement délibéré donnant lieu à l'application des pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts ; que par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a laissé à sa charge les pénalités litigieuses sur le fondement du a de l'article 1729 précité ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Eurl Haziel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'Eurl Haziel est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Eurl Haziel et au ministre des finances et des comptes publics.
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N° 15NC00198