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30/10/2014 | FRANCE | N°13NC01657

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 30 octobre 2014, 13NC01657


Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2013, complétée par deux mémoires enregistrés le 28 février 2014 et le 28 mai 2014, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant..., par MeC... ;

M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200997 du 28 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l'année 2007 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et

des pénalités correspondantes ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 eu...

Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2013, complétée par deux mémoires enregistrés le 28 février 2014 et le 28 mai 2014, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant..., par MeC... ;

M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200997 du 28 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l'année 2007 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités correspondantes ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme B... soutiennent que :

- la somme versée par la société Sedistri à la SCI du Quai ne peut s'analyser en un avantage dépourvu de contrepartie dès lors qu'il s'agit d'une indemnité qui vise à réparer un préjudice ;

- la société Sedistri n'a pas respecté l'obligation de restituer à la SCI du Quai des constructions à usage de supermarché alimentaire prévue par les clauses du contrat de bail à construction ; elle doit réparer le préjudice qui en résulte, même si le contrat ne comporte aucune clause indemnitaire ;

- l'intérêt social des deux sociétés a été respecté ;

- l'identité des associés des sociétés en cause est sans influence sur l'obligation d'indemnisation mise à la charge de la société Sedistri ;

- l'indemnité n'a pas été versée dans l'intérêt exclusif de la SCI du Quai, la société Sedistri ayant retiré une contrepartie de cette opération ;

- aucun acte anormal de gestion susceptible de donner lieu à une taxation pour revenu distribué n'a été accompli ;

- M. et Mme B...ayant préservé l'intérêt social de la société Sedistri et de la SCI du Quai, les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2013, complété par un mémoire enregistré le 28 mars 2014, présenté par le ministre chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- en l'absence de clause stipulant le versement par le preneur du bail à construction d'une indemnité à la SCI du Quai au titre de la perte de valeur de l'immeuble, le versement d'une telle indemnité s'analyse en un acte anormal de gestion ;

- la société Sedistri a restitué les constructions conformément au bail à construction et aucun manquement de la société Sedistri à ses obligations contractuelles ne justifiait le versement d'une indemnité à la SCI du Quai ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Guidi, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

1. Considérant qu'un contrat de bail à construction d'un bâtiment à usage de commerce alimentaire portant sur une parcelle cadastrée section AC n° 523 située 55 rue de la République à Senones (Vosges), a été signé le 30 juin 1984 pour une durée de quinze ans, liant, en dernier lieu, la SCI du Quai, bailleur, à la société anonyme Sedistri, preneur ; que la société Sedistri, dont M. et Mme B...sont actionnaires majoritaires, exploitait en conséquence une superette alimentaire à l'enseigne " Marché U " d'une superficie de 494 mètres carrés, sise 14 rue du Quai, ainsi qu'une station service ; qu'en application d'un autre contrat liant, en dernier lieu, la SCI du Quai et la société Sedistri, l'ensemble immobilier situé 57 rue de la République a par ailleurs été donné à bail à usage de parking ; que, dans un contexte d'exploitation déficitaire, la société Sedistri a cédé, pour un prix de 500 000 euros, le fonds de commerce du supermarché et de la station service à la société Codi France, en vue du transfert de la surface commerciale de la superette aux fins de créer un nouveau supermarché de 1 000 mètres carrés dans un autre secteur de la commune ; que, le 15 janvier 2007, la société Sedistri et la SCI du Quai ont conclu une convention prévoyant qu'à titre de dédommagement de la perte de valeur de l'ensemble immobilier sis à Senones 57 rue de la République et 14 quai Jules Ferry, résultant du transfert du fonds de commerce alimentaire, propriété actuelle de la société Sedistri, sur un autre site, la société Sedistri verserait à la SCI du Quai la somme de 100 000 euros ; qu'au terme d'une vérification de comptabilité de la SA Sedistri portant sur les exercices clos en 2007 et 2008, l'administration fiscale a estimé que cette indemnité de 100 000 euros versée au cours de l'exercice 2007 à la SCI du Quai constituait un acte anormal de gestion pour la SA Sedistri et ne pouvait représenter une charge de l'exercice ; que le service a ainsi considéré que cette somme devait être regardée comme appréhendée par les épouxB..., associés exclusifs et à parts égales de la SCI du Quai, et être qualifiée de revenu distribué imposé à leur nom au titre de l'impôt sur le revenu ;

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) " ; que pour être admis en déduction des bénéfices imposables, les frais et charges doivent, d'une manière générale être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise, correspondre à une charge effective, être appuyés de justifications suffisantes et être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés ; qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) " ; que les avantages consentis à une société de personnes doivent être regardés comme appréhendés par les associés de celle-ci ; qu'aux termes de l'article L. 251-1 du code de la construction et de l'habitation : " Constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s'engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d'entretien pendant toute la durée du bail " ; qu'aux termes de l'article L. 251-2 du même code : " Les parties conviennent de leurs droits respectifs de propriété sur les constructions existantes et sur les constructions édifiées. A défaut d'une telle convention, le bailleur en devient propriétaire en fin de bail et profite des améliorations. " ; qu'aux termes de l'article L. 251-3 du même code : " Le bail à construction confère au preneur un droit réel immobilier " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 30 juillet 2014, terme initial du contrat de bail à construction liant la société Sedistri et la SCI du Quai, la propriété du bâtiment à usage de superette devait revenir à la SCI du Quai, sans indemnité pour la société Sedistri et en bénéficiant des améliorations apportées ; que par la convention du 15 janvier 2007, les parties ont toutefois convenu de la résiliation anticipée du bail à construction au jour de la cession de l'ensemble immobilier, comprenant les terrains sis 55 et 57 rue de la République ainsi que le bâtiment sis 14 rue du Quai ; que cette cession est intervenue le 29 septembre 2009 moyennant le versement par l'acquéreur, d'une part, d'une somme de 70 000 euros à la société Sedistri pour le bâtiment situé 14 rue du Quai et, d'autre part, d'une somme de 240 000 euros à la SCI du Quai pour les terrains situés 55 et 57 rue du Quai ; qu'il a également été convenu entre les parties que, à compter de l'arrêt de l'exploitation de la superette par la société Codi France en octobre 2007, la société Sedistri ne verserait plus de loyer à la SCI du Quai à raison des terrains situés 55 et 57 rue de la République, d'un montant respectif d'environ 24 000 et 16 350 euros annuels ; qu'ainsi la SCI du Quai a renoncé aux loyers dus par la société Sedistri pendant deux ans, jusqu'au 30 juillet 2014 terme du bail à construction, ainsi qu'à la propriété du bâtiment édifié 14 rue du Quai qui devait lui revenir à cette date, permettant à la société Sedistri de céder, dans de bonnes conditions financières, un fonds de commerce dont l'exploitation était déficitaire ainsi que le bâtiment, lieu de son exploitation ; que dans ces conditions, et alors même que le bail à construction entre la SCI du Quai et la société Sedistri ne prévoyait aucune indemnisation du bailleur en cas de résiliation anticipée du bail ou de déspécialisation du bâtiment à usage de superette, dont l'autorisation d'exploiter a été transférée en vue de la création d'un nouveau supermarché par la société Codi France, l'indemnité de 100 000 euros versée à la SCI du Quai a eu pour objet de compenser le renoncement par la SCI du Quai aux avantages inhérents au bail à construction et ne saurait, par suite, être regardée comme constitutive d'un acte anormal de gestion lié à un avantage accordé sans contrepartie ; que, par suite, c'est à tort que l'administration a estimé que cette somme constituait un revenu distribué à la SCI du Quai imposable au nom de M. et MmeB..., ses associés uniques ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs conclusions en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondants ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 au titre des frais exposés par M. et Mme B...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 28 juin 2013 est annulé.

Article 2 : M. et Mme B...sont déchargés de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 ainsi que des intérêts et pénalités de retard correspondants.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B...et au ministre chargé du budget.

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N° 13NC01657


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01657
Date de la décision : 30/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ELIDE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-10-30;13nc01657 ?
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