Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...H...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 29 novembre 2010 par lequel le maire de Fegersheim a délivré à la SCI Bossuet un permis de démolir, ensemble la décision du 30 mai 2012 rejetant leurs recours gracieux.
Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 6 février 2012 par lequel le maire de Fegersheim a délivré à la SCI Bossuet un permis de construire trois bâtiments à usage d'habitation comportant 18 logements.
M. et Mme B...H..., M. et MmeE..., l'association de sauvegarde du patrimoine de Fegersheim-Ohnheim ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 6 février 2012 par lequel le maire de Fegersheim a délivré à la SCI Bossuet un permis de construire trois bâtiments à usage d'habitation comportant 18 logements, ensemble la décision du 30 mai 2012 rejetant leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1203528, 1203563, 1203573 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande présentée par l'association de sauvegarde du patrimoine de Fegersheim-Ohnheim ainsi que la demande dirigée contre l'arrêté du 29 novembre 2010 portant permis de démolir et a annulé l'arrêté du 6 février 2012 portant permis de construire.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 mai 2015, la commune de Fegersheim, représentée par MeG..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1203528, 1203563, 1203573 du 17 mars 2015 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a annulé l'arrêté du 6 février 2012 ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme H...et de MmeD... ;
3°) de mettre solidairement à la charge de M. et Mme H...et Mme D...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont procédé à une substitution de base légale en faisant application de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme alors que le moyen avancé par Mme D... portait sur la méconnaissance de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté contesté ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme tant en ce qui concerne le document graphique, le report des arbres à haute tige, les accès, le plan masse que la présentation des conditions de desserte ;
- l'arrêté contesté a été signé par une autorité compétente ;
- l'arrêté litigieux ne méconnait pas les articles R. 423-1, R. 111-5, R. 431-8, R. 421-1-1, R. 421-2 et L. 123-1-5-16° du code de l'urbanisme ;
- le moyen tiré de l'absence de mention du permis de démolir dans le permis de construire contesté doit être écarté ;
- l'arrêté ne méconnait pas les articles 3 UA et 6 UA du règlement du plan d'occupation des sols.
Par un mémoire enregistré le 28 juillet 2015, Mme C...D...conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la commune de Fegersheim une somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ont été reprises par l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme et les premiers juges n'ont pas procédé à une substitution de base légale ;
- les documents graphiques sont insuffisants ;
- l'arrêté contesté méconnait les articles 3 UA, 6 UA du règlement du plan d'occupation des sols.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 7 novembre 2011, la SCI Bossuet a sollicité la délivrance d'un permis de construire trois immeubles collectifs comportant 18 logements sur un terrain situé 1 rue Bossuet à Fegersheim. Par arrêté du 6 février 2012, le maire de la commune de Fegersheim lui a accordé le permis sollicité. Par des courriers des 4 et 5 avril 2012, M. et Mme H...et Mme D...ont demandé au maire de la commune de Fegersheim, de procéder au retrait dudit arrêté. Par courriers du 30 mai 2012, le maire a rejeté ces demandes. Par jugement du 17 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ledit arrêté et rejeté la demande de M. et Mme H...tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 novembre 2010 du maire de Fegersheim portant permis de démolir délivré à la SCI Bossuet. La commune de Fegersheim relève appel du jugement du 17 janvier 2015 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 6 février 2012.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 6 février 2012 au motif que le dossier de demande de permis de construire ne satisfaisait pas aux exigences de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme.
3. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ". Si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les dispositions pertinentes du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard de ces dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation, si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions applicables.
4. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire qu'un document graphique permet d'apprécier l'insertion du projet de construction dans son environnement et que deux documents photographiques permettent de situer le terrain dans son environnement proche et lointain. Le projet architectural présenté comprend une notice indiquant les matériaux et couleurs des constructions et précisant que le terrain ne sera pas clôturé le long de la rue Bossuet sauf le cas échéant par une haie végétale, que les espaces verts seront plantés et engazonnés, que des arbres seront plantés à proximité des parkings et que des garages seront implantés en limite séparative. La notice du projet indique par ailleurs que " deux accès au terrain seront créés depuis la rue Bossuet, l'un à gauche au nord ouest pour les deux bâtiments arrière, et l'autre un peu plus au centre de la parcelle pour les deux bâtiments avant, et que le bâtiment du centre pourra être desservi par les deux accès ", et les plans fournis permettent de visualiser lesdits accès ainsi que leurs caractéristiques. Par suite, l'autorité compétente a pu se prononcer en toute connaissance de cause. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-10 précité manque ainsi en fait. La commune de Fegersheim est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a retenu ce moyen pour annuler l'arrêté du 6 février 2012.
5. Il appartient en conséquence à la cour, saisie de l'ensemble du litige par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens invoqués par Mme D...en première instance.
Sur les conclusions d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non recevoir opposées en première instance :
6. En premier lieu, par arrêté du 17 mars 2008, transmis au contrôle de légalité le 26 mars 2008 et affiché du 17 mars au 19 mai 2008, le maire de la commune de Fegersheim a délégué à Mme F...A..., adjointe au maire et signataire de l'arrêté du 6 février 2012, le traitement des affaires relatives au développement durable, l'environnement, le cadre de vie et l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : / a) L'identité du ou des demandeurs ; (...) La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. (...) ". Aux termes de cet article R. 423-1 : " Les demandes de permis de construire, (...) sont adressées (...) : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". Il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées par l'article R. 423-1 du même code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande.
8. La SCI Bossuet a attesté en case 8 du formulaire CERFA de demande de permis de construire qu'elle dispose de la " qualité pour demander la présente autorisation ". En conséquence, en l'absence de toute allégation de fraude, le moyen tiré de l'absence de qualité de la société pour déposer la demande de permis de construire doit être écarté.
9. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le maire de Fegersheim avait, par arrêté du 29 novembre 2010, autorisé la démolition des bâtiments existants sur le terrain d'assiette du projet. Par suite, la circonstance que le pétitionnaire ait omis de joindre à sa demande de permis de construire la justification du dépôt de la demande de permis de démolir et n'ait pas indiqué la date de démolition de l'immeuble est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué.
10. En quatrième lieu, aux termes du troisième alinéa de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à 111-14, R. 111-16 à R. 111-20 et R. 111-22 à R. 111-24-2 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu ". En vertu de ces dispositions, l'article R. 111-5 du même code relatif à la desserte des terrains d'assiette par des voies publiques ou privées n'était pas applicable dans la commune de Fegersheim, dotée d'un plan d'occupation des sols approuvé le 19 octobre 1990. Par suite, si les requérants soutiennent que le projet de construction ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article R. 111-5, ils ne peuvent utilement invoquer ces dispositions à l'encontre de l'arrêté litigieux. Le moyen soulevé est inopérant.
11. En cinquième lieu, il est soutenu que les caractéristiques de l'accès au projet auraient dû être définies avec l'administration, que l'immeuble C n'est desservi que par un accès d'une largeur de 4,22 m, que les services instructeurs devaient s'assurer de l'accès à tous les bâtiments des véhicules d'incendie et de secours, ce que n'a pas pu faire le service départemental d'incendie et de secours du Bas-Rhin qui n'était pas en possession d'éléments suffisants pour étudier le dossier.
12. Aux termes de l'article 3 UA du règlement du plan d'occupation des sols : " Le permis de construire ne peut être accordé sur des terrains qui ne seraient pas desservis soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin d'au moins 4 mètres de large par des voies publiques ou privées, dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qui y sont édifiés, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie.(...). L'accès est considéré comme suffisant avec une emprise de 4 mètres lorsqu'il dessert 1 ou 2 logements au plus, 6 mètres lorsqu'il dessert 3 à 6 logements au plus. Les caractéristiques d'un ou des accès desservant plus de six logements seront définies en fonction de l'importance de l'opération. L'accès direct des riverains aux voies pour lesquelles le recul depuis l'axe est égal ou supérieur à 17,50 mètres doit se faire en des points spécialement aménagés (...) ".
13. Il ressort des plans produits à l'appui de la demande de permis de construire que le premier accès au projet, situé au centre de la parcelle, a une largeur de 6,45 mètres et que le second accès, situé au nord ouest du projet, a une largeur d'accès à la voie publique de 6,60 mètres. Dans ces conditions, les caractéristiques des voies d'accès au projet sont suffisantes au regard des exigences précitées. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le service départemental d'incendie et de secours, consulté sur le projet, qui disposait des éléments d'information suffisants pour en apprécier la teneur, a demandé à la commune de s'assurer de la réalisation de toutes les dispositions réglementaires applicables aux immeubles d'habitation telles qu'elles sont définies par les articles de l'arrêté du 31 janvier 1986 et que le pétitionnaire a accepté de prendre en compte lesdites observations. Le moyen tiré des dispositions précitées doit, par suite, être écarté.
14. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
15. Il ressort des pièces du dossier que la rue Bossuet, qui dessert le terrain sur lequel l'arrêté attaqué autorise la réalisation de dix huit logements, est une voie d'une emprise totale de plus de 7 mètres au droit de l'accès à ce terrain. La circonstance que la rue Bossuet comporte à d'autres endroits des virages et serait étroite, n'établit pas que le maire de Fegersheim aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant, compte tenu de la configuration des lieux, que l'accès au terrain d'assiette du projet par cette voie ne présentait pas, pour les usagers de la voie publique ou pour les personnes utilisant cet accès, un risque justifiant un refus d'accorder le permis de construire demandé.
16. En septième lieu, aux termes de l'article 6 UA du règlement du plan d'occupation des sols de la commune relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques, des dispositions générales précisent que " sauf dispositions contraires indiquées au plan, les constructions peuvent être édifiées à l'alignement de toute voie limitrophe ouverte ou destinée à la circulation automobile ; elles peuvent toutefois s'en éloigner à condition d'aménager la partie laissée libre ", et des dispositions particulières disposent qu'il " existe le long de certaines voies une ligne de construction de fait en retrait de l'alignement légal " et que ce " recul sera imposé pour toute construction nouvelle s'insérant dans l'ordonnance des bâtiments riverains d'une telle rue ".
17. Il est soutenu qu'il existe une ligne de construction de fait qui aurait imposé le même recul aux constructions litigieuses. Il ressort toutefois des plans et documents d'insertion du projet dans le site produits qu'il n'existe pas de ligne de construction de fait en retrait de l'alignement légal imposant aux constructions litigieuses de venir s'édifier dans l'ordonnancement des bâtiments riverains. Par ailleurs, les bâtiments A, B et C seront édifiés en recul de l'alignement de la rue Bossuet et la partie laissée libre à l'avant des constructions sera aménagée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 UA du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Fegersheim doit, en conséquence, être écarté.
18. En huitième lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 6 février 2012 méconnait l'article L. 123-1-5-16° du code de l'urbanisme dès lors que le projet comporte six logements sociaux, soit 33 % du nombre de logements, alors que ce quota n'est que de 20 % sur le territoire de la commune de Fegersheim. Un tel moyen est inopérant à l'encontre du permis de construire contesté qui ne fait application que des règles relatives à l'utilisation du sol.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 6 février 2012 par lequel le maire de Fegersheim a délivré à la SCI Bossuet un permis de construire trois bâtiments à usage d'habitation comportant 18 logements et à demander, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité, l'annulation du jugement et le rejet de la demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Fegersheim, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MmeD..., une somme de 1 000 euros à verser à la commune de Fegersheim au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 6 février 2012.
Article 2 : La demande de MmeD..., est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Fegersheim présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fegersheim, à Mme C...D...et à la SCI Bossuet.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Strasbourg.
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N° 15NC00912