Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant au ...; M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101108 du 30 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 7 octobre 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de Meurthe-et-Moselle a refusé d'autoriser le licenciement de M.A..., ainsi que la décision du 11 avril 2011 par laquelle le ministre chargé du travail a confirmé ce refus ;
2°) de mettre à la charge de la société Cemga Logistics la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le délai de dix jours entre la date de la mise à pied du salarié et la consultation du comité d'entreprise, prévu par les dispositions de l'article R. 2421-14 du code du travail, n'a pas été respecté et le comité d'entreprise a été consulté dans un délai anormalement long qui ne s'explique que par la volonté de l'entreprise d'obtenir sa démission ;
- la participation de M. A...aux actions de blocage du 30 juin 2008 ne constitue pas, à elle seule, une faute lourde de nature à justifier le licenciement ;
- il existe un lien entre la demande de licenciement et les mandats détenus par l'intéressé ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2014, présenté pour la société Cemga Logistics, dont le siège social est situé au 55 avenue Louis Bréguet, BP 44084 à Toulouse (31029), agissant par son représentant légal, par la SCP Joseph Aguera et Associés ; la société Cemga Logistics conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. A...la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le délai de dix jours prévu par les dispositions de l'article R. 2421-14 du code du travail n'est pas prévu à peine de nullité de la procédure ;
- l'ordre du jour de la réunion du comité d'établissement ne pouvait être établi sans être soumis au secrétaire de ce comité ;
- il était matériellement impossible de consulter le comité d'établissement dans les dix jours suivant la mise à pied de M.A... en raison de l'absence du secrétaire, qui ne pouvait donc signer l'ordre du jour, et de l'impossibilité de convoquer M. A...à un entretien préalable dans ce délai ;
- les faits reprochés à M. A...étaient d'une gravité justifiant un licenciement ;
- il n'y pas de lien entre les mandats détenus par M. A...et la demande d'autorisation de le licencier ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 21 juillet 2014, présenté pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 19 août 2014, présenté pour la société Cemga Logistics, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 2 octobre 2014, présentée par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2014 :
- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,
- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,
- et les observations de Me d'Andigné, avocat de la société Cemga Logistics ;
1. Considérant que la société Cemga Logistics a demandé l'autorisation de licencier M. A..., employé au sein de l'entreprise depuis 2001 en qualité de conducteur routier puis de cariste et détenant les mandats de membre titulaire du comité d'établissement, de délégué syndical de l'établissement ainsi que de représentant syndical au sein du comité central de l'unité économique et sociale ; que, par un jugement du 29 juin 2010, confirmé par la Cour administrative d'appel de céans le 22 septembre 2011, le Tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions en date du 7 octobre 2008 de l'inspecteur du travail et du 27 février 2009 du ministre chargé du travail, refusant à la société Cemga Logistics l'autorisation de licencier M. A...; que, cette société ayant réitéré sa demande, l'inspecteur du travail a, de nouveau, refusé d'autoriser le licenciement de l'intéressé par une décision du 7 octobre 2010, confirmée le 11 avril 2011 par le ministre chargé du travail ; que M. A...relève appel du jugement du 30 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé ces décisions ;
2. Considérant que tant le Tribunal administratif de Nancy que la Cour ont considéré, dans leurs décisions susmentionnées, qu'il n'était pas établi que la demande d'autorisation de licenciement de M. A...présentée par la société Cemga Logistics aurait été motivée par d'autres considérations que celles tenant à la part active prise par l'intéressé dans des actions de blocage de camions de livraison qui se sont déroulée du 26 juin au 2 juillet 2008, agissements qui excédaient l'exercice normal des mandats représentatifs qu'il détenait ; que la Cour a relevé à cet égard que la plupart des collègues de M. A...ayant participé aux actions de blocage en cause avaient également fait l'objet de procédures de licenciement alors même qu'ils ne bénéficiaient pas d'une protection pour la plupart d'entre eux ; que, toutefois, pour refuser à nouveau d'autoriser le licenciement de l'intéressé, l'inspecteur du travail, dans sa décision du 7 octobre 2010 attaquée, s'est, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux décisions susmentionnées, fondé sur de nouveaux éléments, résultant de l'enquête qu'il a effectuée lors de la reprise de l'instruction de la demande d'autorisation de licenciement consécutive à l'annulation de sa précédente décision de refus du 7 octobre 2008 ;
3. Considérant en effet que, dans sa décision du 7 octobre 2010, l'inspecteur du travail a relevé que la direction de la société Cemga Logistics avait tenté d'obtenir la démission de M. A..., en utilisant notamment la mise à pied d'autres salariés comme moyen de pression, et qu'il était ressorti de la nouvelle enquête menée que toutes les procédures disciplinaires engagées contre les autres salariés ayant participé aux actions de blocage de juin et juillet 2008 l'avaient été " dans le but principal d'obtenir la démission de M.A... " ; que ces indications sont corroborées par les mentions figurant dans le procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise du 5 août 2008, au cours de laquelle cette instance s'est prononcée, à l'unanimité, contre le licenciement de M.A... ; qu'il ressort en effet de ce procès-verbal que les mises à pied des autres salariés ont été suspendues " à titre exceptionnel et transitoire afin d'obtenir la démission de M.A... " et que ces salariés ont été remis à pied " faute de trouver un accord " avec ce dernier ; qu'ainsi, la demande d'autorisation de licenciement doit être regardée comme n'étant pas sans lien avec les mandats détenus par l'intéressé ; que, par suite, l'inspecteur du travail était tenu de refuser de délivrer l'autorisation sollicitée, quelle que soit la gravité de la faute reprochée à M. A...; que, par conséquent, c'est à tort que le Tribunal administratif de Nancy s'est notamment fondé, dans le jugement attaqué, sur l'absence de lien entre la demande de licenciement et les mandats détenus par l'intéressé pour annuler la décision de l'inspecteur du travail du 7 octobre 2010 et la décision du 11 avril 2011 par laquelle le ministre chargé du travail a confirmé ce refus ;
4. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Cemga Logistics à l'encontre de ces décisions ;
5. Considérant que, dès lors que, ainsi qu'il vient d'être dit, l'inspecteur du travail était tenu de refuser l'autorisation sollicitée, les autres moyens présentés par la société Cemga Logistics devant le Tribunal administratif de Nancy et devant la Cour sont inopérants ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 7 octobre 2010 et la décision du 11 avril 2011 par laquelle le ministre chargé du travail a confirmé ce refus ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Cemga Logistics demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette société une somme de 1 500 euros à verser à M. A...sur le fondement des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1101108 du 30 septembre 2013 du Tribunal administratif de Nancy est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société Cemga Logistics devant le Tribunal administratif de Nancy et ses conclusions devant la Cour tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La société Cemga Logistics versera à M. A...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à la société Cemga Logistics et au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.
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N° 13NC02272