La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2015 | FRANCE | N°15NC00038

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 05 novembre 2015, 15NC00038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JD Pharm, M. F...C...en sa qualité d'exploitant de la pharmacie, M. F... C...et M. A...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner la commune de Dole à leur verser les sommes respectives de 217 648 euros, 641 449 euros, 155 895 euros et 157 596 euros en réparation de préjudices subis du fait de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 décembre 2007 à la SCI JD Pharm.

Par un jugement n° 1300882 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Besançon a c

ondamné la commune de Dole à verser 3 000 euros à M. C...et 3 000 euros à M. B...e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JD Pharm, M. F...C...en sa qualité d'exploitant de la pharmacie, M. F... C...et M. A...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner la commune de Dole à leur verser les sommes respectives de 217 648 euros, 641 449 euros, 155 895 euros et 157 596 euros en réparation de préjudices subis du fait de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 décembre 2007 à la SCI JD Pharm.

Par un jugement n° 1300882 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Besançon a condamné la commune de Dole à verser 3 000 euros à M. C...et 3 000 euros à M. B...en réparation de leur préjudice moral et rejeté le surplus de leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2015, la SCI JD Pharm, M. F...C...en sa qualité d'exploitant de la pharmacie, M. F...C...et M. A...B..., associés de la SCI JD Pharm, représentés par Me G..., demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1300882 du 13 novembre 2014 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) de condamner la commune de Dole à leur verser les sommes de 174 587,58 euros pour la SCI JD Pharm, 529 500 euros pour la pharmacieC..., 30 000 euros pour M. C... et 30 000 euros pour M. B...en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Dole une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SCI JD Pharm et autres soutiennent que :

- la commune a commis une faute qui engage sa responsabilité ;

- aucune cause exonératoire ne peut atténuer la responsabilité de la commune de Dole en l'absence de toute faute de la SCI JD Pharm ;

- le préjudice subi par la SCI JD Pharm est pleinement justifié en ce qui concerne le coût des travaux exposés à hauteur de 160 901,48 euros, les frais de notaire à hauteur de 13 686,10 euros et les diverses formalités concernant l'achat de la parcelle ;

- la pharmacie C...et M. C...en sa qualité de gérant ont sollicité l'indemnisation de la perte définitive du transfert de licence accordée par le préfet le 29 février 2008 dès lors que la pharmacie a subi un préjudice commercial en l'absence de transfert de l'officine, ce qui a généré un manque à gagner qui peut être évalué à 529 500 euros dont il est justifié dans les écritures ;

- la pharmacie justifie également des frais de toute nature qu'il revient à la commune d'indemniser et qui tiennent aux frais d'architecte, aux frais de géomètre, aux frais d'avocats, aux frais d'huissier, aux factures d'eau et d'électricité ;

- le préjudice moral de MM. C...et B...tient à la non réalisation de leur association professionnelle et au fait que M. C...a dû voir s'installer une nouvelle officine près de l'emplacement où son propre projet devait se réaliser.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2015, la commune de Dole, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI JD Pharm, de la pharmacieC..., de M. F... C... et de M. A...B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me H...D..., pour les requérants, ainsi que celles de Me E..., pour la commune de Dole.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., qui exploite une officine de pharmacie rue des Arènes à Dole, s'est associé avec M.B..., dans le cadre de la SCI JD Pharm avant de solliciter, le 12 décembre 2007, le transfert de cette dernière sur un terrain acquis par cette société, au 26 de l'avenue Jouhaux à Dole. Le dossier d'autorisation déposé par M. C...comprenait le permis de construire délivré le 11 décembre 2007 à la SCI JD Pharm par le maire de Dole, en vue de transformer l'immeuble existant sur son terrain et d'y accueillir la nouvelle officine. Le tribunal administratif de Besançon a annulé ce permis de construire par un jugement du 19 janvier 2009 qui a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy, devenu définitif. A la suite du rejet de leur demande indemnitaire par la commune de Dole, la SCI JD Pharm et autres ont saisi le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Dole à réparer les préjudices subis du fait de l'illégalité du permis de construire du 11 décembre 2007. Les requérants relèvent appel du jugement du 13 novembre 2014 par lequel le tribunal a limité la condamnation de la commune de Dole à réparer le préjudice moral de M. C...et de M. B... à hauteur de 3 000 euros pour chacun d'eux et rejeté le surplus de leurs prétentions.

Sur la demande de la SCI JD Pharm :

2. La SCI JD Pharm soutient que la commune doit réparer le préjudice résultant de l'illégalité du permis de construire qu'elle lui a délivré correspondant au montant des travaux engagés sur l'immeuble au bénéfice de ce permis de construire illégal.

3. A ce titre, la SCI JD Pharm précise en appel les modalités du calcul de l'indemnité qu'elle revendique à hauteur de 160 901,48 euros et correspondant au coût des travaux de construction et d'extension du bâtiment pressenti pour accueillir la nouvelle officine complété des frais d'acquisition de la parcelle.

4. La SCI JD Pharm ne produit toutefois aucune précision sur la nature exacte du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité du permis de construire et dont l'évaluation correspondrait au coût des travaux litigieux. Il ne résulte notamment pas de l'instruction que lesdits travaux aient été engagés en pure perte ou ne soient pas en mesure de participer à la valorisation de son bien. Un permis de régularisation devenu définitif a d'ailleurs été délivré à la SCI JD Pharm le 3 novembre 2009 lui permettant de poursuivre son projet de construction conformément à cette autorisation. Dans ces conditions, et alors que la société requérante indique expressément ne pas se placer sur le terrain des pertes financières découlant de la différence constatée entre les coûts d'acquisition et de construction du bien et le montant de sa valeur actuelle, ses conclusions indemnitaires ne peuvent être que rejetées.

5. Il résulte de ce qui précède que la SCI JD Pharm n'est pas fondée à demander la condamnation de la commune de Dole en raison de l'illégalité du permis de construire qui lui a été délivré le 11 décembre 2007.

Sur la demande de M. C...présentée au nom de la PharmacieC... :

6. M. F...C..., en sa qualité d'exploitant de la pharmacie, soutient qu'en raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 décembre 2007, il n'a pu réaliser le projet de transfert de son officine, ce qui est à l'origine d'un manque à gagner estimé à 529 500 euros. Il résulte toutefois de l'instruction que l'opération de transfert envisagée pour la pharmacie de M. C...sur le fondement de l'autorisation obtenue le 29 février 2008 a été déclarée illégale par un jugement du tribunal administratif de Besançon du 28 janvier 2010. Eu égard au motif d'illégalité retenu dans ce litige qui opposait l'autorité préfectorale à une officine concurrente et tenant à la méconnaissance des principes d'égalité et de neutralité régissant le service public, l'opération de transfert envisagée n'aurait pu être menée à terme, alors même que le permis de construire du 11 décembre 2007 n'aurait été entaché d'aucune illégalité. Le préjudice commercial né de l'absence de réalisation de cette opération n'est donc pas en lien suffisamment direct avec l'illégalité du permis de construire qui lui a été délivré.

7. Par ailleurs, et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que les frais d'architecte et de géomètre dont M. C...demande l'indemnisation en sa qualité de gérant de la pharmacie, ont été engagés par la SCI JD Pharm désignée comme maître d'ouvrage de l'opération de construction litigieuse et non par la pharmacie. Il en va de même des frais d'avocats justifiés par les factures des 20 février 2008, 16 mai 2008, 8 décembre 2008, 3 mars 2009, 15 octobre 2009, 27 août 2009, 4 février 2010, 5 août 2010 et 10 septembre 2010 qui ont été engagés soit par la SCI JD Pharm, soit par M. C..., sans que dans cette dernière hypothèse, les modalités ou l'objet du règlement soient justifiés. Il en est également ainsi des deux factures d'huissier qui ont été adressées à la SCI JD Pharm. La demande indemnitaire formée à cet égard ne peut donc qu'être rejetée.

8. Enfin, M. C...ne précise pas la nature exacte du préjudice correspondant aux frais de raccordement au réseau d'eau et d'électricité dont il demande réparation. Il ne résulte d'ailleurs pas de l'instruction que la construction litigieuse ne soit pas en mesure d'être occupée, un permis de régularisation ayant été délivré.

9. Il résulte de ce qui précède que M.C..., agissant en qualité de gérant de la pharmacieC..., n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune en raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 décembre 2007.

Sur les demandes émanant de MM. C...etB... :

10. M. C...et M. B...soutiennent que le tribunal a sous-évalué le montant qui doit leur être accordé en réparation du préjudice moral qu'ils ont personnellement subi et tenant pour l'essentiel à la non réalisation de leur association professionnelle et au fait que M. C... a dû voir s'installer une nouvelle officine près de l'emplacement où son propre projet devait se réaliser.

11. Les requérants, par les moyens qu'ils invoquent, ne critiquent toutefois utilement ni le partage de responsabilité, ni le montant de l'indemnité qui leur a été versée, en réparation du préjudice moral subi alors qu'il résulte au demeurant de l'instruction que l'illégalité de l'autorisation de transfert de la pharmacie de M. C...dans de nouveaux locaux sis avenue Jouhaux à Dole a compromis la poursuite du projet.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI JD Pharm et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Besançon a limité à 3 000 euros le montant des sommes à verser à M. C... et à M. B...en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 décembre 2007.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Dole qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCI JD Pharm et autres demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

14. En revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la SCI JD Pharm, de M. C...et de M. B...le paiement de la somme globale de 1 500 euros à la commune de Dole au titre des frais que celle-ci a exposés pour sa défense.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI JD Pharm et autres est rejetée.

Article 2 : La SCI JD Pharm, M. C...et M. B...verseront à la commune de Dole une somme globale de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI JD Pharm, à la pharmacieC..., à M. F... C..., à M. A...B...et à la commune de Dole.

''

''

''

''

3

N° 15NC00038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00038
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme - Permis de construire - Préjudice.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère direct du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : NICOLLE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-05;15nc00038 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award