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02/07/2015 | FRANCE | N°14NC00589

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2015, 14NC00589


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...et Mme F... C...épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, les arrêtés en date du 3 juin 2013 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement et, d'autre part, les décisions en date du 28 juin 2013 par lesquelles le préfet de la Moselle a, de nouveau, refusé de l

eur délivrer un titre de séjour.

Par un jugement nos 1304173,1304172,1304174,13...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...et Mme F... C...épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, les arrêtés en date du 3 juin 2013 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement et, d'autre part, les décisions en date du 28 juin 2013 par lesquelles le préfet de la Moselle a, de nouveau, refusé de leur délivrer un titre de séjour.

Par un jugement nos 1304173,1304172,1304174,1304175 du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2014, M. et MmeE..., représentés par Me Dollé, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 décembre 2013 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions prises à leur encontre par le préfet de la Moselle les 3 et 28 juin 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de leur délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation administrative dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Dollé sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les refus de titre de séjour sont insuffisamment motivés ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- à la date à laquelle l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été rendu, le directeur régional de cette agence n'a pas été en mesure de donner un avis sur les circonstances humanitaires exceptionnelles devant conduire le préfet à délivrer le titre de séjour sollicité, privant ainsi Mme D...d'une garantie ;

- les arrêtés attaqués ont méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- le préfet s'est estimé à tort tenu de prononcer une obligation de quitter le territoire français ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français devront être annulées en conséquence de l'annulation des décisions de refus de titre de séjour ;

- les décisions fixant le délai de départ volontaire méconnaissent les articles 24 de la loi du 12 avril 2000 et 41-2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- en fixant à trente jours le délai de départ volontaire, le préfet s'est cru lié par le délai d'un mois, énoncé au I de l'article L. 511-1 et a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions fixant le pays de renvoi sont insuffisamment motivées ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2014, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mars 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Kohler, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. et MmeE..., ressortissants macédoniens, ont, après le rejet de leurs demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en 2011, fait l'objet, par arrêtés du 1er mars 2012 du préfet de la Moselle, de refus de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français ; que, le 28 janvier 2013, ils ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en invoquant l'état de santé de Mme D... ; que, par deux arrêtés du 3 juin 2013, le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer les titres de séjour sollicités, a assorti ces refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés d'office à l'expiration de ce délai ; que, par un courrier du 9 mars 2013, les requérants ont sollicité leur admission exceptionnelle au séjour ; que, par deux décisions du 28 juin 2013, le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à cette nouvelle demande et confirmé les termes de l'obligation de quitter le territoire français du 3 juin 2013 ; que M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 19 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que les décisions en litige mentionnent les considérations de fait et de droit sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. et Mme D... ; qu'elles sont ainsi suffisamment motivées ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " L'étranger qui a déposé une demande de délivrance ou de renouvellement de carte de séjour temporaire est tenu de faire établir un rapport médical relatif à son état de santé par un médecin agréé ou par un médecin praticien hospitalier visé au 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique " ; qu'enfin, l'article 4 de ce même arrêté prévoit : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois " ;

4. Considérant, d'une part, que Mme D...soutient qu'elle ne pourrait être soignée dans son pays d'origine dès lors que sa pathologie trouverait son origine dans les événements qu'elle y a vécus et qu'il existe en Macédoine une réelle discrimination ethnique envers les Albanais, qui l'empêcherait d'avoir effectivement accès aux soins nécessaires à la prise en charge de son état de santé ; qu'en se bornant à renvoyer, de manière générale, à des rapports établis par le haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et le conseil de l'Europe, elle ne produit aucun élément de nature à établir qu'elle a fait valoir, à l'appui de sa demande, des circonstances humanitaires exceptionnelles devant, en application des dispositions précitées, donner lieu à un avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; que Mme D...n'est ainsi pas fondée à soutenir qu'elle a été privée d'une garantie ;

5. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement décider le refus de carte de séjour ou l'éloignement de l'étranger que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans ce pays ;

6. Considérant que pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme D... sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Moselle s'est fondé sur l'avis médical émis le 23 avril 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé qui a estimé que l'état de santé de Mme D... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que l'intéressée peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que si Mme D...soutient qu'elle ne pourra effectivement bénéficier de soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine en raison de discriminations dans l'accès aux soins, les documents qu'elle produit, notamment les certificats médicaux, qui se bornent à constater que son état de santé nécessite une prise en charge médicale et la poursuite d'un traitement médicamenteux ne permettent pas d'établir l'absence de soins appropriés dans le pays d'origine et, par suite, de contredire l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé ; que les éléments qu'elle produit ne permettent pas d'établir les discriminations dont elle se prévaut et ne caractérisent pas l'existence de circonstances humanitaires exceptionnelles ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Moselle aurait fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

7. Considérant, enfin, eu égard à ce qui vient d'être dit, que le préfet n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle des intéressés ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

9. Considérant que, pour soutenir que les décisions en litige portant refus de séjour porteraient atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, M. D...ne fait valoir que l'état de santé de son épouse ; que, dans ces conditions, pour les motifs exposés au point 6, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les refus de séjour en litige méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des refus de titre de séjour doit être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour assortir les refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

13. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

14. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d 'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que le préfet de la Moselle n'aurait pas expressément informé M. et Mme D...qu'en cas de rejet de leur demande de titre de séjour, ils seraient susceptibles d'être contraints de quitter le territoire français, en les invitant à formuler leurs observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder les intéressés comme ayant été privés de leur droit à être entendu énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions fixant le délai de départ volontaire :

16. Considérant, en premier lieu, que par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises les décisions portant obligation de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent, telle la décision fixant le délai de départ volontaire ; que, par suite, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre des décisions en litige ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

18. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. et Mme D..., qui ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour, ne pouvaient ignorer qu'en cas de rejet de leur demande, une mesure d'éloignement serait en principe prise à leur encontre et qu'un délai de trente jours leur serait laissé pour quitter le territoire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme D... auraient sollicité en vain un entretien ni qu'ils aient été privés de la possibilité de faire valoir auprès de l'administration des informations pertinentes susceptibles de conduire à l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que M. D...et Mme D...auraient été privés de leur droit d'être entendus énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté ;

19. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait cru lié par le délai de trente jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 511-1 comme limite supérieure du délai devant être laissé pour un départ volontaire et n'aurait pas examiné, au vu des pièces dont il disposait, la possibilité de prolonger le délai accordé aux requérants avant de le fixer à trente jours ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Moselle aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté ;

20. Considérant, enfin, que la circonstance que Mme D...devait faire l'objet de soins ne permet pas d'établir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant un délai de départ de trente jours ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

21. Considérant, en premier lieu, que les décisions attaquées font état de ce que les demandes d'asile présentées par M. et Mme D...ont été rejetées et de ce qu'ils ne justifient pas que leur vie ou leur liberté seraient menacées en cas d'éloignement vers leur pays d'origine ni qu'ils seraient exposés à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces décisions sont ainsi suffisamment motivées ;

22. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

23. Considérant que si M. et Mme D...soutiennent qu'ils encourent des risques en cas de retour dans leur pays d'origine en raison du harcèlement dont ils y ont fait l'objet avant leur départ, ils ne produisent aucun élément de nature à établir la réalité de ces risques, alors d'ailleurs que ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ni la Cour nationale du droit d'asile n'en ont reconnu l'existence ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Mme F... C...épouse D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 14NC00589


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00589
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05 Étrangers. Réfugiés (voir : Asile) et apatrides.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTÉRA
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-07-02;14nc00589 ?
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