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20/11/2014 | FRANCE | N°14NC00321

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2014, 14NC00321


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2014, présentée par le préfet du Haut-Rhin ;

Le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1400279 du 22 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 2 décembre 2013 en tant qu'il a fait obligation à M. B...A...de quitter le territoire français ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Le préfet soutient que la décision attaquée du 2 décembre 2013 n'a pas méconnu les stipulations d

e l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés f...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2014, présentée par le préfet du Haut-Rhin ;

Le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1400279 du 22 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 2 décembre 2013 en tant qu'il a fait obligation à M. B...A...de quitter le territoire français ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Le préfet soutient que la décision attaquée du 2 décembre 2013 n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2014, présenté pour M. B...A..., demeurant..., par MeC..., qui conclut au rejet de la requête ;

M. A...soutient qu'il justifie d'attaches familiales anciennes et stables sur le territoire français et que les poursuites pour faux et usage de faux engagées à son encontre ont été classées sans suite ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2014 :

- le rapport de M. Martinez, président-rapporteur ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité marocaine, est entré en France le 2 mars 2007, à l'âge de quarante-neuf ans ; qu'il a présenté le 7 octobre 2013 une demande d'admission exceptionnelle au séjour pour des considérations exceptionnelles ou humanitaires ; que, par un arrêté du 2 décembre 2013, le préfet du Haut-Rhin a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que, par un deuxième arrêté du 16 janvier 2014, le même préfet a assigné M. A...à résidence ; que, par un jugement du 22 janvier 2014, le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 2 décembre 2013 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français ; que le préfet du Haut-Rhin demande l'annulation de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un Etat l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire ;

3. Considérant que pour annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 2 décembre 2013 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français, le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est notamment fondé sur les circonstances que M. A...entretient des relations familiales et personnelles de manière constante depuis au moins 2007 et qu'il dispose d'une promesse d'embauche dans l'entreprise de son frère ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A...est célibataire et sans enfant ; qu'âgé de cinquante-six ans, il a vécu la majeure partie de sa vie au Maroc, où, après le décès de ses parents, résident toujours l'un de ses frères et ses trois soeurs ; qu'il n'est pas contesté que M. A...s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire depuis son entrée en 2007 et n'a déposé une première demande de titre de séjour que le 7 octobre 2013 ; qu'il ne justifie pas mener en France une vie privée ou familiale au sens des stipulations précitées ; que, dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas porté au droit de l'intéressé à une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il suit de là que le préfet du Haut-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ce motif pour annuler son arrêté du 2 décembre 2013 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif et devant la cour ;

5. Considérant que la décision attaquée du préfet du Haut-Rhin du 2 décembre 2013 a été signée par M. Barrois, secrétaire général de la préfecture du Haut-Rhin qui, en vertu d'un arrêté du 9 août 2013 publié au recueil le 12 août 2013 au recueil des actes administratifs de la préfecture, disposait d'une délégation à l'effet de " signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département du Haut-Rhin ", à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions relatives à la police des étrangers ; qu'ainsi, le moyen tiré par M. A...de ce que la décision attaquée aurait été prise par une autorité incompétente manque en fait ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet doivent être motivées les décisions qui (...) refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir " ; qu'aux termes de l' article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré/ La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ; qu'en vertu de ces dispositions, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle du refus de titre de séjour ; qu'il ressort de la lecture même de l'arrêté en date du 2 décembre 2013 que, contrairement à ce que soutient M.A..., celui-ci énonce les considérations de droit et de fait propres à sa situation personnelle et sur lesquelles le préfet du Haut-Rhin a entendu fonder son arrêté ; que ces considérations sont suffisamment développées pour mettre utilement en mesure M. A... de discuter les motifs de l'obligation de quitter le territoire et le juge d'exercer son contrôle en pleine connaissance de cause ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée, en méconnaissance de la loi susvisée du 11 juillet 1979, doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Haut-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 2 décembre 2013 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler l'article 1er de ce jugement et de rejeter les conclusions de M. A...en tant qu'elles tendent à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire du 2 décembre 2013 ;

D E C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 janvier 2014 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg dirigée contre l'obligation de quitter le territoire du 2 décembre 2013 est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N°14NC00321


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00321
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : ROUSSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-11-20;14nc00321 ?
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