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17/04/2014 | FRANCE | N°12NC02075

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 17 avril 2014, 12NC02075


Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2012, complétée par un mémoire enregistré le 12 août 2013, présentée pour Mme D... C..., demeurant..., par Me Arséguet, avocat ; Mme C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100686 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'

impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et ...

Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2012, complétée par un mémoire enregistré le 12 août 2013, présentée pour Mme D... C..., demeurant..., par Me Arséguet, avocat ; Mme C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100686 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle conteste les rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur les charges relatives à la prétendue activité fictive et les redressements en matière de bénéfices non commerciaux relatifs à la remise en cause des déductions de charges ;

- l'administration n'a pas apporté la preuve du caractère fictif de son activité alors qu'elle justifie, par les pièces versées au dossier, de la réalité des prestations facturées à la SARL Pliage et Parachèvement SCR Baguet pour un montant de 45 224,81 € pour 2004 et 70 835,19 € pour 2005 et que la commission départementale des impôts de l'Isère a estimé que l'administration fiscale n'apportait pas la preuve du caractère fictif des prestations facturées par RMG ;

- les charges d'exploitation exposées pour la réalisation du chiffre d'affaires doivent être admises en déduction ;

- son compagnon a été relaxé en l'absence de matérialité des faits par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Besançon ;

- les pénalités pour manoeuvre frauduleuses et celles pour manquement délibéré ne sont pas justifiées dès lors qu'elle a régulièrement déclaré les recettes encaissées et déduit les charges correspondant à son activité ;

- l'administration ne pouvait appliquer sur la même base imposable à la fois des pénalités pour manquement délibéré et des pénalités pour manoeuvres frauduleuses ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2013, complété par un mémoire enregistré le 4 septembre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- l'administration a apporté la preuve que les revenus fiscalement déclarés par la requérante n'ont pas pour origine l'exercice d'une activité d'agent commercial tant en ce qui concerne les prestations d'intermédiation à la vente que les prestations de mise à jour de fichiers clients pour le compte de la SARL Pliage et Parachèvement SCR Baguet ;

- la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'avis de la commission départementale des impôts de l'Isère qui concerne un autre contribuable et d'autres impositions ;

- la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'arrêt de relaxe rendu par la Cour d'appel de Besançon ;

- contrairement à ce qui est allégué, la majoration de 80 % n'a été appliquée qu'aux seuls chefs de rehaussements tirés de ce que les charges comptabilisées ne pouvaient ouvrir droit à déduction en TVA et être déduites des bénéfices non commerciaux et la majoration de 40 % n'a par ailleurs été appliqué qu'aux seuls chefs de rehaussements portant sur les apports injustifiés et sur le rejet de l'abattement de 20 % réservé aux adhérents d'un centre de gestion agréé ;

- l'application de la majoration de 80% prévue à l'article 1729 du code général des impôts est justifiée dès lors que la requérante a agi de manière à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration et a mis en oeuvre des procédés lui permettant de percevoir des revenus tout en réduisant considérablement la matière imposable ;

Vu la lettre du 11 février 2014 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 27 mars 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 27 février 2014 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 3 mars 2014 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2014 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

1. Considérant que l'entreprise de MmeC..., qui a déclaré exercer, entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005, une activité libérale à titre individuel de " négociations techniques et commerciales dans l'industrie et le bâtiment " sous l'enseigne R. M. G., a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la taxe sur la valeur ajoutée et les bénéfices non commerciaux au titre des exercices 2004 et 2005 ; qu'à l'issue de ces opérations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été assignés, selon la procédure de rectification contradictoire, à hauteur de 3 809 euros pour 2004 et de 8 516 euros pour 2005 et des suppléments d'impôt sur le revenu, selon la procédure contradictoire à hauteur de 73 217 euros au titre de l'année 2004 et selon la procédure d'évaluation d'office à hauteur de 107 303 euros au titre de l'année 2005 ; que Mme C... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ; que dans le dernier état de ses écritures, Mme C... demande à la Cour de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés à hauteur de 1 333,86 euros pour 2004 et 4 432 euros pour 2005 ainsi que des suppléments d'impôt sur le revenu à raison du rehaussement en base de ses bénéfices non commerciaux à hauteur de 20 625 euros en 2004 et 28 906 euros en 2005 ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Considérant que la procédure suivie en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble de la période vérifiée étant la procédure contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et Mme C...ayant manifesté son désaccord aux rectifications dans les délais légaux, la charge de la preuve du bien fondé des rappels d'imposition en cause incombe à l'administration ;

En ce qui concerne le bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel " ; qu'aux termes de l'article 271 du même code : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) " ; qu'aux termes de l'article 230 de l'annexe II au même code dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) " ;

4. Considérant que le service a relevé que Mme C...avait déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des dépenses portées en comptabilité pour un montant de 3 048 € en 2004 et 6 058 euros en 2005 ; que malgré les demandes du vérificateur, l'intéressée n'a pas été en mesure d'apporter des justificatifs de l'activité qu'elle déclarait exercer, aucune relation commerciale effective n'ayant été démontrée avec les clients dont il était fait état ; que la requérante ne produit, ni en première instance, ni en appel, d'élément de nature à établir que les dépenses ayant donné lieu à déduction de taxe sur la valeur ajoutée ont été exposées pour les besoins de son activité ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve du bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés ;

Sur les rappels d'impôt sur le revenu :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Considérant que la procédure d'évaluation d'office prévue par les dispositions du 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales a été mise en oeuvre pour les bénéfices non commerciaux de l'exercice 2005 ; que la requérante ne conteste pas qu'elle a expressément accepté, à l'issue de la procédure de vérification, les redressements en bases de 9 186 euros pour 2004 établis selon la procédure contradictoire ; que la charge de la preuve du caractère exagéré des suppléments d'impôt sur le revenu assignés à raison du redressement en bases de 9 186 euros pour 2004 et pour l'ensemble de l'année 2005 incombe donc à la contribuable ;

En ce qui concerne le bien fondé des rappels d'imposition :

6. Considérant, d'une part, que l'administration fiscale a relevé que Mme C...n'a pas été en mesure d'apporter, pendant les opérations de vérification de comptabilité, un quelconque élément d'information, pièce ou document, permettant de justifier de la réalité des prestations d'intermédiation à la vente, de mise à jour de fichiers clients de sociétés ou autres prestations qu'elle était censée réaliser dans le cadre de son activité déclarée au registre du commerce et des sociétés ; que la requérante a notamment admis devant le vérificateur ne pas connaître les clients qu'elle prétendait mettre en relation avec les sociétés commettantes ; que le service a par ailleurs observé que la SA B...industrie est le seul et unique client que Mme C...aurait apporté à ses commettants ; qu'une vérification de la comptabilité de la SA B...industrie, effectuée par l'administration fiscale, a révélé que cette société versait des commissions à une autre société, la SARL Pliage et Parachèvement SCR Baguet, pour des prestations de recherche de clients analogues à celles prétendument réalisées par Mme C...dans le cadre de l'entreprise R. M. G. ; que, par ailleurs, les prestations de service censément réalisées pour le compte de la SA B...industrie par Mme C...étaient retracées sur des factures qui portaient les mêmes numéros d'ordre que les factures délivrées par la SARL Pliage et Parachèvement SCR Baguet à la SA B... industrie ; qu'il est constant que le compagnon de la requérante, M. A...B..., était le directeur commercial de la SA B...industrie ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'avis de la commission départementale des impôts de l'Isère qui concerne un autre contribuable et d'autres impositions et qui ne porte pas sur le caractère déductible des charges exposées par Mme C...; qu'ainsi, l'intéressée n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité des prestations qu'elle prétendait effectuer ;

7. Considérant, d'autre part, que l'autorité de la chose jugée des décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation des faits mentionnés dans les jugements et arrêts, support nécessaire du dispositif, et à leur qualification au regard de la loi pénale ; qu'en revanche, elle ne s'attache pas à l'appréciation de ces mêmes faits au regard de la loi fiscale, notamment en ce qui concerne l'évaluation des bases d'imposition ; qu'il résulte des constatations de fait de l'arrêt de la cour d'appel de Besançon en date du 13 mars 2012 que " la facturation précise des prestations de RMG à la société SARL Pliage et Parachèvement SCR Baguet existe " ; que, si cet arrêt a prononcé la relaxe de M. A...B...du chef de rétrocession de commissions surévaluées, une telle qualification ne s'impose pas au juge de l'impôt dans le cadre de l'évaluation des bases d'imposition de MmeC... ;

8. Considérant qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, Mme C...ne démontre pas avoir exposé de charges pour les besoins de son activité ; que l'administration était donc fondée à ne pas admettre lesdites charges en déduction des résultats déclarés ;

Sur les pénalités pour manoeuvre frauduleuse :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux pénalités en litige : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses (...) " ;

10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la majoration de 80 % n'a été appliquée qu'aux seuls chefs de rehaussements tirés de ce que les charges comptabilisées ne pouvaient ouvrir droit à déduction en TVA et être déduites des bénéfices non commerciaux et que la majoration de 40 % n'a par ailleurs été appliqué qu'aux seuls chefs de rehaussements portant sur les apports injustifiés et sur le rejet de l'abattement de 20 % réservé aux adhérents d'un centre de gestion agréé ; que dès lors, le moyen tiré de ce que ces pénalités ont été appliquées cumulativement sur les mêmes bases imposables manque en fait ;

11. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut qu'en encaissant des recettes ne provenant pas d'une activité réelle et en déduisant des dépenses purement personnelles sans rapport avec une quelconque activité professionnelle, la requérante a sciemment et en toute connaissance de cause mis en oeuvre un ensemble de procédés destinés exclusivement à lui permettre de réduire la matière imposable ; qu'elle a délibérément masqué la fictivité de l'activité déclarée de " négociations techniques et commerciales dans l'industrie et le bâtiment " par l'émission de factures de prestations de service et de commissions permettant de présenter sous une forme régulière l'origine des recettes qu'elle encaissait ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve que Mme C...s'est livrée à des manoeuvres frauduleuses ; que la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts lui a donc été infligée à bon droit ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme C... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C...et au ministre chargé du budget.

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N° 12NC02075


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