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02/06/2015 | FRANCE | N°14NC01184

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 juin 2015, 14NC01184


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté en date du 24 février 2014 par lequel le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée.

Par un jugement n° 1400363 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25

juin 2014, 8 octobre 2014 et 12 janvier 2015, Mme C..., représentée par MeF..., demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté en date du 24 février 2014 par lequel le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée.

Par un jugement n° 1400363 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25 juin 2014, 8 octobre 2014 et 12 janvier 2015, Mme C..., représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 27 mai 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 24 février 2014 pris à son encontre par le préfet du Jura ;

3°) d'enjoindre au préfet du Jura, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", et, à titre subsidiaire, de renouveler son actuel titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 24 février 2014 a été pris par une autorité incompétente ;

- la décision portant refus de titre séjour est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour prévue par l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les dispositions des articles L. 313-12 et L. 413-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 septembre 2014, 11 décembre 2014 et 9 février 2015, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce qu'à la suite de la délivrance par le préfet de la Corrèze à Mme E...D...épouse C...d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", valable du 6 octobre 2014 au 5 octobre 2015, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision en date du 19 août 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme E...D..., épouseC..., ressortissante marocaine née le 6 avril 1993, est entrée en France le 20 mars 2013 sous couvert d'un visa long séjour en tant que " conjoint de français " ; que l'intéressée a déposé le 8 janvier 2014 une demande de renouvellement de sa carte de séjour en qualité de conjoint de français sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 24 février 2014, le préfet du Jura a refusé de renouveler son titre de séjour et de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée ; que MmeD..., épouseC..., relève appel du jugement du 27 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Corrèze a délivré à Mme E...D...épouse C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 6 octobre 2014 au 5 octobre 2015, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que par arrêté du 8 novembre 2013, publié au recueil des actes administratif de la préfecture n° 68 du 15 novembre 2013, le préfet du jura a donné délégation à M. A...B..., sous-préfet de Dole, à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Poussier, secrétaire général de la préfecture du Jura, les décisions pour lesquelles délégation lui a été donnée par l'arrêté n° 2013189-0012 du 8 juillet 2013, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 34 de juillet 2013, et portant " pour toutes matières relevant des compétences et attributions du représentant de l'Etat dans le département à l'exception de décisions ne concernant pas l'entrée et l'éloignement des étrangers " ; que l'arrêté du 8 juillet 2013 précité dont la délégation porte sur l'entrée et l'éloignement des étrangers vise le décret du 3 décembre 2012 portant nomination de M.B..., sous-préfet de Dole ; qu'enfin, si la requérante soutient que l'administration ne justifie pas que M. Poussier était absent ou empêché, il appartient à MmeC..., qui conteste la qualité du délégataire pour signer l'arrêté en litige, d'établir que M. Poussier n'était pas absent ou empêché ; que Mme C...n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de titre de séjour comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans rédaction alors en vigueur : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". / L'accès de l'enfant français à la majorité ne fait pas obstacle au renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 6° de l'article L. 313-11. / La carte de séjour délivrée au titre de l'article L. 313-11-1 ne donne pas droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans l'année qui suit sa première délivrance, sauf si elle est accordée en application du II de cet article et que son bénéficiaire séjourne en France depuis au moins un an " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " " ;

6. Considérant que Mme C...soutient qu'elle a subi des violences conjugales de la part de son époux pendant leurs six jours de vie commune sur le territoire français, du 20 au 26 mars 2013 ; que si Mme C...a déposé une plainte contre son époux le 11 avril 2013, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'examen médical pratiqué par le médecin au centre hospitalier de Lons-le-Saunier le 10 avril 2013 ne fait état d'aucune lésion ; que, par suite, et alors au demeurant que sa plainte a été classée sans suite le 25 novembre 2014, la requérante n'établit pas la réalité des violences alléguées ; que, par suite, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ; qu'en outre, la requérante qui n'a pas été admise au séjour au titre du regroupement familial ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que Mme C...soutient que sa vie privée et familiale se situe en France où réside sa famille et notamment sa soeur et sa mère et qu'elle justifie de son insertion dans la société française, ayant un travail et parlant le français ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...est entrée en France à l'âge de presque vingt ans afin de rejoindre son époux de nationalité française ; qu'à la date de la décision en litige, l'intéressée, dont la communauté de vie avec son époux avait cessé, ne séjournait en France que depuis près d'un an ; qu'alors même qu'elle n'a pas d'autres frères et soeurs au Maroc et serait sans contact avec son père, Mme C...n'établit pas qu'elle ne pourrait poursuivre une vie privée et familiale normale au Maroc ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu notamment de la durée du séjour en France, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, les moyens tirés de l'inexacte application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que, compte tenu de ce qui a été ci-dessus exposé, le préfet du Jura n'était pas tenu de soumettre le cas de la requérante à la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision refusant de lui accorder titre de séjour ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme C... tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

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N° 14NC01184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01184
Date de la décision : 02/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTÉRA
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : MARRAUD DES GROTTES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-06-02;14nc01184 ?
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