La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2015 | FRANCE | N°14NC02227

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2015, 14NC02227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 mars 2014 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1402593 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2014, M.B..., représe

nté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 mars 2014 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1402593 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2014, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un vice de procédure ;

- il est également entaché d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- le préfet s'est à tort cru en situation de compétence liée pour prendre à son encontre une telle mesure ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet s'est également cru à tort lié par le délai de trente jours indiqué à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour lui accorder un délai de départ volontaire de cette durée ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire d'une durée supérieure à 30 jours ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er avril 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par une décision du 27 novembre 2014, le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Bonifacj, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant guinéen, entré irrégulièrement en France selon ses déclarations le 20 juillet 2011, a présenté le 26 avril 2013 une demande de titre de séjour à raison de son état de santé ; qu'une autorisation provisoire lui a été délivrée du 18 juillet 2013 au 18 février 2014 ; que le requérant a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour le 14 janvier 2014 ; que, par un arrêté du 10 mars 2014, le préfet de la Moselle lui a refusé le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ; que, par un jugement du 18 septembre 2014, dont M. B...relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;

4. Considérant, d'une part, que la saisine du directeur général de l'agence régionale de santé territorialement compétent est subordonnée au fait que le demandeur fasse valoir des circonstances humanitaires exceptionnelles auprès de l'administration ; que si M. B...soutient avoir porté à la connaissance du préfet la nature des affections dont il est atteint, levant ainsi le secret médical, et souligné les carences du système de santé guinéen, ces éléments ne constituaient pas des circonstances humanitaires exceptionnelles au sens et pour l'application des dispositions précitées imposant au préfet de saisir le directeur général de l'agence régionale de santé ; que, dès lors, le préfet n'a pas entaché sa décision d'un vice de procédure en omettant de saisir le directeur général de cette agence ;

5. Considérant, d'autre part, que pour refuser de délivrer à M.B..., qui souffre d'un syndrome de stress post-traumatique et de drépanocytose, le titre de séjour qu'il sollicitait à raison de son état de santé, le préfet de la Moselle s'est en particulier appuyé sur l'avis émis le 14 janvier 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé de Lorraine aux termes duquel l'état de santé de l'intéressé ne nécessite pas actuellement de prise en charge médicale, les pathologies pouvant être qualifiées de mineures, son défaut ne devrait pas entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine et il peut voyager sans risque à destination de celui-ci ; qu'en admettant même que l'état de santé de M. B...nécessiterait une prise en charge médicale, les certificats médicaux produits par le requérant ne se prononcent pas sur la disponibilité des soins en Guinée et, reprenant les déclarations de l'intéressé, ne permettent pas d'établir que les troubles dont il est atteint auraient leur origine dans les événements qu'il aurait vécu dans son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant le titre de séjour sollicité ;

6. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué par voie d'exception, tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit au point 5, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour assortir sa décision de refus de séjour d'une mesure d'éloignement ou pour fixer à trente jours le délai laissé au requérant pour exécuter son obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant, enfin, que la seule circonstance que M. B...fasse l'objet d'un suivi médical en France ne permet pas d'établir que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé en ne lui octroyant pas un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

12. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que M. B..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 juillet 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 15 mars 2013, soutient qu'il encourt le risque d'être exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Guinée ; que, toutefois, il ne produit aucun document permettant d'étayer ses allégations et d'établir qu'il se trouverait personnellement exposé à un risque réel, direct et sérieux pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

''

''

''

''

5

N° 14NC02227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC02227
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : EVEN
Rapporteur ?: Mme Julienne BONIFACJ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 30/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-07-02;14nc02227 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award