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29/01/2015 | FRANCE | N°14NC00990

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2015, 14NC00990


Vu I°), sous le n° 140989, la requête enregistrée le 23 mai 2014, présentée pour Mme D...B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400325-1400326 du 5 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 19 décembre 2013 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui d

livrer un titre de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard, à compter de la no...

Vu I°), sous le n° 140989, la requête enregistrée le 23 mai 2014, présentée pour Mme D...B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400325-1400326 du 5 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 19 décembre 2013 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du titre de séjour définitif ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- son époux devant se voir délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, elle devait obtenir un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 13 octobre 2014 et le 10 novembre 2014, présentés par le préfet de la Moselle, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;

Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle du 8 juillet 2014, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu II°), sous le n° 140990, la requête enregistrée le 23 mai 2014, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par MeA... ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400325-1400326 du 5 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 19 décembre 2013 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du titre de séjour définitif ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- le préfet aurait dû au préalable saisir la commission départementale du titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 13 octobre 2014 et le 10 novembre 2014, présentés par le préfet de la Moselle, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;

Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle du 8 juillet 2014, admettant M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015, le rapport de Mme Bonifacj, président ;

1. Considérant que M. et MmeB..., ressortissants bosniens, entrés en France le 11 juin 2012, relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 mai 2014 rejetant leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Moselle du 19 décembre 2013 leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2. Considérant que les requêtes susvisées présentées par M. et Mme B...sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur la légalité des refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés attaqués, après avoir visé la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier le 3° du I et le II de l'article L. 511-1 et le 8° de l'article L. 313-11, indiquent notamment que les demandes de reconnaissance de la qualité de réfugié présentées par M. et Mme B...ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile; qu'ainsi, les décisions refusant un titre de séjour aux intéressés comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de leur insuffisante motivation manque en fait et ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;

5. Considérant que pour refuser à M. B...le titre de séjour qu'il sollicitait à raison de son état de santé, le préfet de la Moselle s'est en particulier fondé sur l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé de Lorraine le 25 novembre 2013 aux termes duquel si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale présentant un caractère de longue durée et devant être poursuivie pendant une durée indéterminée, dont le défaut peut entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine pour cette prise en charge médicale et il peut voyager sans risque à destination de celui-ci ; que, pour remettre en cause cette appréciation, M. B...produit deux certificats médicaux ; que, toutefois, ces documents peu circonstanciés ne se prononcent pas sur l'existence d'un traitement approprié à l'état de santé de l'intéressé en Bosnie et ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par le préfet de la Moselle ; que, dès lors, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'est pas entaché d'erreur d'appréciation dans l'application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite et en tout état de cause, Mme B...ne peut utilement soutenir qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour en raison de l'état de santé de son époux ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer (...) une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions requises pour prétendre à la délivrance, de plein droit, d'un titre de séjour ; qu'eu égard à ce qui a été dit au point 5, M. B... ne répondait pas aux conditions pour se voir délivrer, de plein droit, un titre de séjour à raison de son état de santé ; que, dès lors, le préfet n'avait pas à saisir la commission départementale du titre de séjour avant de lui opposer la décision contestée ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. et Mme B...qui font tous deux l'objet d'une mesure d'éloignement par une décision du même jour, n'avancent aucun élément faisant obstacle à ce qu'ils poursuivent avec leurs enfants leur vie familiale dans leur pays d'origine ; que, dès lors, les décisions contestées du préfet de la Moselle n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elles ont été prises ; que, par suite, elles n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle des intéressés ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale des décisions faisant obligation aux requérants de quitter le territoire ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que le préfet de la Moselle a, par l'article 1er de l'arrêté du 14 février 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs des services de l'Etat dans ce département, donné délégation à M. du Cray, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer : " tous arrêtés, décisions (...) relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Moselle, à l'exception des déclinatoires de compétence et arrêtés de conflit et des réquisitions de la force armée " ; qu'en application de l'article 5 du même arrêté, les mêmes attributions ont été déléguées à M. Valembois, secrétaire général adjoint de la préfecture, en cas d'absence ou d'empêchement de M. du Cray ; qu'il n'est pas allégué que ce dernier n'aurait été ni absent ni empêché ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que M. Valembois n'avait pas compétence pour les obliger à quitter le territoire français ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ; qu'ainsi qu'il a été dit, le refus de titre de séjour est suffisamment motivé ; que, dès lors, l'obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

12. Considérant, en quatrième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant, en dernier lieu, que si les requérants se prévalent de l'état de santé de M.B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle des intéressés ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 19 décembre 2013 pris à leur encontre par le préfet de la Moselle ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées par M et Mme B...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

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N° 14NC00989, 14NC00990


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00990
Date de la décision : 29/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Julienne BONIFACJ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SELARL ISARD AVOCAT CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-01-29;14nc00990 ?
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