Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Consignity a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'ordonner la restitution des sommes de 20 820 euros et 22 140 euros au titre du crédit d'impôt recherche pour les années 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1400173 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2015, la SAS Consignity, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'ordonner cette restitution ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur le terrain de la loi fiscale :
- les travaux de recherche qu'elle a effectués en 2011 et 2012 pour le développement de ses produits sont éligibles au crédit d'impôt recherche dès lors que les opérations en cause satisfont à la condition de nouveauté ;
Sur l'application des dispositions des articles L. 80 A et B du livre des procédures fiscales :
- elle est fondée à se prévaloir du paragraphe n° 30 de l'instruction du 21 février 2012 4 1-3-12 publiée au bulletin officiel des impôts n° 19 du 23 février 2012 et de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 12 septembre 2012 selon lesquelles si l'assemblage de techniques existantes fait apparaitre une incertitude scientifique et/ou technique à lever alors il peut être constitutif d'une activité de recherche et développement ;
- l'administration fiscale a pris une position formelle qui lui est opposable à l'occasion de décisions de rescrit en 2006 et 2007 et de précédents contrôles fiscaux dès lors qu'elle n'a pas remis en cause, en 2008, 2009 et 2010 l'éligibilité de ses travaux.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 7 décembre 2015, a été présenté par la SAS Consignity.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public.
1. Considérant que, le 17 avril 2013, la société par actions simplifiée Consignity a demandé à l'administration fiscale la restitution, sur le fondement de l'article 244 quater B du code général des impôts instituant un crédit d'impôt recherche, des sommes de 20 820 euros et 22 140 euros qu'elle a engagées respectivement en 2011 et 2012 à l'occasion de travaux de recherche et de développement portant sur les produits dénommés " Consigne logistique ", " PaketBox " et " Boîte à colis grand public " ; que ces demandes ayant été rejetées, la société relève appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la restitution de ces deux sommes ;
Sur les conclusions aux fins de restitution :
En ce qui concerne la loi fiscale :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies,44 sexies A,44 septies,44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies et 44 duodecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté " ;
S'agissant des travaux de développement et de recherche du produit dénommé " Consigne logistique " :
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux engagés en 2011 et 2012 ont été effectués pour intégrer des caissons réfrigérés à température ambiante, froid négatif et froid positif dans une consigne automatique, devant permettre le dépôt à l'extérieur d'hypermarchés et de " drives " des produits alimentaires à l'attention des clients ; que l'étude de l'état de l'art réalisée par la requérante a révélé l'existence de trois produits déjà existants ; que si la SAS Consignity soutient que ces produits ne seraient pas adaptés à la ville et au marché des entreprises, il ne résulte cependant pas des pièces du dossier que le projet envisagé par la requérante, dont le souci principal était d'élaborer à moindre coût un produit fonctionnel pour les clients des hypermarchés, soit nouveau au sens des dispositions précitées ; que la requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a refusé de lui restituer les sommes de 538 euros et 1 665 euros ;
S'agissant des travaux de développement et de recherche du produit dénommé " PaketBox " :
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux engagés en 2011 et 2012 ont été effectués pour apporter au produit existant dénommé " PaketBox " diverses améliorations demandées par les opérateurs postaux ; que ces recherches, dans le cadre desquelles trois prototypes ont été conçus, se sont heurtées à des contraintes soit mécaniques liées à la géométrie et au volume du produit soit informatiques liées à l'usage, non pas d'une carte PC dotée d'un système d'exploitation mais d'une carte électronique microcontrôleur ; que les pièces du dossier ne révèlent pas que les solutions envisagées ou retenues ne l'ont pas été à partir d'une utilisation de l'état des techniques existantes ; qu'il s'ensuit que les améliorations recherchées ou apportées n'ont pas revêtu un caractère substantiel au sens de l'article 44 septies de l'annexe III au code général des impôts ; que la requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a refusé de lui restituer les sommes de 8 679 euros et 16 564 euros ;
S'agissant des travaux de développement et de recherche du produit dénommé " Boîte à colis grand public " :
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dépenses engagées en 2011 et 2012 ont été effectuées pour apporter au produit existant diverses améliorations en ce qui concerne le mécanisme de verrouillage, la possibilité d'apposer, pour le destinataire du colis, une contre-signature et l'accès par un badge électronique aux boîtes de l'ensemble des dépositaires ; que les pièces du dossier ne révèlent pas que les solutions envisagées ou retenues ne l'ont pas été à partir d'une utilisation de l'état des techniques existantes ; qu'il s'ensuit que les améliorations recherchées ou apportées n'ont dès lors pas revêtu un caractère substantiel au sens de l'article 44 septies de l'annexe III au code général des impôts ; que la requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a refusé de lui restituer les sommes de 9 511 euros et 2 490 euros ;
En ce qui concerne l'application des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ; que selon l'article L 80 B du même livre, la garantie prévue au premier alinéa de l'article L 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ;
7. Considérant que la décision par laquelle l'administration fiscale a refusé de faire droit à une demande de restitution d'une somme au titre d'un crédit d'impôt ne constitue pas un rehaussement d'impôt ; que la SAS Consignity n'est par suite fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L 80 A précité, le bénéfice ni du paragraphe n° 30 de l'instruction du 21 février 2012 4 1-3-12 publiée au bulletin officiel des impôts n° 19 du 23 février 2012 ni de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 du 12 septembre 2012 ; que la requérante ne justifie, en tout état de cause, pas entrer dans les prévisions de la doctrine administrative dès lors qu'elle n'établit pas qu'elle a mis en oeuvre un assemblage de techniques existantes faisant apparaitre une incertitude scientifique et/ou technique à lever permettant de regarder ses projets comme constitutifs d'une activité de recherche et développement ; qu'elle n'est pas davantage fondée, en l'absence de rehaussement d'impositions antérieures, à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, lequel renvoie à la garantie prévue par le premier alinéa de l'article L. 80 A du même livre, d'une position formelle prise par l'administration fiscale à l'occasion de décisions de rescrit en 2006 et 2007 et relatives en tout état de cause uniquement au statut de jeune entreprise innovante prévu à l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts ; qu'elle ne saurait pas non plus, pour les mêmes raisons et en tout état de cause, invoquer les prétendues positions formelles prise lors de précédents contrôles fiscaux ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Consignity n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SAS Consignity au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Consignity est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Consignity et au ministre des finances et des comptes publics.
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N° 15NC00714