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03/03/2015 | FRANCE | N°14NC00419

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 03 mars 2015, 14NC00419


Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour M. C... B..., demeurant au..., par Me A... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304143 du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 juillet 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arr

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3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un tit...

Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour M. C... B..., demeurant au..., par Me A... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304143 du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 juillet 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai déterminé, au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour, que :

- cette décision est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne pas les dispositions de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour et n'indique pas les éléments de fait et de droit au titre de l'article L. 313-14 du même code ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, souffrant d'un syndrome de stress-post traumatique ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français, que :

- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prendre cette décision ;

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision fixant un délai de départ volontaire, que :

- le préfet s'est cru à tort lié par les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour fixer un délai de départ volontaire de trente jours ;

- son état de santé justifiait l'octroi d'un délai de départ volontaire de plus de trente jours ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination, que :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2014, présenté par le préfet de la Moselle, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 25 février 2014, admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant du Kazakhstan né le 23 mai 1982, est entré en France irrégulièrement, à la date du 3 octobre 2011 selon ses déclarations ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 31 janvier 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 10 octobre 2012 ; que M. B... a présenté une demande de titre de séjour le 15 novembre 2012 en raison de son état de santé ; que, par arrêté du 3 juillet 2013, le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que M. B... relève appel du jugement en date du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision susmentionnée, après avoir visé notamment le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne plus particulièrement que M. B... a été admis au séjour provisoire en qualité de demandeur d'asile, que sa demande avait été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 31 janvier 2012 et par la Cour nationale du droit d'asile le 10 octobre 2012 et qu'il peut dès lors se voir refuser la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, si le préfet n'a pas indiqué que l'intéressé n'entrait pas non plus dans le cas prévu à l'article L. 313-13 de ce code relatif à la délivrance d'une carte de séjour temporaire à l'étranger ayant obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire, cette seule circonstance n'est pas de nature à entacher d'un défaut de motivation l'arrêté attaqué qui énonce en des termes suffisamment précis que M. B...ne pouvait se voir attribuer un titre de séjour au titre de l'asile du fait du rejet de sa demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ce qui visait nécessairement à la fois le refus de reconnaissance de la qualité de réfugié et le refus du bénéfice de la protection subsidiaire ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si la décision en litige indique également qu'il n'a pas paru opportun d'admettre l'intéressé au séjour à titre dérogatoire ou pour des motifs exceptionnels ou humanitaires, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que M. B...se serait prévalu de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, si le préfet devait examiner d'office, ainsi qu'il l'a fait et sans qu'il soit besoin de solliciter les observations préalables du demandeur, s'il y avait lieu de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régulariser la situation de M.B..., il n'avait pas à expliciter les éléments d'appréciation l'ayant conduit à estimer que l'admission au séjour de l'intéressé ne se justifiait ni à titre dérogatoire ni au regard de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels, en l'absence de circonstances autres que celles invoquées dans ses demandes de titre de séjour en qualité de réfugié et d'étranger malade ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait insuffisamment motivée sur ce point doit être écarté ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays " ;

5. Considérant que M. B...soutient qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine dès lors qu'il souffre d'un syndrome post traumatique à la suite des événements que se sont déroulés dans son pays ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par avis du 5 juin 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. B... n'établit par aucune pièce suffisamment probante que sa pathologie ne lui permettrait pas de retourner dans son pays d'origine, alors d'ailleurs qu'il ne justifie pas la réalité des faits dont il aurait été victime et qui n'ont, au demeurant, pas été retenus par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision en litige, que le préfet se serait cru à tort lié par la décision de refus de titre de séjour pour édicter l'obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. B...n'établit pas l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi " ;

9. Considérant que, ainsi qu'il a été dit au point 5, M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait cru à tort lié par un délai de départ volontaire de trente jours, alors qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que M. B... aurait fait état devant l'administration, lors du dépôt de sa demande de titre de séjour ou, à tout le moins, avant l'édiction de la décision en litige, de circonstances particulières, propres à justifier une prolongation de ce délai ; qu'en outre, l'intéressé en se bornant à exposer que son état de santé nécessite un traitement au long cours, alors qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine, ne justifie d'aucune circonstance particulière ; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, que la décision susmentionnée, après avoir visé les textes applicables, indique que M. B..., né le 23 août 1982, soutenant l'identité kazakhe, n'a pas justifié être exposé à des peines, menaces ou traitements contraires aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales en cas de départ de France ; que la décision contestée comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et, est, par suite, suffisamment motivée ;

12. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains ou dégradants " ;

13. Considérant que M. B...soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour au Kazakhstan en raison des menaces et des violences dont il a fait l'objet par un groupe criminel local en raison de son appartenance ethnique et de sa qualité de commerçant prospère ; que, toutefois, M. B...n'établit pas le caractère réel, personnel et actuel des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors que sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 10 octobre 2012, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 14NC00419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00419
Date de la décision : 03/03/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTÉRA
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-03-03;14nc00419 ?
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